En octobre 2008, Henry Konczak a fait des analyses sanguines. «J’avais le souffle court, explique ce musicien et producteur vidéo de 65 ans originaire de l’Ohio, aux États-Unis. Et tout à coup, on m’a dit d’aller immédiatement à l’hôpital.»
Les médecins lui avaient diagnostiqué une infection sanguine, contre laquelle on lui a injecté des antibiotiques en intraveineuse pendant un mois. Mais le sort s’est acharné contre Henry… Un médecin a en effet découvert qu’il avait un souffle au cœur nécessitant une opération chirurgicale pour remplacer sa valve mitrale. Il a alors appelé la Cleveland Clinic, située à proximité, pour savoir combien cette opération lui coûterait. Le devis faramineux qu’il a reçu en retour s’élevait à 130.000$ [près de 110.000€, ndlr] et ne comprenait pas les honoraires du chirurgien.
Henry Konczak explique que son assurance avait soudainement mis fin à son contrat lorsqu’il a eu 50 ans et qu’il ne pouvait pas se permettre d’en souscrire un nouveau. Il a donc été abasourdi par le prix annoncé.
«Je leur ai dit que j’allais leur envoyer des justificatifs de ma situation financière, pour leur montrer que je n’avais pas les moyens de payer ce montant, se rappelle-t-il. La standardiste m’a répondu: “Eh bien, bonne chance”.»
L'Inde, un choix particulièrement attrayant pour les patients
Ayant pour seules perspectives le surendettement ou la mort, Henry a trouvé une troisième option: l’Inde. Le 23 décembre 2008, il a ainsi subi une opération à l’hôpital Indraprastha Apollo, un établissement privé de premier plan à New Delhi. Montant total: 10.000$ [moins de 8.400€, ndlr] pour les vols, l’hébergement pendant trois semaines et les frais médicaux. «J’ai sauvé ma vie et mes économies», explique-t-il.
L’histoire d’Henry Konczak, bien que peu orthodoxe, est loin d’être un cas isolé. Alors que les Américains peinent à payer leurs soins de santé, le tourisme médical est une option qui les séduit de plus en plus. S’il est difficile d’estimer le nombre de touristes médicaux américains, une étude gouvernementale considère que chaque année, plus de 300.000 résidents des États-Unis iraient à l’étranger pour des soins de santé. Les causes de ce phénomène sont multiples, mais la principale est l’argent.
L’Inde est un choix particulièrement attrayant pour les patients américains: de nombreux hôpitaux proposent des soins de qualité, en anglais et à un prix abordable. Vinayak Shourie, responsable du marketing international à Fortis Healthcare, estime que 20% de l’activité de son entreprise provient de l’étranger, et ce chiffre continue de grimper.
En juin 2005, l’Inde a mis en place des visas médicaux afin de promouvoir le secteur, et elle a récemment commencé à autoriser les ressortissants de près de 150 pays à s’inscrire entièrement en ligne. En 2016, le ministère du Tourisme a délivré plus de 170.000 visas médicaux, soit 45% de plus que l’année précédente. Le tourisme médical est aujourd’hui une source de revenus considérable pour le pays et son activité est florissante.
L’un des systèmes de santé les plus inégalitaires au monde
Mais l’Inde a aussi l’un des systèmes de santé les plus inégalitaires au monde. L’écart entre les services proposés aux plus riches et ceux dont peuvent bénéficier les plus pauvres est sidérant, et environ 86% de la population rurale est privée d’assurance maladie.
«Si vous avez beaucoup d’argent, vous avez accès à beaucoup de services de santé, explique George Thomas, chirurgien orthopédiste de Chennai, en Inde. Dans le même temps, un nombre incroyable d’Indiens n’a même pas accès à des soins de santé élémentaires.»
Le tourisme médical peut être bénéfique comme il peut être dévastateur.
À cet égard, le tourisme médical peut être bénéfique comme il peut être dévastateur. Dans le meilleur des cas, cette pratique pourrait contribuer au développement du système de santé indien, par le biais d’une redistribution des recettes générées par les patients étrangers en faveur des soins dans les zones rurales. Dans le pire des cas, les ressources seraient allouées aux hôpitaux privés accueillant les élites au détriment des institutions publiques soignant les plus défavorisés.
