Aux États-Unis, le sénateur Joe Manchin est une anomalie: un Démocrate élu depuis 2010 pour représenter la Virginie-Occidentale, un État qui a voté Trump à 68%. Si Manchin est parvenu à séduire la population de ce territoire marqué par la crise de l'industrie du charbon, c'est en votant presque comme un Républicain: contre les régulations environnementales, contre l'avortement et contre le contrôle des armes à feu.
Pour faire un peu oublier qu'il est Démocrate (il a voté contre la réforme fiscale de Trump) Manchin aime se montrer avec un fusil. Dans sa pub de campagne de 2012, il était filmé en train de tirer sur un projet de loi visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. La formule avait marché et il a recyclé cette mise en scène en vue des élections de novembre 2018. Cette fois, il prend son fusil pour défendre l'Obamacare, la réforme de santé mise en place par Barack Obama.
Dans la vidéo, il est filmé en train de tirer sur un texte représentant le procès fait par certains Républicains contre l'Obamacare.
Ce message pro-Obamacare dans un État Républicain est paradoxalement populaire. En effet, si l'électorat de Virignie-Occidentale adore Donald Trump, il adore aussi la réforme de santé d'Obama, que Trump a pourtant promis de démanteler. Et si le rival de Manchin, Patrick Morrisey, est soutenu par Trump, c'est pourtant Manchin qui demeure en tête, en partie grâce à son soutien envers l'Obamacare.
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Un article récent du New York Times soulignait ces contradictions politiques à l'oeuvre en Virginie-Occidentale. Si l'État a voté en majorité pour Trump (et pour Mitt Romney en 2012), il s'agit d'une des régions qui a le plus bénéficié de la politique de santé d'Obama. Avant le passage de l'Obamacare, 21% de la population de Virginie-Occidentale n'avait pas d'assurance maladie, contre 9% en 2015.
Pourtant, Manchin est obligé de défendre la loi Obamacare sans la nommer (il parle plutôt de son rival qui veut faire payer plus aux personnes atteintes de maladies). En effet, comme le système est complexe, de nombreux habitants et habitantes ne savent pas qu'ils et elles bénéficient de la politique mise en place par Obama. Tout en appréciant la «carte médicale» reçue, ils et elles continuent d'être anti-Obama. Manchin sait donc que sa position est délicate: il se présente comme défenseur de l'assurance santé mais ne veut pas non plus être trop associé à Obama, un nom peu populaire dans la région.