Alors que Pékin est bien décidé à accroître sa mainmise sur internet, quelques Chinois ont décidé de passer à la contre-offensive en se tournant vers le «martien», une invention linguistique qui était tombée quelque peu en désuétude, note Quartz. Ce langage codé mélange des caractères à la fois du chinois traditionnel, du japonais, du kaomoji (smiley japonais), du pinyin (système de romanisation du chinois) et de l'anglais.
Début juillet, plusieurs personnes avaient reconnu ce langage sur Weibo, le Twitter chinois qui compte plus de 340 millions d'utilisateurs actifs. Le martien avait été utilisé pour retranscrire une publication de la très célèbre sociologue et sexologue militante des droits des LGBT Li Yinhe appellant à la fin à la censure. Le post original, qui avait fait le buzz en étant repris par plus de de 60.000 utilisateurs, a été sans surprise retiré du site depuis.
Le dernier rempart de la génération 1990
Le langage «martien» est un rempart pour contourner la censure gouvernementale. «Nous l’utilisons pour rire et nous moquer. C’est un symbole culturel de la génération des années 1990», souligne un utilisateur de Weibo qui converse en «martien». Difficile à maîtriser le même caractère chinois pouvant avoir plusieurs équivalences martiens, ce langage s'est rapidement répandu parmi les jeunes à partir de 2004. Nouveau et cool, il avait surtout le mérite d'être incompréhensible pour les parents et les enseignants. Les plus créatifs ont développé de nouvelles méthodes de saisie de langue martienne pour les claviers. De même que des outils de traduction en ligne.
Après la suppression de la publication de Li Yinhe le 9 juillet en chinois, le post restait accessile néanmoins en dehors de la Chine. Certains messages restranscrits en martien avaient également réussis à passer la censure, les machines étant moins promptes à en identifier le contenu.
Ruan note que le fait qu'un terme martien soit censuré sur une plateforme ne signifie pas forcément qu’il ne peut plus être utilisé sur une autre: «La censure en Chine n’est pas monolithique. Si un mot-clé en langue martienne est censuré sur Weibo, cela ne signifie pas nécessairement qu’il sera censuré sur d’autres plateformes telles que WeChat», explique-t-il.