«Quel effet cela a-t-il sur les soins pour les Indiens? À vrai dire, c’est difficile d’y voir clair, estime Glenn Cohen, enseignant à Harvard et expert en tourisme médical. Mais il y a de quoi s’inquiéter.»
Des hôpitaux publics surchargés et déficients
J’ai prêté mon visage à des publicités vantant la qualité des meilleurs établissements de santé indiens. Un mois après mon installation à New Delhi, j’ai eu des vertiges alors que je rentrais de mon cours d’hindi. En arrivant chez moi, j’ai fait une crise d’épilepsie et mon colocataire m’a emmené au plus vite aux urgences les plus proches.
Après ma sortie, sur les conseils d’un ami, je suis allé voir un neurologue de l’hôpital Max Super Specialty, un établissement privé très réputé. Je suis resté hospitalisé pendant trois jours et on m’a fait une batterie de tests qui n’ont fait apparaître aucune affection grave. J’ai passé un séjour agréable dans une chambre individuelle digne d’un hôtel, avec les repas et le Wi-Fi gratuits. Le montant de l’hospitalisation était de 2.892$ [environ 2.400€, ndlr] avant assurance.
Ce montant n’est rien comparé aux 25.000$ [environ 21.000€, ndlr] que j’aurais eu à débourser aux États-Unis. Pourtant, le salaire annuel moyen est seulement d'environ 1.600$ [environ 1.300€, ndlr] en Inde; pour certains Indiens, mes dépenses médicales représentent plus d’une année de salaire. Et cela reste vrai si l’on retire du calcul les 250$ [environ 210€, ndlr] que l’hôpital facture aux patients étrangers. En bout de course, mon assurance m’a remboursé la majorité de mes dépenses, mais la plupart des Indiens n’ont, eux, aucune assurance médicale.
Bien entendu, l’hôpital indien moyen applique des tarifs bien inférieurs à ceux pratiqués par les établissements de premier plan fréquentés par les riches Indiens et les touristes médicaux. Les administrations centrale et étatiques du pays, qui gèrent les réseaux d’hôpitaux, ont mis en place divers programmes destinés à exonérer les Indiens les plus pauvres des frais médicaux dans les établissements publics.
Il n’est pas surprenant que les Indiens préfèrent se tourner vers les établissements privés.
Les hôpitaux publics sont surchargés et déficients, ce qui conduit à des fautes médicales. Ainsi, un établissement public d’Uttar Pradesh, l’État le plus peuplé d’Inde, a récemment fait la une des journaux internationaux après le décès de 63 personnes en deux jours, liés à une pénurie d'oxygène.
Il n’est donc pas surprenant que les Indiens préfèrent se tourner vers les établissements privés. Un rapport gouvernemental de 2016 a permis de montrer que les hôpitaux publics du pays traitaient moins de 30% des maladies dans le pays. La préférence pour le secteur privé est particulièrement marquée dans les villes, où se concentrent la plupart des établissements de haute qualité en Inde. Entre 2004 et 2014, la part des hospitalisations dans le privé en ville a augmenté d’environ 6%. Mais le système de santé privé est plus cher et, sur la même période, le montant moyen d’un séjour à l’hôpital a augmenté d’à peu près 176%.
Le tourisme médical, plaie ou solution?
Pour les partisans du tourisme médical, la promesse est la suivante: «Mon expérience (et la somme que je paye) peut ouvrir la voie, être reproduite et, à terme, être proposée aux Indiens les moins aisés».
Certains, par exemple, estiment que le tourisme médical incite les médecins indiens à retourner dans leur pays, ce qui correspondrait à un «retour des cerveaux». D’autres pensent que cette pratique améliore les services dans tout le pays. La vice-présidente d’Apollo Hospitals, Preetha Reddy, a récemment écrit que le tourisme médical «contribue à l’objectif de santé pour tous».
Josef Woodman, PDG de Patients Beyond Borders, indique que le tourisme médical pousse les hôpitaux à obtenir une accréditation internationale. «Lorsqu’une commission JCI [Joint Commission International] impose certaines règles à l’hôpital qu’elle examine, cela crée une référence pour le reste du système de santé», ajoute-t-il.
