À quelques semaines du premier tour de la présidentielle, on connaît, enfin, le nom des onze candidats retenus. Ils ont été officialisés ce samedi 18 mars par le Conseil constitutionnel après avoir obtenu les 500 parrainages nécessaires. La longue et imprévisible campagne 2017 menant aux deux tours de scrutins (23 avril et 7 mai) d'une présidentielle décidément liquide va maintenant s'intensifier. Et sans doute changer de visage.
Jusqu’ici, la campagne a été largement dominée par les affaires impliquant François Fillon, mis en examen au titre notamment de «détournement de fonds public» et, dans une moindre mesure Marine Le Pen. Les idées défendues par les «gros» et «petits» candidats ont souvent été passées au second plan.
Après avoir mis en ligne ce lundi 20 mars, 100 propositions de chercheurs pour la France et tenter de faire avancer le débat de fond, nous avons décidé de rassembler ici nos analyses et décryptages consacrés aux candidats. La liste sera mise à jour jusqu'au 7 mai.
1.Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière)
Nathalie Arthaud, c'est la lutte terminale (par Sébastien Tronche, archive 2012)
«Je n’ai pas de doute sur le fait que tôt ou tard une révolte va éclater. Nous sommes communistes, nous sommes révolutionnaires, nous pensons que les travailleurs peuvent transformer les choses en se battant, par leurs luttes. Etre communiste, c’est avoir le programme d’exproprier la classe capitaliste. Et ce n’est sûrement pas parce qu’il y a eu cette caricature qu’est le stalinisme et qui a dénaturé cet idéal, qu’il faut s’interdire de faire le bilan du capitalisme.»
Poutou, Arthaud: pourquoi la campagne des candidats trotskistes patine (par Gilles Bridier, archive 2012)
«Dans une présidentielle, on associe le contenu du message politique et la personne qui porte le message. Récemment, la personnalisation de la vie politique a, en plus, contribué à la dépolitisation du message pour concentrer l’attention sur le candidat lui-même. Aussi, nos derniers résultats étaient clairement lié aux personnes.»
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2.François Asselineau (UPR)
La candidature d'Asselineau et de l'UPR n'a rien de fantaisiste (par Gaël Brustier)
«Insistant sur le «rétablissement de la démocratie» par la dénonciation des traités européens et la sortie de l’euro, l’UPR est le mouvement le plus radicalement hostile aux institutions européennes, avec pour toile de fond, une vision résolument hostile à l'impérialisme américain. C’est le cœur du programme de ce mouvement qui se réclame du programme du Conseil National de la Résistance et entend promouvoir un “programme de libération”, des références historiques qui le distinguent fortement du Front national. Ce dernier, positionné désormais sur le créneau “souverainiste”, est obligé d’euphémiser le volet économique de son discours anti-UE qui inquiète parfois un électorat surtout mu par le discours identitaire, autoritaire et anti-immigration traditionnel du parti des Le Pen.»
Régionales: «Censuré par les médias», l’UPR fait parler ses candidats au compte-gouttes (par Étienne Girard, archive 2015)
«“Notre pays est aujourd’hui gouverné depuis Bruxelles, selon des intérêts américains, clame le haut-fonctionnaire. Il faut rendre à la France son indépendance et avoir confiance en notre génie national. Sinon, nous nous diluerons définitivement dans un empire euro-atlantique.” Les sujets locaux sont visiblement à la grande politique ce que l’ouvrier est au PDG de Renault. Le haut-fonctionnaire a quand même sa petite idée sur le récent redécoupage des régions: “Elles ont été calquées sur les États américains. Bourgogne-Franche-Comté, c’est la Virginie occidentale! À travers ces grandes régions, nos gouvernants cherchent en réalité à disloquer la France.”»
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3.Jacques Cheminade (Solidarité et Progrès)
Cheminade a un programme vraiment très spatial (par Titiou Lecoq, archive 2012)
«On a tous entendu que Jacques Cheminade voulait conquérir l’espace et d’autres trucs du même acabit qui nous paraissent ridicules. Mais combien d’entre vous sont capables d’énumérer précisément ses propositions spatiales? Hein? Voilà. Donc avant de chercher à comprendre d’où lui vient cette ambition spatiale légèrement démesurée, étudions son programme.»
Le top 10 des meilleures «cheminaderies» de Jacques Cheminade (par Aurelia Morvan, archive 2012)
««Mon projet est de faire "parler croquant" en remettant la langue de Villon et de Rabelais au poste de commande. Il est en effet urgent, à la mesure de mon projet, de revitaliser notre langue devenue aujourd’hui anémiée par l’esprit de Cour, le cartésianisme et la destruction par les médias. Nous ne devons plus jamais laisser les Céline marauder et braconner aux frontières de notre langue. Nous devons nous-mêmes lui redonner une vie parlée, la couleur et la tonalité d’une langue musicale vivante que la pratique du chant choral telle que je la conçois aidera à faire naître.»
Jacques Cheminade: «Il faut un Glass-Steagall Act pour conquérir Mars» (par Hugues Serraf, archive 2012)
«Jacques Cheminade, c’est autre chose. C’est le candidat pour lequel la terraformation de Mars est l'objectif politique raisonnable d'un mandat présidentiel―un peu comme le démantèlement du parc nucléaire pour les Verts ou l’éradication du capitalisme pour le NPA.»
Sacré Cheminade (par Eric Le Boucher, archive 2012)
«Que propose le candidat de Solidarité & Progrès? En dehors de sa curieuse attirance pour tout ce qui est extraterrestre, pas grand-chose. Mais le tout est présenté très doctement.»
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4.Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France)
Voici ce que j'ai retenu pour vous du programme de Nicolas Dupont-Aignan (par Titiou Lecoq)
«À mon grand étonnement, ce n’est pas non plus une copie pasteurisée du Front national. Certes, il est contre le voile à l’université parce qu’il refuse les “prisons de textile” mais il est pour la défense du planning familial, le droit à l’IVG et il a dit que les affiches avec des hommes qui s’embrassent, ça ne le dérangeait pas. En fait, ses plus grosses particularités: il est pour l’abrogation de l’Hadopi et la mise en place de la licence globale, pour le boulier à l’école pour apprendre à compter et il semble très sensible à la question du “bien-être animal”.»
