À Soulac-sur-Mer, sur les côtes girondines, la mer n'est plus très loin de battre les flancs du Signal, un immeuble désormais désaffecté, qui avait pourtant plus de 200 mètres de recul sur l'océan lors de sa construction, en 1967. En remontant plus au nord, c'est la côte bretonne qui rétrécit, touchée à 35% par l'érosion marine.
La France ne fait pas figure d'exception à cet égard: à travers toute l'Europe, la mer empiète sur près d'un cinquième du littoral, estime l'Union européenne. Les plages disparaissent progressivement, et le dérèglement climatique accélère le processus.
Plus 4°C, moins 50% de plages
D'après une étude publiée récemment dans la revue scientifique Nature Climate Change, c'est près de la moitié des plages de sable que le monde pourrait perdre d'ici la fin du siècle. Une augmentation des températures d'au moins 4°C d'ici l'an 2100 ferait monter le niveau de la mer, provoquant une augmentation de l'érosion et des inondations côtières.
Inutile cependant d'attendre plusieurs dizaines d'années pour constater l'ampleur du phénomène. En Crète, c'est déjà près de 70% des plages qui sont en recul, tandis que 90% du tourisme sur l'île est imputable à ses plages. Au Portugal, les autorités prévoient la démolition de plusieurs bâtiments sur 122 kilomètres de côte, entre Caminha et Espinho. Au Danemark, un phare centenaire pesant près de 1000 tonnes a été déplacé vers l'intérieur des terres pour prévenir son effondrement...
L'Europe, qui est le continent présentant le ratio le plus élevé de côtes par rapport à la surface terrestre totale, est particulièrement touchée par l'érosion côtière. Le littoral, qui a largement été aménagé au profit d'un tourisme balnéaire, voit ses activités être menacées par l'augmentation du niveau de la mer. Ainsi de la station balnéaire de Lacanau, toujours en Gironde, qui envisage une relocalisation de ses activités.
Un coût considérable
En 2009, la Commission européenne estimait la valeur des biens situés à moins de 500 mètres du littoral de l'union européenne à 1.000 milliards d'euros. D'après un second rapport, les dégâts causés par l'érosion et les inondations pourraient s'élever à un coût de 11 milliards d'euros par an au cours des trente prochaines années, et 25 milliards par an d'ici 2080.
Sur les quarante-neuf sites classés au patrimoine mondial de l'Unesco situés au bord de la Méditerranée, déjà quarante-deux sont menacés, comme Syracuse, la cité médiévale de Rhodes, ou Venise.
Pourtant, le fameux «Green Deal», ou «pacte vert», présenté par la Commission européenne en décembre 2019, ne fait mention ni de l'érosion marine, ni de l'élévation du niveau de la mer.