Être entouré·e de beauté rend-il heureux·se? Si répondre à la question pourrait sembler intuitivement évident («il te dira voui!»), la science a mis un paquet de temps à pouvoir le faire de manière satisfaisante. En cause, deux petits écueils de rien du tout: le manque de données sur, d'un côté, les valeurs esthétiques de tout un chacun et, de l'autre, ce que les gens entendent lorsqu'ils se disent heureux.
Grâce à une équipe de recherche notamment affiliée au Data Science Lab de l'Université de Warwick (Royaume-Uni), il est désormais possible d'estimer l'association scientifiquement prouvée et de dissiper au passage une idée reçue: la chlorophylle n'est pas la seule à susciter le bien-être mental, un environnement pouvant être jugé beau et générer du bonheur s'il a été intégralement façonné de main humaine.
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Pour ce faire, les scientifiques dirigé·es par Chanuki Seresinhe ont rassemblé un million d'évaluations issues d'un jeu spécialement conçu pour l'occasion dans lequel les internautes devaient noter de 1 à 10 le charme de différentes photos prises aux quatre coins du Royaume-Uni. Puis ils ont combiné ces données à celles d'une application –là aussi créée pour l'étude– où plus de 15.000 personnes allaient consigner leur degré de bonheur plusieurs fois par jour pendant trois ans. Cette application leur demandait aussi de préciser leur localisation, s'il y avait d'autres êtres humains autour d'elles et ce qu'elles faisaient à ce moment-là.
Beauté et attention
Il en ressort, comme le résume Seresinhe, que «les gens sont effectivement plus heureux dans les environnements les plus pittoresques, même lorsqu'on contrôle un certain nombre de variables comme la météo ou l'activité de la personne». En outre, l'analyse prenait en compte le revenu par habitant de la zone concernée, parce que si la misère est moins pénible au soleil, on se sent aussi généralement plus heureux les poches pleines. Là encore, l'effet de la beauté d'un lieu sur le bien-être demeure qu'importe la richesse financière environnante.
À la grande surprise de Seresinhe et de ses collègues, les endroits bourrés de nature et de verdure ne sont pas les seuls à mettre de bonne humeur. «Les zones bâties, avec des ponts ou des immeubles de caractère, ont également un lien positif avec le bonheur.» Un effet indépendant de la quantité d'espaces verts présents. Et selon la chercheuse, cette étude pourrait permettre de prendre de meilleures décisions «dans la conception de nos villes et quartiers urbains, qui affectent la vie quotidienne des individus».
Artificiels ou naturels, quel est le point commun de tous les endroits beaux? D'après Seresinhe, le secret est à chercher du côté de leur charge cognitive –moins un endroit éparpillera notre attention, plus il nous semblera esthétiquement agréable et aura un impact positif sur notre psyché. Et là est le biais caché qui nous fait spontanément assimiler beauté, bien-être et nature. «De jolies rues avec une vue dégagée et peu de distractions peuvent également être revigorantes. Un environnement beau capte notre attention plus longtemps, ce qui permet de bloquer l'intrusion de pensées négatives.»