Nicolas Dupont-Aignan et les conflits d'intérêts (par Emmanuel Daniel, archive 2012)
«Le candidat de Debout la République a rempli sa déclaration d'intérêts, qui reflète son peu de liens qui pourraient être de nature à faire naître des situations de conflits d’intérêts.»
Seul Dupont-Aignan a «célébré» les vingt ans de Maastricht (par Jean-Marie Pottier, archive 2012)
«Le seul candidat à avoir marqué le coup mardi est l’un des plus opposés à l’euro, Nicolas Dupont-Aignan, qui s’est rendu dans un supermarché de Lille pour dénoncer «l’arnaque de l’euro» en remplissant deux caddies de produits dont les prix ont selon lui explosé (ce n’est pas une première de sa part: souvenez-vous de cette vidéo).»
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5.François Fillon (Les Républicains)
François Fillon, candidat au supplice (par Galaad Wilgos)
«Il y a eu Socrate, Pasteur, Galilée, Dreyfus, il y aurait désormais François Fillon, “guerrier balafré” revenu de toutes les guerres, infatigable combattant, orpailleur de la vérité indifférent aux calomnies de ses persécuteurs. Seul contre tous, tel semble être le récit que s’est inventé François Fillon afin de faire acte de résilience ou de décompensation. Comme Marc Aurèle, Fillon voudrait en effet “ressembler au promontoire sur lequel sans cesse se brisent les vagues: lui reste debout et autour de lui viennent mourir les bouillonnements du flot”.»
François Fillon, une morale anti-Lumières (par Maryse Emel et Non Fiction)
Depuis la mise en cause de son exemplarité en matière de droit et de morale, le discours de François Fillon est entièrement guidé par une vision complotiste: média, journalistes, financiers… tous semblent avoir rejoint une armée secrète, prête à tout pour le réduire au silence. D’accusé, le voici hissé au rang de victime. Soupçonné de fraudes atteignant des montants vertigineux, il propose la tolérance zéro pour la délinquance en col bleu. Immoral, il prône le retour aux valeurs de la morale. Les juges s’exprimeront sur le premier aspect; quand au second, il est aussi affaire de philosophie.
Pourquoi Fillon se compare-t-il sans cesse à Bérégovoy? (par Claude Askolovitch)
«Vingt ans après, Fillon, “collaborateur” du Président Nicolas Sarkozy, se vivrait comme l’homme des réalités financières face aux inconséquences élyséennes. Il parlait du pays ruiné comme Bérégovoy défendait le franc fort. Il était à son tour, dans son camp, l’homme des réalités auxquelles on n’échappe pas, celui qui dit la vérité, plus ferme que ses rivaux, et à qui l’on ne rendait pas justice, un éternel effacé. Il finit par triompher, s’imposant à la tête de la droite, ressentant le sentiment d’une justice accomplie.»
La folle campagne de François Fillon, en graphiques (par Sophie Gindensperger)
Vous ne comprenez pas ce qui se passe avec Fillon? Venez par ici (par Gregor Brandy)
«Reste que si François Fillon est élu président le 7 mai prochain, la procédure si elle n'est pas encore finie, prendra au moins cinq ans de plus pour s'achever, puisqu'il bénéficiera du statut pénal du chef de l'État. Selon l'article 67 de la constitution, “il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite.”»
«Des immigrés certes, mais quand on accueille des gens dans une maison, on ne s’attend pas, a-t-il précisé en substance, à ce que ses invités “cherchent à prendre le pouvoir”. C’est très exactement le cœur de la thématique de l’extrême droite»
Les trois inquiétants messages de François Fillon (par Jean-Marie Colombani)
«Deuxième message, à l’adresse cette fois de celles et ceux qui, peut-être venus de la droite, ont grossi les rangs des électeurs de l’extrême droite. Il s’agit cette fois de l’immigration. Des immigrés certes, mais quand on accueille des gens dans une maison, on ne s’attend pas, a-t-il précisé en substance, à ce que ses invités “cherchent à prendre le pouvoir”. C’est très exactement le cœur de la thématique de l’extrême droite, qui alimente le fantasme selon lequel les musulmans français seraient les instruments d’une guerre de civilisation.»
Fillon a mieux compris que ses concurrents les évolutions du catholicisme (par Henri Tincq)
«Aussi, le boulevard s’est-il ouvert pour une droite catholique, non pas intégriste –comme à Civitas ou au FN–, mais conservatrice, identitaire, décomplexée, soutenue par un jeune clergé critique d’une modernité désenchantée, plus soucieuse qu’autrefois de visibilité chrétienne, de communication et d’image, de formes anciennes de piété, de dévotion, de rites, de certitudes dogmatiques, politiques, morales. C’est une droite identitaire préoccupée par la menace islamiste, mais qui n’est pas étrangère aux messages de tolérance du pape actuel et aux combats humanitaires. Pour avoir perçu mieux que ses concurrents de telles évolutions internes au catholicisme, un François Fillon a pris dans cet électorat une forte avance.»
Comment François Fillon est devenu l'homme de «l'habile synthèse» (par Pauline Thompson)
«La russophilie de François Fillon –“farouchement gaullien”– “lui confère l’image d’un homme fort, par contagion d’images entre lui et Vladimir Poutine”. Elle “opère une habile synthèse entre plusieurs courants bonapartistes, catholiques et conservateurs français”».
François Fillon est bien plus à droite que vous ne pensez (par Claude Askolovitch)
«On n’est pas en vain soutenu par les jeunes ultra conservateurs, ultra catholiques, modernes et antiques à la fois, de Sens commun, ces enfants doux de la branche piétiste des adversaires du mariage gay. On est ce que l’on montre. François Fillon en a montré, singulièrement dans cette campagne.»
