France

Wauquiez, la stratégie de l’espace vital

Temps de lecture : 6 min

En étant élu Président de la République le 7 mai, Emmanuel Macron a bouleversé l’échiquier politique. Dernière réplique en date, l’élection sept mois plus tard, le 10 décembre, de Laurent Wauquiez à la tête de Les Républicains. Sa stratégie controversée consiste à chercher très à droite un espace où exister. Twitter constate avec inquiétude ou satisfaction ce rétrécissement de l’offre politique.

Laurent Wauquiez, Wikimedia Commons.
Laurent Wauquiez, Wikimedia Commons.

Contenu Partenaire - Aurore Bergé, députée LREM, résume assez bien la situation politique de la droite française. «L’élection de Laurent Wauquiez est la conséquence logique du rétrécissement de la droite. Une droite qui n’est plus qu’identitaire. Où les centristes et les libéraux n’ont plus leur place @i24NEWS_FR #Conversations #LR». Comme l'explique à sa façon le twittos Adrien Quatennens, député de la France Insoumise, «#Macron fonctionne comme une pompe aspirante pour le socle libéral #PS et #LR. En ce sens, il participe d’une clarification salutaire #ZENPP». La stratégie prônée par Laurent Wauquiez pour sortir de cette impasse consiste à aller chasser sur les terres du Front National. Elle est rejetée par une partie des anciens de l'UMP comme Jean-Pierre Raffarin qui a été Premier ministre de Jacques Chirac: «@jpraffarin et la réunification de la droite: nous observons Macron avec bienveillance et Wauquiez avec vigilance».

Ralliements et défections

Le problème existentiel des Républicains tient au fait que le gouvernement d’Édouard Philippe parvient pour l’heure à tenir les engagements du candidat Macron de réformes socio-économiques plutôt libérales qui ont longtemps été celles voulues par la droite incapable la plupart du temps de passer à l’acte. C’est le cas de la suppression de l’ISF, de la réforme du code du travail et de celles à venir de l’assurance chômage et de l’assurance maladie…

La stratégie d’Emmanuel Macron consistant à fabriquer un grand centre social libéral en séduisant les sociaux-démocrates à gauche et la droite modérée a jusqu’à aujourd’hui parfaitement fonctionné. Illustration, les ralliements venant des Républicains se sont multipliés. Outre les ministres anciennement encartés à droite (Édouard Philippe, Bruno Le Maire, Gérald Darmanin, Sébastien Lecornu), les élus LR qui ont constitué le groupe parlementaire des Constructifs (Jean-Christophe Lagarde, Yves Jego ou Thierry Solère depuis devenu LREM), les très récentes démissions de Xavier Bertrand et Nora Berra ne font que confirmer le rétrécissement du parti que dirige aujourd’hui Laurent Wauquiez.

Tandis que Laurent Wauquiez était invité au journal télévisé de TF1 pour revenir sur sa victoire, le président de la région des Hauts de France Xavier Bertrand annonçait «dramatiquement» sur France2 qu’il «quittait définitivement le parti LR après la victoire de Laurent Wauquiez à la présidence». Il était bientôt suivi par la conseillère de la région Auvergne-Rhône-Alpes (région dirigée par Wauquiez): «en désaccord avec la ligne de Laurent Wauquiez, Nora Berra quitte LR».

Une élection sans suspense

Pour autant, la ligne «dure» semble correspondre aux attentes de nombreux militants LR. Il n’y a pas vraiment de contestation des «résultats de l’élection à la présidence des Républicains: Laurent Wauquiez élu dès le premier tour avec 74,64% des voix. Florence Portelli 16,11%. Mael de Calan 9,25%. 99597 votants au total». Même si comme le constate Tanguy Plitt, «seulement 31,67% des adhérents #LR à jour de cotisation ont accordé leur confiance à Laurent Wauquiez. La victoire revient à l’abstention, de 57,24% #Je PréfèreAgir».

Guillaume Tabard, rédacteur en chef du Figaro, souligne les disparités régionales du vote Wauquiez avec une carte des résultats par département: «vote @laurentwauquiez pour la présidence des #lesRépublicains. Il réalise ses meilleurs scores dans six départements de sa région: Haute-Loire (97,96%), Cantal (91,46%), Ardèche (89,23%), Loire (87,75%), Puy de Dôme (86,71%). Score le plus bas: Finistère (52,53%) #LR». Le pourtour méditerranéen et le centre, historiquement attachés à une droite forte, approuvent massivement la ligne défendue par Wauquiez tandis que l’ouest se montre plus réticent.

Si de nombreux Républicains n’ont pas voté, les adversaires de Laurent Wauquiez les appellent à en tirer les conclusions, «les Républicains sont aussi 135 000 à ne pas avoir voulu de la «droite» conservatrice, populiste et sectaire de Laurent #Wauquiez. La fidélité à un parti n’a pas de sens, seule celle aux idées est cohérente. Ayez le courage de vos convictions». Une position qui d’après LePetitCaporal doit les conduire à se rapprocher d’Emmanuel Macron: «Wauquiez largement élu à la présidence LR avec 74,64% des voix. Très belle victoire. Et très belle mort de la droite modérée au sein de son parti. Elle n’existe plus désormais qu’autour du Président de la République».

