S'il arrive qu'on en fasse un chef-d'œuvre de musique, comme dans l'incroyable scène d'hôpital du film Sound of Noise, les bip, zip, clac, blop et autres désagréables bruits d'hôpitaux n'ont généralement rien d'une symphonie.
Il semblerait que l'ouïe soit le dernier sens à s'éteindre, à notre mort. Ces bruits-là sont-ils les ultimes sons que nous aimerions entendre? C'est la question que pose Yoko Sen, musicienne japonnaise interviewée par The Atlantic.
Patientèle en mauvaise santé, personnel stressé
Nous connaissons par cœur le paysage sonore de l'hôpital. Alarmes, bips, pleurs, portes, éclats de voix, roulement des charriots. Au XIXe siècle, Florence Nightingale, célèbre infirmière britannique, parlait déjà des bruits d'hôpitaux comme de «sons nécessaires» pour surveiller la santé des patient·es, mais qui seraient à l'origine d'un «sentiment d'attente, d'une angoisse», qui vont à l'encontre de la guérison. «Le bruit non nécessaire, c'est le grand absent du monde médical», concluait-elle.
En se basant sur une étude de 2018, Yoko Sen explique qu'un·e patient·e empêché·e de dormir, et avec une perception exagérée de sa propre douleur –basée sur les bips de ses machines plutôt que sur son propre ressenti– voit les bruits influencer son état de santé. Une autre recherche suggère que «la lassitude des alarmes» pourrait aussi affecter le personnel de santé, plus stressé, moins à l'écoute.
Le bruit provoque du stress, et le stress provoque du bruit. Nous claquons des portes, déplaçons brutalement des objets. Pourtant, au regard des progrès technologiques dans la médecine, il serait grand temps de se pencher sur ce problème fondamental.
Repenser le paysage sonore
Quand bien même le bip semble essentiel à tout bon épisode de Grey's Anatomy, on peut améliorer sans peine la qualité de l'environnement sonore des hôpitaux. Pour commencer, il suffit de rappeler que sur les 350 alarmes que nous entendons tous les jours, 99% ne sont pas nécessaires.
Yoko Sen, elle, a déjà entamé son combat contre les bips. Au Sibley Memorial Hospital de Washington, elle a installé une «tranquility room», avec les indispensables musiques plannantes et lumières tamisées, pour trancher avec la froide austérité des longs couloirs. Effet garanti sur le moral du personnel soignant et des malades.