«Le grand mérite du programme de Fillon est de dégager une vision stratégique cohérente et de proposer des solutions conformes aux analyses largement développées précédemment mais jamais mises en œuvre, ou très partiellement»
Avec Fillon, le retour de la TVA sociale! (par Gilles Bridier)
«François Fillon se réfère aujourd’hui à la même logique du financement d’une partie des prestations sociales par l’impôt sur la base d’une assiette large, même si la TVA est perçue comme un impôt injuste dans la mesure où il frappe indistinctement tous les ménages de la même façon, quels que soient leurs revenus –et donc plus lourdement les ménages les plus modestes.»
Le programme économique de Fillon est solide, mais est-il politiquement viable? (par Charles Wyplosz et Telos)
«Le grand mérite du programme économique de Fillon est de dégager une vision stratégique cohérente et de proposer des solutions conformes aux analyses largement développées précédemment mais jamais mises en œuvre, ou très partiellement, par les précédents gouvernements. Les critiques qui pleuvent depuis sa victoire à la primaire sont très largement injustifiées, surtout celles qui cherchent à présenter ce programme comme extrémiste et réactionnaire puisque les efforts précédents ont été bien trop timorés pour arrêter le déclin et faire reculer le chômage. Ceci ne signifie pas que tout est parfait.»
Et soudain apparut l'autre François Fillon (par Fanny Saliou)
«Pour lui, il n'y a pas de doute, les médias et le pouvoir ont voulu l’assassiner politiquement. Il joue le complot politique. Selon Monique Pinçon-Charlot, il ne voit sans doute pas bien où est le problème: “Il existe chez François Fillon un sentiment d’impunité sincère car ce n’est pas l’impunité d’un homme mais celle de toute une classe. Ce sentiment se construit dans l’entre-soi des puissants, qui vivent dans une bulle.”»
Pourquoi François Fillon rassure les électeurs de droite (par Jeremy Collado)
«En reprenant peu ou prou ses thèses libérales, les autres candidats ont validé l’idée que François Fillon était au centre de gravité de la droite. Une synthèse. Entre Raymond Barre et la droite balladurienne. Qui assume un positionnement “autoritaire” à même de rassurer la droite, qui attend des signaux forts sur la sécurité et l'immigration. Ni trop identitaire, ni véritablement souverainiste, encore moins révolutionnaire. En un mot, rassurant. Aujourd'hui, il se présente comme l'incarnation d'un espoir, le porteur d'une vague. Il est plutôt une solution par défaut. Le résultat d'un manque de leadership naturel à droite... qu'il comble à merveille.»
François Fillon est en bien meilleure position que ne le suggèrent les sondages (par Eric Dupin)
«Le tableau d'ensemble est ainsi beaucoup plus favorable à Fillon qu'une lecture hâtive des sondages ne le suggère. Face à une gauche divisée en trois candidature principales, la mobilisation d'un électorat de droite désireux d'alternance suffirait à le mener à un duel final contre Le Pen où Fillon aurait toutes les chances de l'emporter. C'est le camp le plus cohérent qui l'emportera à cette présidentielle.»
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6.Benoît Hamon (Parti socialiste)
Hamon doit renoncer (par Claude Askolovitch)
«Hamon est étonnant. Il rompt avec la ploutocratie de son camp, mais en conserve l’insupportable orgueil. Ce qu’on lui a fait en son parti, il le reproduit. Les Valls et consors considèrent que la ligne de gauche est illégitime à représenter le socialisme, et préfèrent trahir que la cautionner? Mais Hamon considère que seul son Parti socialiste est apte à emmener les gauches, parce qu’il serait central, comprenez modéré, moins outrageusement à gauche! Hamon est à Mélenchon ce que lui est Valls -jusqu’à l’inélégance du procédé. Déchirer les engagements de la primaire, ou considérer que seul son courant mérite la lumière électorale participe d’une même conception -orgueilleuse, autocentrée, ignorante de la dignité des autres- de la politique.»
Comment son enfance au Sénégal a façonné Benoît Hamon (par Camille Belsœur)
«C’est un établissement qui a été déterminant. J'y ai grandi dans un contexte où le religieux se mixait à la diversité sociale, me confie Benoît Hamon. Mais, il est difficile de dire exactement l’influence que cela a eu dans mon parcours politique par la suite. Quatre ans à Dakar, c’est à la fois beaucoup, car cela structure votre enfance, et peu dans une existence. Une vie se construit par étapes successives et dans la narration de la mienne je ne sais pas exactement qu’elle est la force de mon enfance à Dakar, mais cela a forcément eu un rôle dans ma construction en tant qu’homme.»
Qui est Chantal Mouffe, la penseuse qui inspire Hamon et Mélenchon? (par Gaël Brustier)
«Laclau et Mouffe connaissent impeccablement l’œuvre de Marx et se font continuateurs des travaux d’Antonio Gramsci. S’ils ne nient nullement l’identifiant de la classe sociale, ils le relativisent et, en s’intéressant à la production discursive des identités politiques, donnent quelques clés qui permettent d’analyser comment le bloc historique néolibéral s’impose et comment les forces progressistes peuvent développer des stratégies contre-hégémoniques. À une “révolution”, produit direct d’une lutte des classes, ils préfèrent donc une démocratie radicale fondée sur une articulation de demandes diverses.»
«Hamon est étonnant. Il rompt avec la ploutocratie de son camp, mais en conserve l’insupportable orgueil. Ce qu’on lui a fait en son parti, il le reproduit»
Les cinq handicaps qui plombent la candidature de Benoît Hamon (par Eric Dupin)
«Cette fois-ci, les “trahisons” –pour reprendre l'expression de Hamon lui-même– se multiplient. Toute une série de proches du président sortant (Jean-Yves Le Drian, Jean-Pierre Mignard, Bernard Poignant) ont ouvertement rallié Macron. L'aile droite du PS (Gérard Collomb, Christophe Caresche) a fait de même en invoquant une clause de conscience à l'endroit de l'ancien “frondeur”.»