«[Le tourisme médical] peut être avantageux si ses recettes bénéficient non seulement aux établissements privés qui les génèrent, mais aussi au secteur public.»
De nombreux chercheurs sont néanmoins sceptiques quant à la capacité du tourisme médical à améliorer la situation dans son ensemble. Valorie Crooks, géographe de la santé à l’Université Simon Fraser, explique que les potentielles retombées positives du tourisme médical étaient des promesses en l’air.
Valorie Crooks refuse de dire si elle pense que le tourisme médical est bon ou mauvais. Mais elle est convaincue que pour qu’il soit avantageux pour la population du pays de destination, une redistribution bien appliquée est nécessaire. «[Le tourisme médical] peut être avantageux si ses recettes bénéficient non seulement aux établissements privés qui les génèrent, mais aussi au secteur public», précise-t-elle.
Deepanshu Mohan, professeur à la Jindal School of International Affairs et chercheur dans le domaine de la santé en Inde, va dans le même sens: «Il faut réfléchir à la façon de redistribuer les revenus du secteur privé».
Le chercheur explique qu’après l’ouverture de l’économie indienne au début des années 1990, la dépense a considérablement augmenté dans le secteur de santé privé, tandis qu’elle a stagné dans le secteur public. Selon lui, cela a créé un écart stupéfiant entre les hôpitaux privés et les établissements publics du pays.
Fracture territoriale
Pour comprendre ce point de vue, je me suis rendu dans le All India Institute of Medical Sciences (AIIMS), le meilleur hôpital public de New Delhi. Construit en 1956, le campus de l’AIIMS est un ensemble de bâtiments marron, blancs et verts remplis de médecins, d’infirmières et d’étudiants en médecine. Des centaines de patients et leurs familles attendent leurs soins dans les jardins et chemins alentour. Nombre d’entre eux ont parcouru des centaines de kilomètres dans l’espoir de recevoir des soins abordables et de qualité.
Certains ont de la chance d’avoir ne serait-ce que réussi à arriver jusqu’à l’AIIMS. En effet, les services médicaux indiens sont bien plus fracturés qu’aux États-Unis ou en Europe, en particulier en dehors des villes. Cela explique que de nombreux résidents des régions rurales ne savent même pas qu’il existe des systèmes d’ambulance, et que les personnes ayant besoin de soins sont obligées d’attendre longtemps et de parcourir de longues distances pour consulter un médecin. Il n’est donc pas étonnant que les victimes indiennes de traumatismes risquent deux fois plus de mourir que les victimes de traumatismes résidant dans des pays riches.
Près de 80% des médecins indiens travaillent en ville, si bien que seuls 28% des habitants du pays peuvent les consulter.
Parmi les personnes regroupées à l’extérieur de l’AIIMS se trouve Vishnu Dayal, un agriculteur de 32 ans arrivé à l’hôpital il y a deux jours avec sa mère, qui souffrait de calculs biliaires –une maladie douloureuse nécessitant souvent une intervention chirurgicale. Vishnu est originaire de Pilibhit, un district situé à environ 250 kilomètres de New Delhi.
«L’hôpital de notre district est très mauvais», raconte-t-il pour expliquer pourquoi ils ont choisi de faire huit heures de bus plutôt que d’aller dans un établissement local. Sa critique est très symptomatique des défauts structurels du système de santé indien.
Selon l’Organisation des fabricants pharmaceutiques d’Inde, près de 80% des médecins indiens travaillent en ville, si bien que seuls 28% des habitants du pays peuvent les consulter. Sans compter que la plupart de ceux qui exercent en dehors des villes sont malheureusement non qualifiés: un rapport de l’Organisation mondiale de la santé publié en 2016 a révélé que seules 18,8% des personnes pratiquant la médecine dans les zones rurales d’Inde avaient des diplômes médicaux.
Faibles investissements du gouvernement dans la santé
Comme beaucoup des autres patients et accompagnants répartis sur tout le site, Vishnu dormait à l'extérieur de l'hôpital. Il passait une grande partie de sa journée assis sur un matelas de fortune près des bâtiments centraux puis, à 20h, lorsque le terrain de l’AIIMS fermait aux personnes non soignées à l’hôpital, il rassemblait ses affaires pour aller dormir dans une rue voisine.