A l’opposé, certains prônent ouvertement un rapprochement avec l’extrême droite. «Maintenant que le ménage idéologique est fait chez les Républicains, Laurent #Wauquiez doit avoir du cran et être logique dans ses idées. Un dialogue avec @dupontaignan et @MLP_officiel doit être établi, car indispensable vu l’état de la France aujourd’hui». C’est toute la question épineuse de la stratégie de Laurent Wauquiez. Peut-il sur une ligne identitaire maintenir étanche la frontière avec le Front National et élargir sa base électorale?

La ligne Sarkozy-Buisson

Sa volonté affirmée est de profiter du désarroi actuel du Front National et de Marine Le Pen pour réduire au bénéfice de Les Républicains l’espace du Front National. Ce que Nicolas Sarkozy avait réussi avec l'aide de Patrick Buisson... il y a dix ans. Wauquiez annonce en tout cas clairement la couleur. «Madame Le Pen voulait un président LR qui n’assume pas la droite afin que le FN puisse occuper cet espace. Monsieur Macron voulait un président LR à sa botte afin qu’il puisse se retrouver seul face aux extrêmes. Pas de bol, ce sera moi avec #LaDroiteDeRetour @laurentwauquiez».

Marine Le Pen a bien vu le danger et affirme: «Monsieur Wauquiez a été un européiste convaincu, un centriste, qui nous expliquait que l’on était pas assez généreux avec l’immigration #MLPTF1». D’autres représentants de la droite souverainiste et/ou populiste ont moins de craintes et n’hésitent pas eux à tendre la main à Laurent Wauqiez. Gilbert Collard affirme ainsi que «nous avons besoin d’alliances #Politique #France #FN #droite #uniondesdroites #magdedroite». Idem pour Dupont-Aignan pour qui, «Laurent #Wauquiez n’a plus que deux choix: faire naufrage avec son parti ou accepter notre main tendue d’une grande coalition des gaulliste, républicains et patriotes».

Les exemples de Trump et du Brexit

La vice-présidence de Les Républicains, Virginie Calmels, avait un temps entretenu le doute en répondant à la question «une alliance avec le FN? Pour le moment non». Depuis, elle a été plus claire: «je l’ai à nouveau répété ce matin sur @franceinfo au micro de @jmaphatie. Arrêtons les procès d’intention! À aucun moment par le passé nous n’avons fait d’alliance avec le FN et il n’est pas question d’en faire à l’avenir. @laurentwauquiez a été très clair sur ce sujet!». Ce sont les électeurs de Marine Le Pen que veut rallier Laurent Wauquiez en jouant la province contre les métropoles et la population des zones dites périphériques contre les élites parisiennes. Les propos de Fabien Di Filippo, député LR, en sont l’illustration: «le travail de reconstruction est devant nous, l’avenir appartient à ceux qui veulent s’investir. Je continue à défendre mes idées, les territoires périphériques, les classes moyennes et populaires #LaDroiteDeRetour». Et dans le même temps, pour reprendre une expression macronienne, LR refuse catégoriquement d’être situé à la droite de la droite comme l’indique Wauquiez («qu’on me classe à la droite de la droite, ca me fait juste sourire»).

La droite peut-elle reprendre le pouvoir sans le centre et ne va-t-elle pas perdre son âme? C’est la question que se posent de nombreux twittos. Pour certains, le centre est de toute façon acquis à Emmanuel Macron, «#bfmpolitique #stefanini affirme que la droite ne peut pas gagner sans le #centre. C’est pourtant le centre qui a fait perdre la droite. Aujourd’hui le centre c’est #Juppé, #Solère= #Macron». Et d’autres, se désolent d’une dérive comme M’sieurlebaron: «jamais dans son histoire récente la #droite n’a été aussi désunie et dans un tel chaos politique. Elle n’a plus de boussole. C’est préoccupant». Et il ajoute «la vraie droite commence par le refus d’une France trop multiculturelle».

Laurent Wauquiez tente de reproduire les stratégies qui ont amené les Républicains au pouvoir aux Etats-Unis avec Donald Trump et ont permis aux conservateurs britanniques de rallier pour une bonne partie d’entre eux le Brexit. Mais pour cela, l’ancien parti gaulliste doit changer de nature. C’est ce que promet le nouveau patron de Les Républicains. «C’est cette politique qui a le courage de dire et de faire que je veux retrouver. Je veux faire émerger une nouvelle génération, de nouveaux visages, une droite renouvelée qui assume ses idées #20HWauquiez #Le20H».

Un pari risqué et délicat. Le danger est que ce que Les Républicains peuvent éventuellement gagner très à droite, ils continuent à le perdre dans leurs rangs modérés. Pour l’éditorialiste Christophe Barbier, la stratégie Wauqiez est vouée à l’échec, «EDITO Wauquiez le rassembleur, c’est fini avant même d’avoir commencé». Et comme ironise le dessinateur Monsieur Kak, peut-être est-il même déjà trop tard pour sauver le navire LR: «Wauquiez aux commandes des Républicains».

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