Le revenu universel, l’idée révolutionnaire qui peut changer le cours de l'élection (par Gaël Brustier)
«L’enjeu du revenu universel n’est pas de pallier une éventuelle “fin du travail”, comme le débat actuel forcément tronqué le laisse penser. Son enjeu est encore moins de “simplifier” un système d’aides sociales, ce qui serait d’un intérêt très limité. S’il porte une évidente dimension économique et sociale, il est logiquement aussi vecteur d’une possible réforme intellectuelle et morale de nos sociétés et légitime l’idée d’une alternative possible. Le revenu universel, plus puissamment qu’une traditionnelle politique keynésienne de relance par la demande, est une puissante réponse à TINA (le “There is no alternative»” de Margaret Thatcher). Le vieux monde meurt, le nouveau ne parvient pas à naître… mais pour une fois la réponse apportée à la crise n’est pas un “monstre”.»
Quand Benoît Hamon se fout de notre gueule (par Laurent Sagalovitsch)
«À quoi bon s'ennuyer à voter pour tel ou tel candidat si sitôt élu, ce dernier s'empresse de renoncer à ce qui était au cœur même de sa réflexion? Nous ne sommes pas des marionnettes ou des variables d'ajustement, nous ne sommes pas des nombres sans visage, nous méritons mieux, bien mieux que ces stratégies d'appareil où pour espérer gagner quelques suffrages venus du camp d'à-côté ou d'en face, on se saborde sans aucun respect de la parole donnée.»
«Je me rends compte que c’est le nom de Hamon qui sera associé à l’échec historique de la gauche si Marine Le Pen remporte la présidentielle. On oubliera ce qui s’est passé avant, le 21-Avril, les défaites antérieures. C’est le nom de mon grand-père, de mon père, de mes enfants, qui sera synonyme de ce naufrage historique. Je suis parfaitement lucide sur la gravité du moment.»
Benoît Hamon ou la révolte des diplômés (par Gaël Brustier)
«Les diplômés fragilisés par la crise, précarisés, ont voté Hamon et rejeté ce qui fait le dénominateur commun des politiques économiques menées depuis 2008. Cet électorat politisé réclame aussi un horizon politique. En mettant en avant la question du «revenu universel», Hamon a utilisé une idée déjà riche de l’engagement de la société civile dans les débats d’une famille social-démocrate encore figée dans l’imaginaire des Trente Glorieuses.»
«Aujourd’hui, le corpus idéologique de Benoît Hamon ne s’adresse plus aux classes populaires, mais aux jeunes diplômés des centres urbains, professions intellectuelles, en bref ceux qui détiennent le capital culturel»
Que se passe-t-il autour de Benoît Hamon? (par Jeremy Collado)
«Jadis Benoît Hamon, issu du mouvement étudiant et disciple de Michel Rocard, voulait faire revenir les ouvriers et les classes populaires à gauche, alors même qu’elles avaient eu le sentiment d’être trahies par des leaders socialistes qui, comme Jospin en 2002, n’utilisaient même pas le mot “ouvrier” dans leur programme. Aujourd’hui, le corpus idéologique de Benoît Hamon ne s’adresse plus aux classes populaires, mais aux jeunes diplômés des centres urbains, professions intellectuelles, en bref ceux qui détiennent le capital culturel.»
Benoît Hamon ou le retour des ruses de Mitterrand (par Claude Askolovitch)
«Il y eut, dans la soirée des primaires, des images assez fortes, un peu vraies, mais comment faire la part des choses. Deux discours se succédèrent, celui du vaincu, Manuel Valls, et du vainqueur, Benoît Hamon, qui résumaient cette bataille. Valls parlait comme parlent les hommes d’État vaincus, dans les grandes démocraties, mimant le genre et le vivant. Il s’adressait aux «chers compatriotes», il évoquait son destin, sa réinvention, sa famille enfin. Hamon, lui, parlait en militant choisi pour porter sa famille; il disait «nous»; ne parlait de lui que pour évoquer la force que ses amis lui avaient apporté, pour le meilleur; il était fraternel envers les vaincus, on rassemble sa famille, et envers les alliés à venir, on rassemble la gauche. Mais son destin n’était que l’occasion du destin du socialisme.»
Benoît Hamon n'a compris qu'en apparence les transformations liées au numérique (par Monique Dagnaud et Telos)
«Obsédé par le technological unemployment et la souffrance au travail, Benoît Hamon rate une marche, et même dégringole tout un escalier que la gauche devrait à l’évidence emprunter: celui des activités humanistes et entrepreneuriales dopées par le collaboratif. Chez lui, le numérique n’est jamais vu à travers ses capacités à mobiliser la société civile –à l’exception toutefois de la capacité donnée aux citoyens d’écrire la loi grâce à des “amendements citoyens”. Or, volet réjouissant de la révolution numérique, on observe une floraison d’initiatives nées de la puissance de connectivité d’Internet auxquelles se sont associées les valeurs environnementalistes.»
Le jour où la gauche a avoué qu'elle abandonnait la lutte contre le chômage (par Jean-Laurent Cassely)
«Le revenu universel n'est pas la fin du chômage: il en accepte l'inéluctabilité. Il est le moyen de s'en accomoder. Il ne s'agit pas du tout ici d'attaquer le principe du revenu universel, de le discréditer comme un truc de hippies ou une mesure trop chère, mais plutôt de rappeler pourquoi, pour tous les bons arguments qu’il a en sa faveur, ce revenu universel peut difficilement être présenté comme il l’est parfois, sous l’angle d’une manière de regagner du pouvoir sur le marché du travail pour les chômeurs: à l’inverse, il est très précisément conçu pour répondre à la pénurie de ce dernier, dont les causes ne sont guère interrogées dans le débat.»
