Naz Shah, parlementaire travailliste anglaise chargée par son parti du sujet des droits des femmes, a demandé au gouvernement de surveiller ce qu'elle estime être un dévoiement des «dépistages prénatax non-invasif» (DPNI) et de prendre des mesures pour mieux les contrôler.
Selon elle, ces tests, qui permettent par exemple de détecter une trisomie 21 chez un foetus, seraient utilisés pour déterminer le genre de son futur enfant et avorter en conséquence, Shah relevant une «préférence culturelle» pour les garçons chez certaines minorités ethniques au Royaume-Uni qui «force [les femmes] à utiliser des DPNI pour satisfaire leur famille».
Pas de preuve crédible
Pourtant, ses observations ne semblent s’appuyer sur aucune preuve tangible. La BBC et The Independant parlent bien d'un forum en ligne où la question est évoquée, mais ne citent aucune étude chiffrée. Le Guardian relaie quant à lui un rapport du Nuffield Council on Bioethics, une organisation de bioéthique, qui s'alarme d'«une vraie possibilité que les DPNI puissent encourager des avortements basés sur le sexe». Beaucoup de conditionnel donc, mais pas de preuves.
Dans leurs articles, The Independent et la BBC font intervenir Rani Bilkhu, la fondatrice de Jeena International, une ONG qui a pour but de «questionner les cultures, traditions et idéologies religieuses» qui feraient du tort aux femmes. Celle-ci admet dans l’article de la BBC que «l’ampleur du problème est extrêmement difficile à mesurer».
Rani Bilku est aussi la porte-parole de «Stop Gendercide», un site internet dédié à la lutte contre le «gendercide», contraction de genre et de génocide. Un terme qui paraît extrêmement fort pour un phénomène si difficile à mesurer dans le cas des tests prénataux.
Confusionnisme
Le concept de «gendercide» désigne en fait des féminicides et des avortements sélectifs de grande échelle, et est plutôt employé pour décrire des situations en cours dans des pays comme l’Inde et la Chine. Une rapide recherche sur le hashtag #gendercide permet vite d'identifier que la plupart des tweets sur le sujet proviennent de comptes anti-avortement. Live Action par exemple compte «pro-life» aux 70.000 followers, l’utilise régulièrement.
Spécialistes du confusionnisme, celles et ceux qui se prétendent «pro-life» ont pour habitude de parer leur combat des atours de la lutte pour les droits des femmes. En France, le mot «gendercide» n’est pas utilisé. Par contre, son équivalent «avortement sélectif» est employé par des organisations qui luttent contre le droit à l’IVG, comme Alliance Vita ou la fondation Lejeune. Avec toujours pour objectif d'entretenir la confusion en se faisant passer pour des féministes.