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L'addiction des ados aux smartphones: pas de conclusion hâtive

Temps de lecture : 2 min

Une étude britannique affirme qu'un quart des ados serait accro à son téléphone. Mais les mots ont un sens...

Smartphone | Yacine Petitprez via Flickr CC License by
Smartphone | Yacine Petitprez via Flickr CC License by

D'après une étude britannique dévoilée cette semaine, l'addiction au smartphone concernerait 23% des ados. Un chiffre énormément partagé, qui contribue à alimenter la psychose autour du rapport des jeunes gens vis-à-vis de leurs appareils mobiles (comme si les adultes maîtrisaient totalement leur consommation d'outils numériques).

Dans un article publié par New Scientist, la journaliste Clare Wilson remet sérieusement en cause cette affirmation. Elle notamment que si le terme «addiction» est entré dans le langage courant pour désigner n'importe quelle passion un peu dévorante, il désigne avant tout une pathologie cérébrale, comme l'explique par exemple la page qui lui est consacrée par le ministère français des Solidarités et de la Santé.

Clare Wilson a disséqué l'étude en question, qui compile les travaux réalisés dans 41 études différentes. Elle dénonce le caractère alarmiste de l'annonce, les conclusions de l'étude ne faisant que «confirmer qu'il y a des ados qui passent énormément de temps sur leur téléphone», ce que «leur famille savait sûrement déjà».

La journaliste enfonce le clou: même si une partie des ados a déjà repoussé son travail à plus tard pour utiliser son smartphone, ou a déjà entendu ses proches lui reprocher son utilisation excessive, peut-on réellement parler d'addiction sur ces simples faits? Dans certaines phrases, elle propose de remplacer le mot «smartphone» par le mot «livre» afin de se faire une idée.

L'étude explique en fait qu'environ un quart des ados utilisent beaucoup leur portable, et même sans doute trop. En revanche, aucun chiffre n'est avancé concernant les jeunes gens qui se coupent de toute vie sociale ou finissent par négliger leur hygiène et leur santé.

Pour Amy Orben, de l'université de Cambridge, l'étude relayée cette semaine par de nombreux médias anglo-saxons ne serait même pas représentative: les 41 études compilées auraient été sélectionnées en utilisant le mot «addiction» parmi les mots-clés de recherche. Ce qui signifie que les travaux de recherche n'évoquant pas la prétendue addiction des ados, mais parlant de leur rapport au smartphone en d'autres termes, n'ont pas été pris en compte.

Le duo à l'origine de l'étude, Nicola Kalk et Ben Carter, du prestigieux King's College de Londres, se défend mollement en admettant le caractère «limité» de son travail, mais affirme avoir mis en place un modèle qui mérite maintenant d'être étudié de plus près.

Pas de lien de cause à effet avéré

Mais ce n'est pas tout: l'étude de Kalk et Carter ne montre pas de lien de cause à effet entre l'utilisation de smartphones et la déprime ou la dépression qui peut s'emparer des jeunes. Elle met juste en valeur une vague corrélation entre l'utilisation de téléphones portables et certains problèmes liés à la santé mentale, sans jamais démontrer que les smartphones en sont la cause.

Sur ce point, Clare Wilson ne critique pas le travail de l'équipe de recherche, mais son exploitation par les médias, pour qui il est parfois plus simple de titrer que l'utilisation excessive de smartphones pousse les ados vers la dépression. Le téléphone mobile fait parfois office de bouc émissaire très pratique pour éviter de s'attarder sur les nombreuses autres causes possibles de mal-être adolescent.

La journaliste craint que ce genre d'étude alarmiste ne pousse certains parents à priver leurs enfants de smartphone, alors que celui-ci peut parfois permettre aux ados de trouver en ligne le réconfort et l'amitié qu'il leur est parfois difficile de trouver dans leur quotidien. La confiscation pourrait alors être contre-productive.

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