Le peuple ou la gauche? Ce qui sépare Hamon et Mélenchon (par Gaël Brustier)
«Benoît Hamon incarne donc une “gauche de gauche”, dans un univers où le clivage gauche-droite pâtit de l’expérience concrète de l’indifférenciation des politiques économiques menées depuis la crise de 2007-2008. Il s’agit d’appliquer la stratégie du “front unique”, d’union de la gauche, de parler le langage de la gauche et d’exercer un droit d’inventaire sur le quinquennat au nom d’une gauche idéale, dans un contexte qui a évolué. L’obligation de reprendre à son compte le bilan du quinquennat est gage d’enferment au sein de la “gauche” sinon au sein du PS. Ignorer, quand on est investi par le PS et le cœur de son électorat, l’identifiant “gauche” serait, a contrario, destructeur pour la cohésion de celui-ci et pour la candidature Hamon.»
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7.Jean Lassalle (Résistons!)
Qui est vraiment Jean Lassalle? (par Galaad Wilgos)
«Le candidat des paysans et de la terre, le camarade Jean Lassalle serait-il écolo et antilibéral? Sa politique en tant que maire ne fait en tout cas pas l’unanimité auprès des militants écologistes ou écosocialistes. Un billet du philosophe et chroniqueur Yannick Youlountas rappelle ainsi que Jean Lassalle est aussi l’homme qui a voté en 2012 Sarkozy au second tour, voté contre le mariage pour tous en 2013, et qui était particulièrement violent contre les zadistes et les écologistes qu'il traitera de «fanatiques» pour avoir demandé des études d'impact du projet de construction du tunnel de Somport – un projet qui mobilisa une opposition écologiste massive et dont l'échec laissa, selon Libération, la vallée désabusée.»
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8.Marine Le Pen (Front national)
Marine Le Pen, présidente par inadvertance (par Jean-Marie Pottier)
«Mais que se passerait-il si cette France encore majoritairement inquiète face à Marine Le Pen décidait de fortement s'abstenir? Serge Galam avance l'hypothèse que le “front républicain” sera confronté à un défi inédit en cas de second tour avec Emmanuel Macron, candidat non issu d'un des deux grands partis et qui se présente lui-même comme «hors système». Et ce défi semble encore plus compliqué en cas de second tour avec François Fillon, actuellement lesté d'une impopularité très forte.»
Les jeunes qui votent pour la première fois préfèrent Marine Le Pen (par Anne Muxel)
«Les choix de vote recoupent des fractures sociales et culturelles au sein de la jeunesse. Le vote frontiste enregistre des écarts importants entre la jeunesse étudiante (24%) et la jeunesse au travail (44%). Mais un quart de suffrages parmi les étudiants n’est pas rien et témoigne de l’attrait de Marine Le Pen dans des segments diversifiés de la jeunesse française. Reste une ligne de partage assez nette selon le genre. Alors que 34% des jeunes hommes pourraient voter pour la candidate frontiste les jeunes femmes ne sont plus que 25% dans les mêmes dispositions.»
Comment Marine Le Pen change (ou pas) le FN avec ses mots (par Nicolas Lebourg)
«La fréquence d’usage de certains termes par Marine Le Pen permet effectivement de mieux saisir comment s’est effectué la normalisation de l’image de son parti. L’entrelacement des termes liés à celui d’État dessine bien le caractère ubique et protectionniste de ce dernier, tout en le connectant à l’idée du peuple et de la démocratie. La charge d’inquiétude que représente la puissance autoritaire est défaite par une inflation de l’usage de mots comme «démocratie», «liberté» et «laïcité» –le premier représente ainsi 2‰ des mots du corpus de la fille contre 0.9‰ du père, le deuxième 4.4‰ contre 2.9‰, le dernier 1.3‰ contre 0.2‰.»
«Quand on observe le programme de 2017 de la candidate, on s'aperçoit qu'on y retrouve bien des strates des programmes antérieurs, dites différemment»
Ce document montre comment Marine recycle Le Pen (par Nicolas Lebourg)
«Bien des médias et des pseudos-intellectuels ont chanté à quel point Marine Le Pen représentait une sortie de l'extrême droite, un néo-FN qui n'aurait plus du lepénisme que le nom. Quand on observe le programme de 2017 de la candidate, on s'aperçoit qu'on y retrouve bien des strates des programmes antérieurs, dites différemment. La comparaison est particulièrement intéressante avec 2007, la dernière campagne présidentielle de Jean-Marie Le Pen, dont Marine Le Pen était la directrice stratégique, pour un score décevant à la clef (10,44%).»
Le Front national est très loin d'être épargné par les affaires (par Gregor Brandy)
«Il y a une raison qui explique que le Front national, d'habitude si prompt à dégainer sur toutes les affaires qui touchent ses adversaires, a choisi de rester silencieux, expliquait dès le début de l'affaire le Huffington Post: c'est parce qu'il doit plus ou moins faire face au même problème au Parlement européen.»
À quoi ressemblerait l'arrivée du FN au pouvoir? (par Joël Gombin)
«La question la plus délicate que soulève l’hypothèse d’une conquête du pouvoir d’État par le FN est celle des conditions de l’exercice du pouvoir par une présidente et un gouvernement totalement ou majoritairement issu de ses rangs. On manque ici d’éléments de comparaison, en France bien sûr, mais aussi à l’échelle européenne. On entre donc assez largement dans le domaine de la spéculation. On peut toutefois s’appuyer sur les acquis de la sociologie de l’État et de la sociologie des politiques publiques pour tenter d’imaginer les contraintes qui pèseraient sur l’exercice du pouvoir par un exécutif FN.»
Le Front national a-t-il remporté la «bataille culturelle»? (par Gaël Brustier)
«Vingt ans ont passé. Le FN est davantage devenu une machine électorale qu’un «intellectuel collectif». Jamais vraiment remis de la scission mégrétiste, le parti à la flamme tricolore n’a pas, au contraire de ses homologues italiens, formé une véritable contre-société. Mais il bénéficie de l’investissement mégrétiste dans le combat culturel.»
