Monde

Le récit assez hallucinant d'un journaliste arrêté avec les opposants à Moscou

Temps de lecture : 3 min

Malgré son statut de journaliste et son accréditation, Alec Luhn a été emmené par la police avec les nombreux opposants au régime arrêtés à Moscou ce dimanche.

Des officiers de police emmènent un participant de la manifestation anti-corruption organisée par Alexei Navalny | Alexander UTKIN / AFP
Des officiers de police emmènent un participant de la manifestation anti-corruption organisée par Alexei Navalny | Alexander UTKIN / AFP

«Pourquoi vous n'êtes pas allé dans une dacha [une maison de campagne en Russie, ndlr] faire un barbecue comme les gens normaux.» Alec Luhn est journaliste pour le Guardian. Ce dimanche 26 mars, il a été interpellé par la police, comme l'opposant russe Alexeï Navalny et plusieurs centaines de ses partisans. Navalny, avocat de l'opposition qui se présente à l'élection présidentielle, avait invité à manifester contre la corruption après avoir publié un rapport accusant le premier ministre Dmitri Medvedev.

«La manifestation n'était pas autorisée, nous dit la police», écrit Alec Luhn sur son compte Twitter pour décrire cette situation hallucinante. Qu'a-t-il fait de mal si ce n'est son métier? Il raconte sur le réseau social, comment, en voulant prendre une photo de l'arrestation d'un opposant, il a été embarqué aussi dans le fourgon de police.

Avant l'arrestation, il rapportait en direct ce qu'il voyait, et notamment le bus où l'opposant Alexeï Navalny est emmené.

«Les manifestants ont presque forcé la porte du bus de la police dans lequel on pense qu'Alexeï Navalny est. “Laissez-le sortir”, “honte à vous”, chantent-ils.»

Puis il est arrêté et se prend en photo dans le fourgon.

«J'ai pris une photo de la police détenant un homme à la manifestation autour de l'opposant Alexeï Navalny, ils ont donc décidé de m'interpeller même si j'ai répété à plusieurs reprises que j'étais un journaliste.»

En arrivant au poste de police, il compte 16 personnes avec lui: «Ils m'ont redonné mon téléphone. La police vérifie les documents au poste et constitue le dossier. Le portrait de Poutine est très à propos.»

«“Vous avez personnellement crié des slogans à la manifestation d'Alexeï Navalny”, me dit le policier quand je leur demande pourquoi ils ont arrêté un journaliste. Je n'ai crié aucuns mots d'ordre.»

«“Peut-être que vous êtes accusé d'avoir tué Kennedy”, dit un officier en chef lorsque je demande à nouveau pourquoi j'ai été arrêté à la manifestation. Drôle ce type.»

«Après quatre heures, je suis poursuivi pour violation de l'ordre public pour avoir participé à une manifestation pas autorisée, même si j'ai montré mon accréditation de journaliste.»

«La police poursuit Arseniy, affirmant qu'il a crié “Poutine est un voleur”. Il dit qu'il n'a pas dit ça. Comment pourraient-ils s'en souvenir parmi les 500 arrestations.»

A 21h, heure française, Alec Luhn a publié un nouveau message pour signifier sa remise en liberté: «5h50 après mon arrestation à la manifestation organisée par Alexeï Navalny, j'ai été inculpé pour avoir participé à une manifestation non autorisée.»

Le nombre d'arrestations n'est pas encore clair, des rassemblements ont eu lieu dans plusieurs villes de Russie. Dimanche midi, l'AFP parlait de 130 personnes détenues par la police. Dimanche soir, Alec Luhn parle de 500 sur Twitter. Puis, le Guardian, le quotidien britannique pour lequel il travaille, relaie l'information d'un groupe qui en évoque 850.

Malgré son arrestation, Alexeï Navelny avait appelé via son compte Twitter à continuer la manifestation. La marche sur la rue Tverskaïa à Moscou, l'une des principales artères de la capitale russe menant au Kremlin, avait été interdite par les autorités, une décision que Alexeï Navalny conteste. Selon la police, elle réunissait entre 7000 et 8.000 personnes, ce qui en fait l'un des plus importants rassemblements ces dernières années en Russie.

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