On estime aujourd'hui qu'un enfant sur cinq souffre de troubles mentaux, avec la dépression et l'anxiété parmi les problèmes les plus courants et pouvant se manifester dès l'âge de 4 ans. À l'heure actuelle, les critères diagnostiques standards se fondent sur un entretien mené par un·e clinicien·ne en présence d'un parent ou faisant fonction. Une procédure qui a ses limites car ces troubles émotionnels peuvent être facilement méconnus par l'entourage ou l'enfant lui-même lorsque ses facultés d'expression ne sont pas assez développées pour décrire une souffrance bien souvent abstraite.
Le souci, c'est que cet angle mort psychopathologique peut se révéler très délétère pour le développement de l'enfant et des troubles émotionnels précoces sont ainsi corrélés à un risque accru de problèmes de santé physiologique ou mentale plus tard dans la vie. À l'inverse, s'occuper au plus tôt de ces troubles, soit à un âge où la plasticité du cerveau est la meilleure, augmente considérablement les chances d'atténuation des symptômes voire de guérison.
Raison pour laquelle l'algorithme d'apprentissage automatique développé par l'équipe de recherche d'Ellen McGinnis, psychologue clinicienne affiliée à l'université du Vermont, tombe à point nommé. Selon les scientifiques, l'intelligence artificielle (IA) est capable de détecter des troubles dépressifs et/ou anxieux chez les enfants en les écoutant parler pendant trois minutes avec un taux de réussite supérieur à la procédure standard et ses entretiens durant entre 60 et 90 minutes. Autre avantage, cette aide au diagnostic est envisageable dès 3 ans, là où les techniques conventionnelles sont difficiles à mettre en œuvre avant 8 ans.
Idem chez les adultes
En particulier, l'algorithme a pu identifier huit caractéristiques audio préoccupantes, dont trois sont hautement significatives en termes de diagnostic de troubles émotionnels: une voix plus grave, des formulations et des inflexions répétitives ainsi qu'une réaction à la surprise se manifestant par des sons très aigus. Ellen McGinnis souligne que ces éléments sont aussi présents chez les adultes dépressifs et/ou anxieux.
Selon la scientifique, l'étape suivante serait de pouvoir inclure cet algorithme d'analyse de la parole dans un outil diagnostique universel à destination des soignants et, pourquoi pas, dans une application pour smartphone capable d'enregistrer les enfants et d'analyser immédiatement leurs patterns vocaux et langagiers. L'idéal serait d'identifier les enfants les plus à risque avant même que leur entourage ait flairé un problème.