«Le FN est-il libéral, laïc et féministe? Dans l’exacte mesure où cela lui permet de condamner l’islam et l’immigration, et pas au-delà»
Le Front national se trompe-t-il de stratégie? (par Nicolas Lebourg)
«Certes, l'Union européenne a tout pour être une cible préférentielle du FN, qui peut la désigner avec crédibilité comme un artefact supranational, postdémocratique, technocratique, turbocapitaliste. Jamais Marine Le Pen ou Florian Philippot ne pourront faire mieux que José Manuel Barroso et Jean-Claude Juncker pour écœurer l'opinion publique de la construction européenne. Mais l'état de l'opinion sur la question européenne ne connaît pas la même dynamique irrationnelle qu'à propos du retour de la violence politique dans les sociétés européennes.»
Derrière le «féminisme» de Marine Le Pen, le vote déterminant des femmes (par Aude Lorriaux)
«Le FN est-il libéral, laïc et féministe? Dans l’exacte mesure où cela lui permet de condamner l’islam et l’immigration, et pas au-delà. Ces accents libéraux (comme d’ailleurs le programme économique du parti) n’interviennent que pour servir des objectifs plus élevés: stopper l’immigration, rétablir les frontières, promouvoir une identité nationale homogène.»
Marine Le Pen se prend-elle pour Trump? (par Jeremy Collado)
«Marine Le Pen est confirmée en tête dans tous les cas de figure», se rassure Nicolas Bay. «Elle a solennisé son discours et montre que les événements lui ont donné raison. Aujourd'hui, nos idées sont majoritaires dans le pays. Pourquoi en rajouter? Marine Le Pen n’a pas besoin de faire de surenchère sur l’immigration ou l’identité car l’opinion nous donne une légitimité sur ces sujets-là.»
Pourquoi les forces de l'ordre votent-elles massivement FN? (par Jérôme Fourquet)
«Le vote Front national déjà structurellement puissant dans ces bureaux a très clairement augmenté entre la présidentielle et les élections européennes, traduisant sans doute une exaspération de ces gendarmes et de leurs familles face à la politique sécuritaire et pénale du gouvernement mais aussi une profonde insatisfaction concernant leurs conditions de vie et de travail ainsi que peut-être une radicalisation suite aux événements de Notre-Dame-des Landes. Or, dans plusieurs bureaux de vote tests que nous avons pu identifier, non seulement ce niveau élevé n’a pas diminué, mais il a encore grimpé entre les européennes et les régionales.»
Catholiques et Front national: la fin du cordon sanitaire? (par Henri Tincq)
«Selon les politologues, les catholiques résistent plus que la moyenne nationale à la séduction qu’exerce le parti de Marine Le Pen. Mais ils n’échappent pas au vent qui souffle partout en faveur des thèses du Front national et des valeurs identitaires qu’il prétend incarner. Si les digues tiennent du côté catholique chez les plus anciens, des fissures apparaissent dans les jeunes générations.»
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9.Emmanuel Macron (En marche!)
Emmanuel Macron, le signe que nous approchons du stade terminal de la crise de régime (par Gaël Brustier)
«“En marche!” est un peu le Nuit Debout des traders, ce qui suppose de passer par des alliances avec d’autres groupes sociaux plus nombreux en voix dans les urnes (chez les seniors, désormais à l’abris des vicissitudes du monde du travail, ou chez les cadres et professions libérales, dans une France qui, sans être privilégiée, ne s’estime pas victime de la plongée du pays dans la globalisation et l’intégration européenne). Son combat ne se situe ainsi désormais plus au niveau de la compétence économique ou des “propositions” mais à celui de l’unification d’aspirations contradictoires et diffuses dans la société.»
Quelques minutes de débat sur l'islam montrent comment Macron évolue (par Claude Askolovitch)
«Les mois passant, la banalité a recouvert l’enthousiasme, et Macron, abordant la crédibilité régalienne, cultive donc l’air du temps? Même en répondant à Marine Le Pen, il posera sa distance avec la simple défense des libertés. Le burkini n’est pas un sujet de laïcité, mais une affaire d’ordre public, explique-t-il, et certains arrêtés l’ayant interdit se justifiaient. Macron le pense vraiment.»
La réincarnation de Hollande en Macron (par Eric Dupin)
«Que l'on se comprenne bien. Je n'insinue en rien que la candidature Macron est une manœuvre machiavélique ourdie à l'Elysée. Hollande a, bien au contraire, toutes les raisons d'être profondément marri d'avoir été mis échec et mat dans une partie reprise, avec une réussite potentielle, par l'un de siens. Mais il peut se consoler en songeant à la relecture historique possible de son quinquennat à la lumière d'une élection de son ancien conseiller et ministre à l'Elysée.»
En immersion chez les Macroniens (par Claire Garnier)
«A un mois du premier tour, Jean-Philippe prévient que la stratégie est d’aller chercher les indécis, via le “tractage”, le “boîtage” et le porte-à-porte. Il déconseille de glisser le petit livret dans les boîtes aux lettres car le document risque de servir à emballer les épluchures de légumes sans être regardé; or “ça coûte très cher”. Ces activités ne sont pas toujours valorisantes et Jean-Philippe en a fait lui-même l’expérience: “j’ai été vexé dimanche sur le marché Saint-Marc car beaucoup de personnes ne prenaient pas le tract Macron, mais prenaient le trac Le Pen!”.»
«Au vieux clivage droite-gauche, Macron prétend substituer une opposition entre “celles et ceux qui croient au progrès, à la transformation radicale” et “celles et ceux qui ne veulent pas ces changements ou prônent le repli”»
On voit bien qu'Emmanuel Macron n'a jamais bossé à Pôle Emploi, lui (par Titiou Lecoq)
«Revenons donc à la proposition d’Emmanuel Macron. Il ne peut pas se rendre compte de ce que ça signifie son truc. Il faudrait démultiplier les moyens de Pôle Emploi. Parce que le droit de refuser une seule proposition, ça veut dire le droit à aucune erreur de la part de Pôle Emploi. Et bizarrement, dans son annonce, je n’ai pas trouvé les moyens humains et financiers qu’il allait mettre.»
