Ils sont nombreux, ces jours-ci, à s'enorgueillir d'avoir contribué à l'élection historique de Barack Obama. Plus nombreux qu'ailleurs, sans doute, à Hollywood, où l'on est volontiers démocrate, généreux de ses dollars et de son soutien public. De George Clooney à Eva Longoria Parker, de Will Smith à Tom Hanks, les stars n'ont pas ménagé leur soutien au charismatique sénateur de l'Illinois devenu le 44ème président des Etats-Unis. Mais il y a un comédien, moins célèbre, qui est convaincu d'avoir fait mieux. Non parce qu'il a signé un chèque de 2300 dollars pour la campagne du candidat Obama. Mais parce qu'il a incarné, de 2001 à 2006, le président de fiction le plus populaire de l'histoire de la télévision américaine. Un président profondément intègre, homme politique fiable, admirable en tous points, soucieux d'éviter les guerres inutiles dans la lutte contre le terrorisme et de protéger le peuple américain. Un président noir.
"Le rôle du président David Palmer a sans doute aidé à ouvrir les yeux des Américains", confiait récemment à CNN Dennis Haysbert, l'interprète du rôle, "il a touché toute sort d'Américains, des plus riches aux plus pauvres, de toutes couleurs et origines et de toutes confessions religieuses. Le personnage les a convaincu, et a prouvé qu'un président afro-américain, c'était possible". Quand "24 heures chrono" commence sur Fox Tv, quelques semaines après le 11 septembre 2001, le pays - vite rejoint par le reste du monde - s'enflamme pour cette série novatrice avec son dispositif original (chaque épisode se déroule en temps réel) et son thème incroyablement en phase avec l'actualité : la menace terroriste sur le territoire américain. Le héros, Jack Bauer (Kiefer Sutherland), est l'agent secret dont l'Amérique rêve : prêt à tout sacrifier - vie personnelle et principes moraux - pour assurer la sécurité nationale. Jack a la gâchette facile, et recourt volontiers à la torture, mais le président Palmer - simple candidat dans la première saison, élu dès la seconde - résiste quant à lui à la tentation de la violence. Rayonnant de sagesse et d'intelligence, d'un calme surnaturel, David Palmer n'a qu'un défaut : celui d'être si profondément bon qu'il ne voit pas la méchanceté d'autrui et risque parfois de se laisser manipuler...
Aussi l'on ne s'étonne guère qu'un sondage de USA Today ait placé Palmer en tête des présidents de fiction préférés des Américains, avant Martin Sheen, Harrison Ford ou Michael Douglas, tous ces Blancs d'un certain âge titulaires du rôle sur petit et grand écran. Et ce dès 2005, bien avant que Barack Obama ne devienne un candidat crédible. "J'ai tout de même été très étonné de dépasser Martin Sheen", avoue Haysbert, "j'imagine que je suis un meilleur président de crise". Un président de crise... n'est-ce pas là, précisément, ce qu'est Barack Obama? Il y a du reste une certaine logique à ce que le premier président afro-américain de l'histoire soit perçu comme le sauveur de l'Amérique et arrive auréolé d'un prestige sans équivalent dans l'histoire récente. Car depuis plus de dix ans, l'acteur qui - d'Independence Day à Je suis une légende - sauve le monde sur grand écran, ce n'est plus Tom Cruise ni même Bruce Willis. C'est Will Smith.