À côté de publicités pour la greffe de cheveux, des voitures de luxe et des gâteaux danois, la «pensée Xi Jinping» s'étale abondamment et comme naturellement sur les murs des villes chinoises.
Entrée dans la constitution du parti communiste en octobre 2017 –au même titre que la «pensée Mao Zedong»–, elle fait aussi bien partie du paysage idéologique que du paysage urbain chinois, largement promue à coups d'affiches de propagande. À tel point, raconte le New York Times, qu'on plaisante désormais sur le fait d'indiquer les affiches du Parti plutôt que le nom des rues pour donner une direction.
Le rêve chinois
«Le peuple a la foi» et il participe à la construction du «rêve chinois», «uni par un seul cœur»: du moins, c'est ce qu'il est invité à lire quotidiennement, alors que le gouvernement travaille à l'avènement d'une nouvelle ère de prospérité et de modernité.
«Les panneaux d'affichage soulignent l'importance de prendre soin de ses parents et d'être loyal envers ses supérieurs. Les bannières exhortent les gens à se souvenir du dessein originel de la révolution communiste», décrit le New York Times, avant d'en donner quelques exemples.
Sur les murs des immeubles, des maisons, dans les ruelles des hutongs, les métros ou les centres commerciaux, et jusqu'aux tableaux de bord de certaines voitures, on retrouve des maximes édifiantes ou une iconographie de la glorieuse nation.
Sur l'une des affiches, on peut lire le slogan «Le chemin vers le rêve est sous vos pieds»: du Mai-68 à la sauce institutionnelle. Sur une autre, «Beaucoup de gens, unis par un seul cœur. Allez de l'avant. Poussez le socialisme avec les caractéristiques chinoises vers une ère nouvelle».
La promotion de cette spécificité chinoise apparaît en creux comme un avertissement fait aux minorités ethniques et culturelles du pays:
«Le gouvernement dit qu'il élimine le séparatisme, mais des militants disent que M. Xi mène une campagne pour saper la culture minoritaire et promouvoir la domination de l'ethnie des Hans et du parti communiste, qui est officiellement athée. [...] L'image, qui montre des gens venant de tribus ethniques différentes, réitère la proposition du parti selon laquelle les plus de cinquante ethnies de la Chine sont “unies par un seul cœur”. C'est un avertissement pour tout groupe dans une région lointaine qui pourrait envisager de contester la politique de M. Xi», détaille le New York Times.
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Le communisme au cœur des foyers
La grande révolution culturelle prolétarienne lancée par Mao Zedong à la fin des années 1960, qui entendait s'appuyer sur la jeunesse du pays, s'était placée au cœur des foyers, où l'on accrochait le portrait du Grand Timonier.
Il n'est de même pas loin le temps où les icônes chrétiennes étaient remplacées par des portraits de Xi Jinping: de fait, c'était en novembre dernier, dans la province de Jiangxi. Alors que les membres du Part communiste chinois intervenaient dans les maisons à renforts d'affiches patriotes, on retrouve dans les rues des bannières présentant une femme cousant un drapeau communiste, titrées: «Le coeur tourné vers la patrie».
De la figure du chef providentiel inscrite dans une iconographie historique d'hommage aux grands leaders de la révolution aux représentations symboliques d'une unité nationale sur fond de drapeau rouge, le «socialisme avec des caractéristiques chinoises» s'impose comme environnement quotidien du 1,3 milliard d'habitants du pays.
Tandis que Xi Jinping appelle de ses vœux «le grand rajeunissement de la nation chinoise» et une approche de l'intérêt public «centrée sur le peuple», l'urbanisme chinois achève de rappeler que la «nouvelle ère» sera communiste ou ne sera pas.