Macron a un programme, mais ce qu’il propose est assez gênant pour qu’il le cache (par Claude Askolovitch)
«Si Macron se promène dans l’olympe de la pensée, ou dans la vacuité des sondages, c’est qu’il n’est que cette bulle? A force de décliner en boucle qu’il n’a pas de programme (pas encore révélé), c’est devenu une vérité médiatique, un mètre-étalon de banalité, qui passe des commentaires vite troussés aux propos de table, et entretient l’image irréelle. Lui, pendant ce temps, a une bonne tête de jeune Président, en Algérie où il vaudrait réconcilier. Cela compte? Macron serait vide. C’est idiot. Son programme existe, et mieux encore, son intention. Il l’a exprimée, plusieurs fois, par morceaux. Elle est dans son parcours, dans ce qu’il a porté. Il faut être paresseux pour attendre un document emballé, circonstanciel, qui dirait la vérité d’un homme: on sait qui il est, et ce qu’il veut.»
Qui sont les Français qui soutiennent Emmanuel Macron? (par Jérôme Fourquet)
«Emmanuel Macron ne peut donc pas être réduit au statut du candidat des CSP+ puisqu’il “mord” également très efficacement dans la classe moyenne. Le stéréotype de candidat de la “France d’en haut” mérite donc d’être fortement nuancé même si son électorat demeure clivé sociologiquement. Il n’atteint en effet que 14% auprès des ouvriers et des employés, soit un étiage pratiquement deux fois moins élevé que dans les classes moyennes et supérieures.»
Les quatre malentendus que recouvre le succès d'Emmanuel Macron (par Eric Dupin)
«Au vieux clivage droite-gauche, Macron prétend substituer une opposition entre “celles et ceux qui croient au progrès, à la transformation radicale” et “celles et ceux qui ne veulent pas ces changements ou prônent le repli”. Il entend ainsi rassembler les “progressistes”, qu'ils soient de droite ou de gauche. Cette présentation flatteuse ne saurait masquer qu'il est incontestablement le candidat le plus proche de la politique menée par François Hollande depuis 2012, impopulaire au point que le chef de l'Etat sortant n'a pas pu se représenter. Macron a participé activement à la préparation du programme du candidat socialiste élu à l'Elysée cette année-là.»
Le programme de Macron est raisonnable, faisable... Est-ce qu'il manque de flamme? (par Eric Le Boucher)
«Voilà aujourd’hui la macro de Macron. Il est européen, raisonnable, faisable. Manque de flamme? Si on revient sur ce passage des étoiles à la boue, trop rapide, on se dit que l’exercice n’était pas simple à faire au cours d’une seule interview. Surtout, Macron s’en prend aux racines du mal français, l’immobilisme des rentes et des statuts. Proposer l’Europe plutôt que la nation, la mobilité plutôt que la protection, l’entrepreneuriat plutôt que l’étatisme, ce n’est pas aller au sens du vent. Un exercice pédagogique d’un Macron à la Mendès.»
«Macron se contente d’enregistrer les doléances du client et de les reformuler pour ensuite proposer le plan d’action qui s’impose»
Bayrou peut-il aider Macron à percer dans la France périphérique? (par Gaël Brustier)
«Dans une campagne présidentielle aussi incertaine, l'impact d'un vote comme celui de la France rurale ne peut être négligé par aucun candidat: le désordre idéologique actuel impose en effet de s'adresser à l'ensemble des groupes sociaux. Le niveau important d'abstention annoncé pour l'instant dans les communes rurales est peut être le premier indicateur d'un positionnement plus incertain qu'il n'a jamais été.»
Emmanuel Macron est-il le Tony Blair français? (par Elie Cohen et Gérard Grunberg et Telos)
«Si Emmanuel Macron endosse largement ce programme, il n’épouse pas la défiance maladive de Tony Blair à l’égard de l’intervention économique de l’État et ne se prive pas de se livrer aux petits jeux du meccano industriel. Issu de la culture de la haute fonction publique française, il n’a pas les mêmes réticences que Blair, mais il n’en partage pas moins les grandes lignes de la vision blairiste. Tous deux refusent de considérer que le libéralisme, notamment économique, soit par nature une pensée de droite et, au contraire, estiment que la pensée progressiste doit s’en nourrir pour partie. Les entreprises n’étant pas considérées comme des ennemis et les diminutions d’impôts comme des cadeaux aux patrons mais comme des aides à la compétitivité.»
Emmanuel Macron n'est pas candidat, il est consultant à la présidentielle (par Jean-Laurent Cassely)
«Comme consultant, Emmanuel Macron affecte un devoir de réserve sur l’état de la France. Il se contente d’enregistrer les doléances du client et de les reformuler pour ensuite proposer le plan d’action qui s’impose.»
On juge beaucoup Emmanuel Macron sur sa parole, mais que disent ses actes? (par Gilles Bridier)
«Certes, Emmanuel Macron dénonce ces jeux politiques de la gauche et de la droite qui bloquent la société française et dont il a fait les frais à cette occasion. En attaquant le vieil ordre politique, il s’est même construit un fonds de commerce. Toutefois, d’autres avant lui ont sonné le glas de l’affrontement droite-gauche sans parvenir à lancer une nouvelle façon de faire de la politique. Ce qui explique certainement l’essoufflement de la démocratie en France. Mais il ne suffit pas de dénoncer. Et si elle est conforme au fonctionnement de la VeRépublique, la solution qui consiste à s’extraire du débat parlementaire n’est pas la façon la plus démocratique pour faire passer une loi.»