Malgré tout, Vishnu se disait «santusht» («satisfait») de son expérience. Et il y avait de quoi: sa mère a pu être admise à l’hôpital dès le lendemain de son arrivée, ce qui est relativement court par rapport aux mois que certains patients doivent attendre avant d’entamer un traitement, même lorsqu’ils souffrent d’affections potentiellement mortelles. De plus, les médecins de l’AIIMS sont très réputés. Bien sûr, l’écart est grand entre l’AIIMS et les meilleurs établissements privés indiens offrant une expérience cinq étoiles. Mais il est encore plus criant entre l’hôpital public phare du pays et ses équivalents ruraux désolés.
Selon Deepanshu Mohan, «cela en dit long sur la qualité des ressources médicales dans le district dont il est originaire»; «la demande de services médicaux dans les villes prolifère en raison de la migration de nombreux patients des zones rurales.»
La plupart de ces problèmes sont liés aux faibles investissements du gouvernement dans la santé. En 2014, les dépenses dans la santé publique représentaient environ 1,4% du PIB indien –plaçant l’Inde à la 15e plus mauvaise place du monde–, tandis que les dépenses dans la santé privée étaient de 3,3% du PIB, soit plus de deux fois plus.
«Sans mécanisme de redistribution efficace […], les médecins formés en Inde risquent de plus en plus de délaisser le système public au profit du système privé.»
Le manque de financement est flagrant. De nombreux hôpitaux publics, en particulier en dehors des grandes métropoles, manquent d’appareils indispensables –tels que des respirateurs artificiels–, ce qui conduit à des décès évitables. Les zones rurales dépendent plus des établissements publics que les villes et sont donc les premières touchées par l’absence de ressources publiques.
Cette pénurie concerne également les médecins. Le pays ne compte qu’un médecin du public pour 10.189 résidents, et ces praticiens travaillent plus tout en étant payés moins que leurs confrères du secteur privé. En conséquence, la plupart des médecins tentent de se faire recruter par les lucratifs hôpitaux privés des grandes villes.
Certains États essaient de rendre obligatoire un service médical rural pour les jeunes diplômés des écoles publiques. Mais les étudiants sont très opposés à cette mesure, d’autant plus difficile à faire appliquer que les médecins du public exercent souvent en parallèle dans des cabinets privés, qui leur prennent du temps mais où ils sont mieux rémunérés.
«Sans mécanisme de redistribution efficace […], les médecins formés en Inde risquent de plus en plus de délaisser le système public au profit du système privé, ajoute Deepanshu Mohan. Le tourisme médical risque d’amplifier ce phénomène.»
Des hôpitaux privés qui font fi de leurs obligations
Le soutien du gouvernement aux hôpitaux privés qui acceptent les patients étrangers est également préoccupant. Le gouvernement indien apporte effectivement une aide financière à ces institutions dans le cadre du «Marketing Development Assistance Scheme».
Aujourd’hui, pas moins de 43 hôpitaux privés de New Delhi jouissent de terrains publics à des prix extrêmement bas, dans le cadre d’un accord dont la seule contrainte pour les établissements privés est de réserver 10% des services d’hospitalisation et 25% des services ambulatoires aux personnes à faibles revenus, pour qui les soins doivent être gratuits.
Malheureusement, les hôpitaux privés font souvent fi de cette règle. L’an dernier, le gouvernement de New Delhi a infligé une amende d’environ 100 millions de dollars [83 millions d’euros, ndlr] à cinq des plus grands établissements de santé du pays, qui avaient failli à leur obligation de soigner des personnes pauvres.
«Les plus influents mettront la main à la poche et s’en sortiront. Ces exigences ne servent à rien.»
Max, l’hôpital où j’ai été soigné, était l’un d’eux. Ce n’était pas la première fois que le pouvoir judiciaire condamnait des établissements de santé privés pour non-respect des obligations gouvernementales. En 2009, déjà, la Haute Cour de Delhi avait condamné l’hôpital Indraprastha Apollo (où Henry a été soigné) à payer une amende pour avoir violé les conditions de son bail.
