Restaurant Guy Savoy à La Monnaie de Paris
Le grand chef, trois fois sacré meilleur restaurateur du monde, a conçu une admirable carte de spécialités plébiscitées: les huîtres en nage glacée, huîtres concassées, granité d'algues et citron (120 euros), la fameuse soupe d'artichaut à la truffe noire, brioche feuilletée aux champignons et truffes (135 euros), la grosse langoustine de casier en bouillon (presque) gras (150 euros). Parmi les poissons, le homard et deux ravioles de homard (170 euros), le saumon «figé» sur la glace, consommé brûlant, perles de citron (105 euros), et le rare black cod noir (130 euros).
À La Monnaie de Paris, le black cod noir autour. | Laurence Mouton
Côté viandes, la poulette farcie en demi-robe, les suprêmes en «jus-mousseux», les cuisses «tradition», pour deux à trois personnes (250 euros) et le foie gras de canard braisé et les légumes racines présentés en marmite (135 euros).
Puis le comté de 36 mois, noix dans le croustillant (38 euros) et le sublime mille feuilles ouvertes à la vanille de Tahiti (49 euros). Café du Mexique et moka d'Éthiopie (9 euros).
À La Monnaie de Paris, le homard en deux ravioles de homard. | Laurence Mouton
Le grand menu «couleurs, textures et saveurs» en treize services... ou plus (478 euros) rassemble les grands plats du maître qui voit tous les clients en salle, un homme de culture et de fraternité. Le très beau site habité par l'ancien conservateur sur la Seine, c'est l'appartement tout de boiseries, de charme et de tableaux, certains prêtés par François Pinault, en harmonie parfaite avec le raffinement du splendide récital culinaire: un grand moment de civilisation de la table.
À La Monnaie de Paris, les ris de veau rissolés en brochette verticale. | Laurence Mouton
11 quai de Conti 75006 Paris. Tél.: 01 43 80 40 61. Menu La Table des Internautes au déjeuner à 130 euros (sur réservation par internet), et en 7 services à 250 euros, 320 euros avec champagne et vin. Carte de 250 à 400 euros. Fermé samedi midi, dimanche et lundi. Voiturier dévoué.
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Le Meurice Alain Ducasse
C'est le plus ancien grand hôtel de Paris (1835) édifié dans un ancien couvent donnant sur les Tuileries. Dans une ambiance façon Versailles, la salle à manger au décor chargé de marbres, de miroirs, de lustres, haute de plafond offre un cadre royal pour une grande cuisine de luxe gastronomique. Que des produits nobles choisis par le valeureux chef Jocelyn Herland qu'Alain Ducasse avait envoyé au Dorchester de Londres, heureuse initiative. Ce grand gaillard, excellent technicien de la poêle, mitonnait des assiettes étoilées (gibiers) d'allure très française.
Salle du restaurant Alain Ducasse au Meurice. | Pierre Monetta
À Paris, ce maître des saveurs et cuissons exécute des spécialités anciennes, modernisées par le traitement des produits: le petit pâté chaud de perdreau et foie gras, sauce Périgueux reste une superbe entrée d'un classicisme allégé (115 euros à la carte et au menu Chasse), le canard colvert à la trévise au raifort surprend par sa garniture fondante (au menu Chasse) et le lièvre à la royale à la sauce brune au foie gras (au menu Chasse) est le chef-d'œuvre actuel de la carte.
Ce plat historique n'est pas lourd mais fondant et tapisse le palais d'une sensualité de bon aloi, un rouge voluptueux de la Côte de Nuits en Bourgogne ou de Pomerol lui donnera la réplique: un grand moment de plaisir.x
Au Meurice Alain Ducasse, le sanglier brioché. | Pierre Monetta
À la carte, les langoustines d'Écosse au fenouil et citron (135 euros), les noix de Saint-Jacques de Normandie, poireaux et shiso (130 euros), le bar de ligne «ikejime» (saigné), chou-fleur et caviar gold (135 euros), le tronçon de turbot aux artichauts (125 euros) et la délicieuse poulette de la ferme de Culoiseau à la sauce Albuféra et céleri, très beau plat (175 euros).
Au Meurice Alain Ducasse, le petit pâté chaud de perdreau et foie gras, sauce Périgueux. | Pierre Monetta
Les desserts sont signés du sorcier de la pâtisserie, Cédric Grolet: une composition à la courge fondante (au menu Chasse), le magnifique Saint-Honoré, le baba au rhum à la crème mi montée et le chocolat et cacao de la Manufacture Alain Ducasse –toutes ces gâteries inoubliables sont à 25 euros.
