Économie

Les entreprises aussi s'intéressent à Twitter

Temps de lecture : 4 min

Deux clients Twitter veulent rentabiliser le site de micro-blogging en courtisant les grandes entreprises.

Pour une société dénuée de modèle économique, Twitter n'en a pas moins fait une entrée remarquée dans le monde de l'entreprise. En mars, Nielsen Online rapportait que la fréquentation du site avait augmenté en un an de 1 382%. Cette vigoureuse croissance s'explique en partie par l'utilisation de plus en plus courante que les compagnies américaines font de ce service de micro-blogging. Ainsi, 29% du top 100 des sociétés du magazine Fortune possèdent une page Facebook, et 54% un compte Twitter, selon les chiffres de Proof Digital Media. Twitter offre en effet aux entreprises une vitrine idéale pour communiquer sur les réductions, les jeux-concours et les actions diverses, ce qui contribue à faire vivre leur image de marque et à fidéliser leur clientèle.

Jouissant d'une santé insolente, convoité par les grandes entreprises, Twitter représente une source de profits potentiels non négligeable, qui pourrait aboutir à la création d'un modèle économique digne de ce nom pour les clients Twitter, ces applications qui permettent aux utilisateurs d'optimiser la gestion du programme.

Une poignée d'acteurs clés est déjà en train d'émerger, tels CoTweet et HootSuite, qui ont conçu des plateformes spécifiques aux entreprises et à leur mode de fonctionnement. Et tenez-vous bien: ils auraient le toupet de facturer leurs services. Ces deux sociétés sont parmi les premières à tenter de répondre à l'une des grandes questions posées aux médias sociaux: comment dégager de l'argent à partir d'un service gratuit?

Basé à San Francisco, CoTweet, qui vient de lancer une solution pour entreprise, entend apporter un début de réponse. PAF: 1.500 dollars mensuels. Les utilisateurs standards de CoTweet peuvent déjà déléguer des tâches, programmer l'heure de publication de leurs messages et créer des comptes uniques à connexions multiples, entre autres fonctionnalités. Et à partir de maintenant, les entreprises pourront avoir accès à un espace de stockage supérieur, à des outils d'analyse poussée (pénétration de marchés, interaction avec la clientèle, taux de réponse) et à d'autres services dédiés. Tout cela, donc, pour la modique somme de 1.500 dollars par mois.

Pour l'instant, cette solution pour entreprise ne s'acquiert que sur invitation, la société désirant développer son expérience à partir d'un groupe initial de clients (dont McDonald's, Whole Foods et Coca Cola).

«Nous fonctionnons sur invitation afin de pouvoir nous consacrer entièrement à nos clients», a expliqué le directeur de CoTweet, Jesse Engle, à The Big Money. «Nous recherchons en particulier des entreprises dont la direction a la volonté de s'impliquer dans les réseaux sociaux, et qui sont ainsi en mesure de nous fournir de la matière, de créer un partenariat avec nous, alors que nous en sommes encore à définir les attentes et les besoins précis des utilisateurs.»

Il va sans dire que 1.500 dollars mensuels peuvent être rédhibitoires pour les petites et moyennes entreprises. D'où l'intérêt de HootSuite qui, avec la plupart des fonctionnalités offertes par CoTweet (utilisateurs multiples, espace de stockage et gestion des flux), va bientôt proposer une version «premium» pour un prix moindre. Quand ses services deviendront payants, ils resteront moins onéreux que la solution CoTweet.

Le PDG de HootSuite, Ryan Holmes, estime que sa clientèle cible se compose principalement de «commerçants et d'entreprises familiales», qui refuseront probablement de débourser une forte somme pour la version haut de gamme. Bien sûr, la page d'accueil de HootSuite fait tout de même valoir des clients illustres, tels que Disney, National Geographic ou la NBA. Jusqu'ici, ces sociétés ont utilisé HootSuite comme tout le monde, c'est-à-dire gratuitement. Le défi va consister à faire accepter la version payante aux grands noms comme aux petits.

Le marché reste à conquérir. Si les dirigeants de CoTweet comme de HootSuite assurent qu'ils ne cherchent pas à concurrencer Twitter, toute nouvelle captation d'utilisateurs va néanmoins détourner le trafic du site, tout en maintenant l'activité du réseau. L'outil de mesure des parts de marché des clients Twitter, Twitstat, estime aujourd'hui que 20% des utilisateurs de Twitter passent par le site Web, tandis que HootSuite détient 5% de part de marché et CoTweet, à peine 0,5%.

Cependant, la conquête s'annonce rude, et les adversaires présentent des atouts fort disparates. Quand certains clients Twitter ne tournent que sur le Web, d'autres proposent des logiciels de bureau, et d'autres encore, des applications mobiles. Or, de nombreux adeptes de Twitter se baladent entre les trois supports. Les clients Twitter cherchent donc avant tout à ancrer ces utilisateurs volages. Rien n'oblige à toujours favoriser le même client; les gros utilisateurs démontrent au contraire un goût prononcé pour la découverte.

Cette tendance au papillonnage contribue à éclairer les plans stratégiques des clients Twitter: CoTweet est en train de développer des fonctionnalités qui permettent l'utilisation parallèle de Facebook, et prévoit de lancer une version plus abordable pour les entreprises rebutées par les 1.500 dollars mensuels de supplément. De son côté, HootSuite a déjà intégré d'autres réseaux sociaux (Facebook et LinkedIn), tandis que son application iPhone devrait bientôt voir le jour.

En tout cas, une chose est sûre: les entreprises veulent Twitter, et CoTweet et HootSuite veulent les entreprises. Mais entre l'inconstance des utilisateurs et la multitude d'options gratuites en libre accès, ces deux sociétés parviendront-elles à proposer une valeur ajoutée qui justifie une version payante? Alors que les réseaux sociaux sont encore en maturation, ils parviendront certainement à établir de bons prix de référence ainsi que des stratégies de fidélisation des utilisateurs. D'ici là, l'arrivée de nouveaux acteurs n'est pas exclue. Mais en attendant, parce que CoTweet et HootSuite auront au moins essayé, ils auront forcément une longueur d'avance.

Matthew McKnight

Traduit par Chloé Leleu

Lire également sur Twitter: Twitter, le tout à l'ego, Aux Etats-Unis, twitter, ça s'apprend et Twitter ne gagne rien et vaut un milliard.

Image de Une: L'oiseau Twitter taggé sur un mur. Flickr/CC/Wonderferret

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