En déplacement pour soutenir un candidat républicain au Sénat à Huntsville (Alabama), vendredi 22 septembre, Donald Trump s'est lancé dans une fiévreuse défense du drapeau et de l'hymne américain en s'appuyant sur un exemple bien précis, celui des joueurs de football américain qui refusent de se tenir debout solennellement pour écouter le «Star Spangled-Banner».
«N'aimeriez-vous pas voir un de ces propriétaires d'équipes de la NFL [le championnat de football américain, ndlr], quand quelqu'un manque de respect au drapeau, dire: “Virez-moi ce fils de pute du terrain tout de suite. Dehors! Il est viré. VIRÉ!”», a-t-il lancé, déclenchant des «U-S-A, U-S-A!» nombreux parmi la foule. «Vous savez, un propriétaire va finir par le faire. Il va dire: “Ce type qui manque de respect a notre drapeau ne fait plus partie de l'équipe”. Et ces propriétaires ne le savent pas –beaucoup d'entre eux sont des amis– mais ils deviendront la personne la plus populaire du pays pour une semaine, car il s'agit d'un manque de respect total de notre héritage, de tout ce que nous défendons.»
Sans le mentionner nommément, Trump faisait allusion à Colin Kaepernick, ancien quaterback des 49ers de San Francisco qui, lors d'un match de préparation de l'été 2016, s'était assis pendant l'hymne national, justifiant son comportement par le racisme de la société américaine et notamment les violences policières:
«Je ne vais pas me lever pour afficher de la fierté envers le drapeau d'un pays qui opprime les noirs et les personnes de couleur. À mes yeux, c'est plus important que le football américain et il serait égoïste de ma part de regarder à côté. Il y a des cadavres dans nos rues et des gens qui se tirent d'avoir commis un meurtre avec un arrêt de travail avec salaire.»
Trump s'en était alors déjà pris à lui alors qu'il n'était que candidat à la présidence: «Je pense que c'est affreux, et peut-être qu'il devrait trouver un pays qui fonctionne mieux pour lui. Qu'il essaie, cela n'arrivera pas.» Kaepernick avait répliqué, quelques semaines plus tard: «Il parle toujours de “rendre sa grandeur à l'Amérique”. Eh bien, l'Amérique n'a jamais été grande pour les personnes de couleur et c'est quelque chose qu'il faut noter. Rendons l'Amérique grande pour la première fois.» Barack Obama avait lui estimé que le joueur «exerçait son droit constitutionnel» à la liberté d'expression.
En mars dernier, lors d'un discours à Louisville (Kentucky), Trump s'était rengorgé en faisant allusion au fait que Kaepernick est actuellement sans contrat: «On a dit que les propriétaires de franchises ne voulaient pas le prendre parce qu'ils ne voulaient pas avoir un tweet méchant de Donald Trump. Vous le croyez? Je viens juste de voir ça.» Mais l'absence de Kaepernick n'a pas empêché de nombreux joueurs de manifester de la même façon, en s'asseyant ou s'agenouillant pendant l'hymne national, en passant un bras autour des épaules d'un coéquipier ou en levant le poing, comme les sprinteurs John Carlos et Tommie Smith aux JO de Mexico en 1968.
La journaliste de la chaîne sportive ESPN Jemele Hill a commenté sur Twitter les derniers propos de Trump en prédisant qu'aucun propriétaire de franchise de la NFL n'y réagirait, soulignant que plusieurs d'entre eux étaient des gros donateurs de sa campagne et ajoutant: «Soyons clairs: les commentaires du président ne feront qu'inciter davantage de joueurs à protester, et ne les décourageront pas.» Hill a récemment fait polémique en qualifiant Trump de «suprémaciste blanc» dans la foulée de l'attentat néonazi de Charlottesville, poussant la Maison-Blanche à réclamer son renvoi de la chaîne. Trump avait lui réagi (sur Twitter, évidemment) en estimant qu'ESPN «paie vraiment le prix fort pour son approche politique (et sa mauvaise programmation). Les gens l'abandonnent en un nombre RECORD. Qu'elle s'excuse de sa malhonnêteté!».