En théorie, le montant de ces amendes est suffisamment élevé pour dissuader les établissements de frauder (Max Healthcare a enregistré un chiffre d’affaires d’environ 400 millions de dollars [332 millions d’euros, ndlr] l’an dernier). Mais Rupa Chanda, économiste et experte en matière de santé à l’Indian Institute of Management Bangalore, explique qu’entre la lenteur de la justice et la corruption, les plus grands hôpitaux devraient trouver des moyens de ne pas payer l’intégralité de leurs amendes: «Les plus influents mettront la main à la poche et s’en sortiront. Ces exigences ne servent à rien.»
Un rapprochement inquiétant avec les États-Unis
Un système incomplet qui prive des millions de personnes de couverture maladie. D’immenses inégalités entre les zones urbaines et les zones rurales. Un gouvernement qui subventionne indirectement des établissements privés de haute qualité trop chers pour une grande partie de la population… Plus on regarde le système médical indien, plus il ressemble au système américain.
Même les histoires des populations les plus défavorisées de ces pays se recoupent. Henry et la mère de Vishnu ont certes été soignés dans des conditions radicalement différentes, mais tous deux ont fait des heures de trajets pour se rendre à New Delhi, parce que les hôpitaux près de chez eux ne pouvaient ou ne voulaient pas leur prodiguer les soins dont ils avaient besoin.
La comparaison pourrait être encore plus pertinente si les États-Unis n’avaient pas adopté l’Affordable Care Act [connu sous le nom d’Obamacare, ndlr], qui a permis à près de vingt millions d’Américains de bénéficier d’une assurance. Selon des experts comme Glenn Cohen, cette loi a déjà fait reculer le tourisme médical, car un plus grand nombre d’Américains bénéficient d’une assurance adaptée aux États-Unis.
Cependant, la récente réforme fiscale proposée par Donald Trump et adoptée par le Congrès a supprimé la pénalité jusqu’alors infligée aux contribuables refusant de s’assurer. Le Bureau du budget du Congrès américain estime que cela poussera 13 millions d’Américains à résilier leur couverture santé, ce qui fera repartir à la hausse le tourisme médical.
La situation d’Henry Konczak est un bon exemple de l’impact de l’Obamacare. Une fois rentré aux États-Unis après son opération, il a finalement réussi à acheter «un peu d’assurance», une mutuelle à 600$ [environ 500€, ndlr]. Ensuite, grâce à l’adoption de l’Obamacare, il a réussi à trouver une assurance moins chère et surtout plus protectrice, qui lui aurait permis de subir une opération de remplacement de la valve beaucoup plus près de chez lui: «Le montant mensuel de ma prime d’assurance a baissé de 130$ [environ 110€, ndlr]. J’en ai presque pleuré».
Il est peu probable que le report de patients vers le système indien déjà surchargé rende le système de santé mondial plus juste.
L’Inde ne dispose pas d’un système similaire à celui mis en place par l’Obamacare, mais son système d’hôpitaux publics a été en partie conçu pour permettre aux Indiens les plus pauvres de se soigner. Alors que d’autres pays, comme la Belgique ou la Slovénie, ont inscrit le droit à la santé comme droit fondamental dans leur constitution, ce n’est le cas ni des États-Unis ni de l’Inde, même si le gouvernement de cette dernière déclare que «l’amélioration des conditions de vie de sa population et de l’amélioration de la santé publique est l’une de ses priorités».
L’industrie du tourisme médical souligne les faiblesses de ces pays et met en lumière certaines des limites des systèmes de santé dans le monde. Une baisse de la pression sur les systèmes fracturés devrait permettre une meilleure redistribution des ressources. Néanmoins, il est peu probable que le report de patients vers le système indien déjà surchargé rende le système de santé mondial plus juste.
La question de l’égalité en matière d’accès aux soins a taraudé Henry pendant son séjour en Inde, où il a été témoin d’une pauvreté extrême. Et alors même qu’il était allongé dans un lit de l’unité de soins intensifs, il était perturbé par ce qu’il avait vu. Mais il n’est pas allé en Inde pour sauver le monde. Il y est allé pour sauver sa peau: «Ça me gênait, conclut Henry, mais j’étais condamné à mourir».