À coup sûr, un très beau récital de merveilles voluptueuses, délivrées par une brigade de salle dirigée par Frédéric Rouen à l'écoute des mangeurs. Jocelyn Herland mérite la troisième étoile, le cadre à l'ancienne sied bien à ce somptueux ensemble de maestria gastronomique –il en faut au pays de Brillat-Savarin et Joël Robuchon.
228 rue de Rivoli 75001 Paris. Tél.: 01 44 58 10 55. Menus au déjeuner à 85, 110 et 130 euros, de Chasse à 380 euros, Collection à 580 euros, Table du Chef à 650 euros. Carte de 160 à 290 euros. Menu de Noël à 900 euros, du Nouvel An à 1.350 euros, le tout avec accord mets et vins. Pouilly-Fuissé au verre (25 euros). Fermé samedi et dimanche. Voiturier.
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Le Grand Véfour
Avec la Tour d'Argent (1582), c'est le plus ancien restaurant de Paris en activité depuis la fin de la Révolution et le Directoire. Bonaparte fut un grand client, tout comme Victor Hugo, Alexandre Dumas, Sacha Guitry, André Malraux, Colette et Jean Cocteau, les voisins du Palais Royal à qui Raymond Oliver, premier trois étoiles du lieu de mémoire (1953), faisait des confidences et concoctait des plats de rêve dont le pigeon farci André Malraux.
Salle du restaurant Le Grand Véfour. | Jérôme Mondière
Succéder au génial Raymond Oliver, voilà un singulier défi que Guy Martin, élevé dans le goût des bonnes choses par ses parents, va relever avec brio. En quelques années au piano, le savoyard mélomane va regagner les trois étoiles (2000) grâce à une cuisine fine, très française: le Parmentier de queue de bœuf aux truffes (112 euros) et les ravioles de foie gras, crème foisonnée truffée (98 euros) ont marqué le Grand Véfour du XXIe siècle.
Au Grand Véfour, le Parmentier de queue de bœuf. | Jérôme Mondière
Dans ce décor d'une somptueuse beauté, admirablement préservé, Guy Martin, rarement absent, a composé un menu au déjeuner d'un parfait prix-plaisir (115 euros). Le foie gras de canard en terrine, betteraves et lait de chèvre émulsionné précède le lieu jaune, le poulpe dans une tranche de barbue ou le filet de canette au persil, choux de Bruxelles et jus aux graines suivi du palais noisette et chocolat grands crus, glace au caramel: un ensemble mitonné avec doigté et goût. Une parenthèse de savoir-vivre et de raffinement, inoubliable. Complet le soir et quelquefois à midi.
Au Grand Véfour, les ravioles de foie gras, crème foisonnée truffée. | Jérôme Mondière
17 rue de Beaujolais 75001 Paris. Tél.: 01 42 96 56 27. Menu Plaisir à 315 euros. Carte de 210 à 290 euros. Fermé samedi et dimanche. Voiturier.
Antoine
Ce restaurant lumineux des quais rive droite, la Tour Eiffel en point de mire, a donné sa chance à Thibault Sombardier, très bon chef devenu un as de la cuisine de poissons – il concocte la bouillabaisse à ses heures.
De la carte actuelle, il faut privilégier la chair de tourteau et le tartare de gamberoni, poutargue (50 euros), le délicieux pain soufflé de merlan, sabayon à l'estragon, sublime composition (26 euros), l'aiguillette de Saint-Pierre cuite au beurre d'herbes et coquillages au curry vert (65 euros), le homard bleu aux cèpes, oignons grillés, beurre noisette et sabayon, très beau plat (80 euros) et une viande d'agnelet du pays d'Oc, le carré et l'épaule confite, fine mousseline d'aubergine à la flamme (55 euros). Pains Poujauran au levain.
Au restaurant Antoine, le feuilleté toasté aux champignons des bois. | Thibault Sombardier
Quatre desserts dont l'exquis soufflé au chocolat et Armagnac (20 euros), les fines arlettes caramélisées (20 euros) et la tarte fine à la rhubarbe et fleur d'oranger, rhubarbe confite (20 euros).
Au restaurant Antoine, le pain soufflé de merlan en feuille de seiche. | Thibault Sombardier
Le Michelin a étoilé la symphonie marine et ce perfectionniste des cuissons et des accompagnements, certaines assiettes valent deux étoiles et les bons prix au déjeuner dans ce quartier de l'Alma, une aubaine. Allez-y!
