Sciences

Pourquoi les piverts n'ont jamais mal au crâne

Temps de lecture : 2 min

La science a la réponse.

Woodpecker | Mary Shattock via Flickr CC License by
Woodpecker | Mary Shattock via Flickr CC License by

Vingt percussions par seconde: c'est l'hallucinant rythme du pivert, oiseau vivant dans de nombreuses régions forestières du globe. Popularisé par Woody Woodpecker (et Louis de Funès, mais c'est une autre histoire), le pivert (ou pic vert) utilise son bec pour perforer des troncs d'arbres afin d'en extraire des insectes et de la sève.

Deux chercheuses en physique, Joanna McKittrick (de l'université de San Diego) et Jae-Young Jung (de l'université de San Francisco) ont voulu essayer de comprendre pourquoi le pivert ne se blesse jamais et pourquoi il n'éprouve aucune douleur. Spécialistes de l'étude des matériaux biologiques (peaux, crânes, plumes, coquillages), elles ont mené leur travail de recherche avec la certitude qu'il pourrait ensuite être utilisé pour concevoir des équipements de protection plus efficaces pour les humains. On imagine par exemple que les ouvriers et ouvrières maniant le marteau-piqueur pourraient en bénéficier.

Le corps du pivert est un dispositif complexe. Ses griffes et les plumes de sa queue sont extrêmement résistantes, ce qui lui permet de maintenir un équilibre idéal lorsque son bec percute le tronc d'arbre à une vitesse de 7 mètres par seconde (soit 25,2 kilomètres par heure). Au moment du contact, sa tête atteint 1200 g, cette dernière lettre désignant la constante gravitationnelle également utilisée dans de multiples domaines tels que l'aérospatiale.

Le football américain, un truc de fragiles

À ce stade, un point de comparaison s'impose: d'après la NFL (fédération de football américain), les sportifs et sportives risquent une commotion cérébrale dès 80 g, soit une quantité quinze fois moins élevée. Chez l'être humain, les commotions cérébrales peuvent engendrer des pertes de mémoires, des pics d'agressivité, des dépressions ou l'apparition de pensées suicidaires. Or les piverts vont bien, et continuent à perforer les arbres sans se poser trop de questions.

Pour mener à bien leurs recherches, McKittrick et Jung ont décidé de comparer les crânes des piverts et ceux des poulets, ce qui leur a permis de confirmer que le pivert a la faculté d'absorber les impacts, contrairement aux autres volatiles. Os du crâne, muscles du cou, bec et mâchoire: l'intégralité du système lui permet d'atténuer les chocs.

Les os du crâne du pivert ont une composition chimique et une densité singulières. Ils sont bien plus fins que la moyenne des autres oiseaux et animaux, et il y a moins d'épaisseur de fluide entre le cerveau et le crâne, lequel est à la fois plus dur et plus robuste. Ce n'est pas si fréquent: les matériaux naturels ont tendance à jouer sur le compromis entre dureté et solidité, car un matériau trop dur a souvent tendance à moins bien amortir les chocs.

En outre, la quantité moindre de fluide entre le crâne et le cerveau a pour effet de limiter les mouvements possibles du cerveau durant les phases de percussion. Les autrices de l'article utilisent une analogie assez parlante: le cerveau du pivert est comme le jaune d'un œuf dur, contrairement à celui des autres animaux, dont le cerveau serait plus proche du jaune d'un œuf cru. Lorsqu'on les secoue, l'un reste intact, tandis que l'autre subit des perturbations notables.

Les piverts sont réellement faits pour se nourrir de cette façon: un os intégré dans leur langue leur permet d'extraire les insectes plus aisément. Cette langue fonctionne comme un véritable ressort, puisqu'elle s'enroule autour de l'arrière du crâne et remonte jusqu'à l'avant, entre les deux yeux. Et quoi de mieux qu'un ressort pour amortir les différentes forces qui s'exercent.

La recherche sur le pivert n'en est encore qu'à ses débuts, comme l'affirment les deux spécialistes. Les mécanismes de défense et de réparation ont encore sans doute beaucoup à nous apprendre sur la façon dont il peut être possible de protéger et de soigner les cerveaux humains endommagés.

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