Depuis plus de 35 ans, les hommes bisexuels et homosexuels sont discriminés lorsqu'ils veulent donner leur sang aux États-Unis. Entre 1983 et 2015, ils ne pouvaient simplement pas le faire; depuis, ils y sont autorisés, à condition de ne pas avoir eu de relation sexuelle avec un homme au cours des douze derniers mois -contre quatre mois pour un homme ayant eu des relations hétérosexuelles avec des partenaires mutliples. Une règle qui ne s'applique donc pas aux hommes hétérosexuels, ni même aux femmes homosexuelles.
Décriée depuis de nombreuses années, cette discrimination pourrait être discutée lors de la prochaine campagne présidentielle. En effet, le journal britannique The Independent a interrogé les principaux candidats démocrates pour 2020, et 7 d'entre eux ont affirmé vouloir abolir cette règle discriminatoire.
Une règle qui n'a «rien de scientifique»
Parmi eux, Beto O'Rourke, dont l'un des porte-parole a assuré que cette mesure n'avait «rien de scientifique, ni même de médical», et qu'elle était «uniquement liée à une stigmatisation dépassée de la communauté LGBT [...] Nos politiques de don du sang devraient être fondées sur des preuves médicales du 21e siècle, et non sur des biais désuets selon lesquels certaines populations présenteraient des risques plus élevés de transmission du VIH. Ces politiques ne servent personne, et ne font que limiter l'accès au don du sang, qui pourtant sauve des vies.»
C'est la première fois que cette question provoque autant d'engouement lors d'une campagne présidentielle, estime William McColl, directeur de la politique de santé du groupe AIDs United. «Je pense que ça montre que nous avons fait de gros progrès en très peu de temps, se réjouit-il, ces discussions n'auraient pas eu lieu il y a à peine 10 ans, c'est certain.» Cependant, pour le groupe de défense des droits LGBT Human Rights Campaign, les résultats scientifiques doivent primer sur les débats politiques: «Évidemment, le fait que des membres du Congrès, des candidats, et d'autres personnes dénoncent cette interdiction, est d'une grande aide, reconnaît l'un des responsables, David Stacy, mais la science est de notre côté. Il est important que le don du sang soit sûr, et il peut l'être sans que certaines personnes ne soient stigmatisées.»
Et en France?
Si la question est remise sur la table aux États-Unis, elle l'est aussi régulièrement en France, qui applique les mêmes règles que ses voisins outre-Atlantique. En octobre 2018, les défenseurs des droits des gays avaient eu l'espoir de voir évoluer la loi, grâce à un amendement levant les conditions particulièrement restrictives du don du sang pour les homosexuels. Mais la disposition a finalement été rejetée par les députés. Un mois plus tard, une enquête de Santé Publique France montrait pourtant que «l’ouverture du don de sang en juillet 2016 aux hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) n’augmente pas le risque de transmission du VIH par transfusion». Faudra-t-il attendre les élections présidentielles de 2022 pour que la question soit de nouveau abordée dans notre pays?