Au restaurant Antoine, les pétales de champignons, mulet doré en fines tranches et concombre mariné. | Thibault Sombardier
10 avenue de New York 75016 Paris. Tél.: 01 40 70 19 28. Menus au déjeuner à 49 euros (3 services), Terre Mer (5 services) à 120 euros. Au dîner, menu à 160 euros (sept services). Deux verres de vin à 25 euros. Fermé dimanche et lundi. Voiturier.
La Brasserie du Lutetia
Le groupe The Set, propriétaire du grand hôtel cher à Jean-François Revel et Pierre Assouline, historien de l'occupation allemande, a eu la bonne idée de confier le restaurant de poissons et crustacés à Gérald Passédat, le chantre de la Méditerranée (très habile pêcheur), grand chef trois étoiles au Petit Nice à Marseille. À sa sublime carte, pas moins de cinquante poissons dont une bouillabaisse d'anthologie.
Pour le Lutetia, il a composé un superbe menu «Bouille Abaisse des Auffes», un quartier marin de la deuxième ville de France, servi au dîner et le dimanche midi. Le voici:
• Avant-goût: consommé Garum
• Premier palier: soupe au caillou
• Second palier: pistes et tapenade fumée
• Troisième palier: la Bouille Abaisse, croûtons aillés, rouille, parmesan et soupe servie à part
• Dessert: fraîcheur de kiwi-concombre, sorbet yaourt, éclats de meringue
À la Brasserie Lutetia, la soupe au pistou de Mamie Mélanie. | Richard Haughton
À la carte de la brasserie, le chef Patrick Charvet propose le consommé provençal à l'oignon et anchois (16 euros), le ceviche de thon, tapenade fumée (26 euros), la foccacia de sardinillas à la tomate et poutargue (19 euros), les six palourdes en persillade à la plancha (18 euros), le tartare de bœuf aux câpres (28 euros).
Et les chouchous de Passédat: la charcuterie de poisson des boucaniers (17 euros), la soupe au pistou exquise Mamie Mélanie (21 euros), le foie gras de canard aux algues (26 euros), le dos de maigre, haricots verts grillés en persillade (33 euros), le fritto misto «Cinque Terre» et panisses (29 euros), le filet de turbot aux sucs de viande et câpres, mousseline de pommes de terre (36 euros), le homard canadien vapeur au beurre blanc (59 euros), la daurade entière flambée au pastis (45 euros), l'épaule d'agneau, pois chiches (82 euros pour deux). Un récital de saveurs et de textures.
À la Brasserie Lutetia, le fritto misto. | Richard Haughton
Parmi les desserts, l'île flottante aux pralines roses (11 euros), les crêpes Suzette flambées au Grand-Marnier (18 euros), la tarte au citron meringuée (13 euros) et le chocolat Abysse noir (15 euros).
L'une des meilleures brasseries de Paris dans une salle à manger claire, animée, ouverte sur le jardin public.
À la Brasserie Lutetia, le foie gras de canard aux algues. | Richard Haughton
45 boulevard Raspail 75006 Paris. Tél.: 01 49 54 46 00. Menu Bouille Abaisse à 95 ou 115 euros. Carte de 80 à 110 euros. Pas de fermeture.
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La Poule au Pot
Jean-François Piège, grand cuisinier, et son épouse Élodie, bonne éclaireuse, ont redonné de la vie et de l'attractivité à ce bistrot des Halles tombé dans l'oubli. L'ancien bras droit d'Alain Ducasse à Paris et à Monaco a rajeuni le décor de cette brasserie d'époque et imposé une carte de plats bourgeois qui ont meublé la mémoire de très bons gourmets.
Au restaurant La Poule au Pot, le filet de bœuf charolais sauce au poivre. | Nicolas Lobbestael
Ainsi on vient ici, dans cette enseigne revigorée, pour savourer la gratinée à l'oignon des Halles d'exception (16 euros), la quenelle de brochet sauce Nantua aux écrevisses (30 euros), les cuisses de grenouille en persillade (36 euros), le feuilleté de ris de veau aux morilles (48 euros), le homard bleu refroidi sauce rémoulade (48 euros), le saumon bio sauce à l'oseille (38 euros), le hachis Parmentier de joue et queue de bœuf (30 euros), le lièvre de Beauce la cuisse en civet à la française (48 euros), la poire Belle Hélène (16 euros).
Au restaurant La Poule au Pot, l'île flottante aux pralines roses. | Nicolas Lobbestael
Un récital remarquable, proche d'une sorte de perfection emballante, une adresse de choix à privilégier. Prix justifiés.
