Anxiété, idées noires, troubles bipolaires: l'une des plus grandes études d'imagerie cérébrale jamais menée a peut-être décelé la clé permettant de mieux comprendre ces souffrances.
Des scientifiques ont étudié près de 9.000 analyses cérébrales provenant de 226 études d'imagerie fonctionnelle précédemment réalisées et ont comparé les données d'adultes en bonne santé avec celles de sujets affectés par des troubles de l'humeur ou de l'anxiété.
Les résultats, publiés dans la revue médicale JAMA Psychiatry, montrent chez la deuxième catégorie d'individus une activité anormalement faible de certaines régions du cerveau, notamment celles chargées de suspendre notre réflexion et celles nous permettant de changer rapidement d'idée.
Ces zones, désignées dans la recherche comme étant liées au «contrôle cognitif», correspondent au cortex préfrontal et pariétal inférieur, ainsi qu'à l'insula et au putamen. L'équipe de recherche a également noté une hyperactivité de l'amygdale gauche, censée «traiter les pensées et les sentiments émotionnels».
Spirale négative
L'étude suggère que les personnes souffrant de troubles anxieux et de l'humeur ruminent sans cesse et sont incapables d'échapper à leurs pensées négatives. Ce serait en fait un cercle vicieux: d'un côté, il leur serait difficile de contrôler les multitudes de pensées qui se bousculent dans leur cerveau; de l'autre, ces réflexions, souvent négatives, tourneraient continuellement en rond. Impossible alors de se soustraire à cette spirale d'idées noires.
«Ces résultats d'imagerie cérébrale fournissent une explication scientifique des raisons pour lesquelles les patients atteints de troubles de l'humeur et d'anxiété semblent être “bloqués” sur des états d'humeur négatifs», expose la docteure Sophia Frangou, autrice principale de l'étude et professeure de psychiatrie à la faculté de médecine Icahn du Mount Sinai Hospital de New York.
Cette enquête a notamment été financée par l'Institut national de la santé mentale des États-Unis, pays où un adulte sur cinq, soit environ 50 millions de personnes, déclare avoir subi l'un de ces troubles au cours de l'année écoulée.
En France, une enquête de la Haute autorité de santé datant de 2014 estime entre 650.000 et 1,6 million le nombre de personnes concernées par des troubles bipolaires.
Bien que cette étude soit un pas de plus dans la compréhension et l'évaluation de ces troubles, de nombreuses questions demeurent. Quelles sont les causes de ces «blocages»? Ces anomalies cérébrales existent-elles depuis toujours ou sont-elles la conséquence d'autres facteurs?
Les scientifiques précisent que leur travail de recherche exclue l'imagerie cérébrale d'enfants et d'adultes plus âgé·es. Il est donc à ce jour impossible de savoir comment leurs résultats s'appliqueraient à ces tranches d'âge.