France / Économie

Vers un fonds monétaire européen

Temps de lecture : 3 min

La création d'un tel fonds serait un moyen pour l'Europe de démontrer qu'elle peut vraiment se passer du FMI et régler elle-même ses problèmes.

Bonne nouvelle: la Commission européenne commence à réagir à la crise grecque. Alors que cette dernière est parvenue à alléger la contrainte, puisqu'elle a pu lever 5 milliards le 4 mars sans trop de difficultés (même si elle a dû pour cela payer le prix fort, 6,3%), alors que le Portugal à son tour présente son plan d'austérité, l'Union européenne réfléchit à un fonds monétaire européen calqué sur le Fonds monétaire international. Encore mieux: c'est le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, qui a évoqué ce projet dans une interview au FT Deutschland. La Commission devrait l'évoquer ce 9 mars de façon informelle lors de leur réunion du conseil.

«Pour résumer, la Commission se tient prête à proposer un tel instrument européen d'assistance qui nécessitera le soutien de tous les pays membres de la zone euro», a déclaré Amadeu Altafaj, porte-parole de la Commission, lors du point de presse du 8 mars. «Il y a clairement une détermination pour améliorer la gouvernance économique dans la zone euro», a-t-il ajouté.

La création d'un tel fonds serait un moyen pour l'Europe de démontrer qu'elle peut vraiment se passer du FMI et régler elle-même ses problèmes. C'est une solution qui plairait beaucoup à la France, qui ne cesse de plaider pour un renforcement de la gouvernance économique européenne. Comme l'a souligné Nicolas Sarkozy le 7 mars, après la visite du Premier ministre grec:

Si nous avons créé l'euro, ce n'est pas pour laisser tomber un pays de la zone euro. Sinon ce n'était pas la peine.

Mais il se trouve que rien dans les traités européens n'était jusqu'ici prévu en cas de crise.

A quelles conditions?

Selon Wolfgang Schäuble, ministre-clé de la coalition d'Angela Merkel, le «FME» devrait prévoir de fortes pénalités pour les pays qui ne se conformeraient aux règles européennes en termes de déficit budgétaire et de dette publique. Ils pourraient ainsi se voir refuser l'accès aux fonds de cohésion, qui financent une bonne partie de la mise à niveau des pays d'Europe du sud et de l'est. Ils pourraient même être temporairement privés de leur droit de vote lors des Conseil européens. Pire, ils pourraient être suspendus de l'eurozone tant que leurs finances publiques ne seraient pas en ordre. La honte... Le ministre allemand lie la création de ce fonds à des mesures parallèles pour limiter la spéculation, notamment en matière de CDS (Credit Default Swaps), ces assurances sur la dette publique des pays, qui ont récemment permis à des banques de jouer contre Athènes.

Le FME, quoi qu'il en soit, arrivera trop tard pour la Grèce, pour laquelle, si une opération de sauvetage doit être organisée, on devra improviser. Selon le porte-parole de la Commission, le fonds initialement prévu pour les pays de l'eurozone pourrait finalement concerner tous les Etats membres. Il reste à savoir si la création de ce fonds implique une révision des traités européens. On espère que non, après les difficultés rencontrées pour faire accepter le Traité de Lisbonne par les Vingt-sept...

Ce que le FME ne fera pas

La création de ce fonds apportera sans nul doute des garanties qui faciliteront la prévention et la résolution de crises au sein de l'Union. Elle ne devrait pas empêcher les Etats et la Commission de réfléchir aux modalités d'admission dans l'Union et a fortiori dans la zone euro, afin d'éviter que les petits arrangements statistiques passent inaperçus –ou restent sans conséquences. Ce n'est pas tout: un tel fonds, doté de règles draconiennes calquées sur les critères de Maastricht ne pourra empêcher les Etats de dépenser plus qu'ils ne récoltent lors de périodes de crise comme celle que le monde vient de vivre. Comment alors le FME devra-t-il réagir? Au-delà des codes, le pragmatisme pourra-t-il jouer? Car si ce fonds existait aujourd'hui, on peut imaginer que tous les «Pigs» (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne) seraient privés de fonds de cohésion et de leurs droits de vote aux Conseils européens. Et, demain ce pourrait être au tour de l'Italie, de la Grande-Bretagne, voire de la France...

Marie-Laure Cittanova

Photo de une: Francfort, le 4 octobre 2006. REUTERS/Kai Pfaffenbach

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