9 rue Vauvilliers 75001 Paris. Tél.: 01 42 36 32 96. Menus à 48 et 82 euros. Carte de 53 à 78 euros. Pas de fermeture.
Benoît
Le meilleur bistrot de Paris, le seul étoilé au Michelin? Fondé en 1912, un peu après le Fouquet's et Maxim's, animé par le regretté Michel Petit, parfait amphitryon, l'établissement conservé dans son jus a été réanimé par Alain Ducasse, grand chef de tradition. Il a nommé en cuisine Fabienne Eymard formée au Taillevent, passée par le Benoît de New York, un sacré challenge: le foie gras et le cassoulet sont célébrés dans la Grosse Pomme pour des nostalgiques de la France des plats de jadis, un défi singulier.
Au restaurant Benoît, les escargots. | Pierre Monetta
La cheffe trentenaire, respectueuse du legs culinaire d'hier, concocte des préparations oubliées comme la rarissime langue de bœuf Lucullus (24 euros), la soupe crémeuse d'écrevisses à la ciboulette (28 euros), les neuf escargots en coquille (bravo) au beurre d'ail et fines herbes (22 euros), des prémices appétissants et nostalgiques commentés en salle par Franck Rotenberg.
Parmi les poissons, le filet de sole Nantua, épinards à peine crémés (52 euros), le tronçon de barbue au vin jaune, champignons (42 euros) et les noix de Saint-Jacques à la grenobloise, chou-fleur (52 euros).
Au restaurant Benoît, les profiteroles. | Pierre Monetta
Côté préparations carnées, le cassoulet aux haricots blancs s'impose (20 ou 36 euros) tout comme le sauté de ris de veau, crêtes et rognons de coq, foie gras et jus truffé (48 euros), le filet de bœuf au sautoir, sauce bordelaise à la moelle, gratin de macaroni (54 euros). Douce gâterie, les profiteroles au chocolat chaud à damner un saint (14 euros).
De assiettes copieuses, des goûts justes, le Michelin a raison de soutenir cette maison très parisienne au décor patiné par le temps.
20 rue Saint-Martin 75004 Paris. Tél.: 01 42 72 25 76. Menu au déjeuner à 39 euros. Carte de 90 à 120 euros. Plats du jour, palombe rôtie aux légumes (48 euros) et le Fleurie gouleyant 2016 (16 euros). Pas de fermeture.
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La Scène Thélème
L'ancien restaurant trois étoiles de Guy Savoy a été repris et transformé par Jean-Marie Gurné, un homme de culture, passionné par le théâtre vivant. Et le plaisir de la bonne chère. Il a eu la bonne idée de recruter un chef japonais francophile, Yoshitaka Takayanagi, formé au Grand Véfour de Guy Martin, au Pavillon Ledoyen de Yannick Alleno, au Meurice d'Alain Ducasse et passé par l'Agapé étoilé. Pour ce nouveau poste de chef, il a obtenu carte blanche et livre des assiettes fines et ciselées comme la tarte sucrée salée de cèpes sautés à l'huile d'ail, les noix de Saint-Jacques de Normandie snackées à l'huile d'olive suivies d'un délicieux lièvre à la royale quasi parfait, ni lourd ni pesant.
Au restaurant de la Scène Thélème, la tarte sucrée salée de cèpes sautés à l'huile d'ail. | Alban Couturier
À côté de ces plats au menu, le lieu jaune cuit au four, purée de potiron jaune au curry, écume d'ail, la pintade ou volaille jaune, galette de riz croustillante garnie de la cuisse et, pour terminer, la tartelette au chocolat manjari et crème à la fève de Tonka ou la gavotte garnie d'une compotée de pomme pink lady, caramel, yuzu posée sur une crème à la vanille, plaisante composition.
Au restaurant de la Scène Thélème, le lièvre à la royale. | Alban Couturier
Imaginés par le repreneur amoureux du théâtre, ces agapes signatures, bienvenues dans ce cadre dépouillé, peuvent être les prémices à un moment spectacle donné sur une petite scène, limitrophe de la salle à manger. Le grand acteur Jacques Weber est prévu au début 2020. Service des vins en salle de la sommelière connaisseuse Diane Blanch.
18 rue Troyon 75017 Paris. Tél.: 01 77 37 60 99. Menus au déjeuner à 43 ou 59 euros. Au dîner à 69, 85 et 109 euros. Menu spectacle à 81 euros comprenant la place de théâtre et le menu. Le restaurant est fermé au déjeuner le samedi, dimanche, lundi et au dîner, le samedi et dimanche.