Le discours de Macron, un vrai renouveau du logiciel politique (par Eric Le Boucher)
«En Marche! Le rassemblement des progressistes. Cela résume tout. Le ministre de l'Économie a fait un remarquable discours à la Mutualité, remarquable parce qu’il réussit, sur le plan intellectuel, son pari, celui de “dépasser” les partis politiques. Il le fait en renouvelant le logiciel politique sur trois plans, celui du progrès “positif”, celui du libéral-social et celui du démocrate.»
Pour retrouver son programme, cliquez ici.
10.Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise)
Jean-Luc Mélenchon: la gauche, c'est lui? (par Jérémy Collado)
«Sa popularité, Mélenchon l'a construite sur une intransigeance qui ne l'a jamais quitté depuis la rupture de 2008. “Nous voulons rester socialistes, c'est pour ça que nous quittons le PS”, clamait-il. Sur le fond, il pensait que la social-démocratie était morte en France avant d'être née: le patronat était trop fort, les ouvriers disparaissaient, l'électorat prolétaire se disloquait en même temps que le Parti communiste français. Il fallait inventer un autre modèle, à la fois écologique, anticapitaliste, patriotique et socialiste.»
Le peuple ou la gauche? Ce qui sépare Hamon et Mélenchon (par Gaël Brustier)
«Jean-Luc Mélenchon incarne la partie de la gauche qui souhaite activer un autre clivage dans la société et donc définir un terrain plus favorable pour sa progression. Jean-Luc Mélenchon en lançant sa «France insoumise» s’est soustrait à l’héritage organisationnel et symbolique de la gauche radicale, parce qu’il analyse les conséquences du néolibéralisme comme des brouilleurs du clivage gauche-droite. Authentiquement “populiste de gauche”, cette stratégie additionnée aux difficultés du PS ouvre un espace politique et électoral réel au candidat Mélenchon.»
Vous aimez Mélenchon? Lisez-le vraiment (par Eric Le Boucher)
«La faille de Jean-Luc Mélenchon, c’est son projet, les 83 réponses qu’il apporte. La seule attaque qui porte contre Jean-Luc Mélenchon, je l’ai finalement trouvée, elle vient de lui-même. Lisez-le. Ne vous contentez pas des principes, des effets de manche, des grandiloquences, lisez le détail. Regardez les mesures une à une. La lecture provoque tantôt une franche rigolade, tantôt elle fait froid dans le dos à toutes les pages. Rien n’est étudié, calculé, faisable. Une inégalité? «J’éradique». Un pouvoir? «J’abolis». Les droits? «J’en donne» autant que tu veux. Des fuites de capitaux ? «Je terrasse». Une guerre? «Je convoque l’ONU» pour faire la paix.»
Manuel Bompard, le supercalculateur derrière Mélenchon (par Noé Michalon)
«L’ère du parti classique est révolue, argumente Bompard. Ce qui se substitue, c’est ce type de plateforme numérique : on se voit comme un parti de 270.000 personnes, et ça va augmenter. Mais on n‘organise pas une telle force de la même manière qu’un parti. On a créé des groupes d’appui, pour aider les gens à agir. Nous avons une bataille idéologique à mener, et il faut mener la contre-offensive avec une organisation et un programme, il y a une importante dimension culturelle, souligne ce lecteur de Gramsci.»
Qui est Chantal Mouffe, la penseuse qui inspire Hamon et Mélenchon? (par Gaël Brustier)
«La classe sociale ou les intérêts matériels ne sont pas les seuls éléments entrant en jeu dans le combat politique et dans la construction d’une volonté collective. La vision du monde est aussi forgée par d’autres combats, d’autres luttes, d’autres éléments présents dans la société. Ainsi Ernesto Laclau et Chantal Mouffe considèrent que des luttes comme les combats féministes, les luttes indigénistes (en Amérique latine), les luttes environnementales/ écologistes, les combats LGBT étant le produit d’un processus discursif, l’identité est construite, le “nous” est construit, et son essentialisation est impossible.»
Jean-Luc Mélenchon, l'homme qui cherche le salut collectif dans l'aventure personnelle (par Eric Dupin)
«L'orientation politique choisie par Mélenchon pour mener à nouveau bataille suggère un troisième problème. Il entend mettre en mouvement une “France insoumise” refusant les traités européens qui la corsètent aujourd'hui. Son projet est bien de promettre un “pays indépendant” en faisant vibrer la fierté nationale. “Notre pays peut marcher en tête de l'humanité”, n'a pas craint d'affirmer Mélenchon dans sa vidéo de lancement de candidature.»
«Mélenchon joue avec les nerfs des élites, parce que finalement, c’est à elles, qui ont la culture historique pour décoder ses références, qu’il s’adresse. Et tout cela ressemble de plus en plus à un jeu de rôles»
Dans les salons de discussions des soutiens de Mélenchon (par Gregor Brandy)
«Sur Les Insoumis, en revanche, on trouve une liste non-exhaustive contenant environ 25 projets, en cours ou finalisés, qui ont pour but de promouvoir le mouvement de Jean-Luc Mélenchon, de défendre ses propositions ou de s'attaquer à ses rivaux. “N'importe qui peut proposer une idée de projet, et ceci sans avoir nécessairement des compétences particulières, raconte Christophe. La personne peut juste apporter l'idée même si on préfère qu'elle prenne en charge son projet. Si elle le souhaite, elle peut faire appel à des contributions sur des parties précises.”»
Il faut regarder Jean-Luc Mélenchon (par Claude Askolovitch)
«Il y a longtemps encore, dans un déjeuner au Nouvel Observateur auquel j’assistais, Jean-Luc Mélenchon avait lancé à table un définitif «François Hollande n’aime pas la France», provoquant des regards offusqués et quelques gloussements. C’était dans les années 2000, et Mélenchon s’en était expliqué: Hollande, par ses choix européens, renonçant à la conflictualité sociale, déconstruisait aussi bien le socialisme que la République, à terme, et niait ce qui faisait notre pays. Il ne l’aimait pas. Nous, journalistes, l’avions écouté et puis résumé à cela, cet excès, cette dérision, ces mots qui galopaient en éclaireurs de sa pensée. Devant le poids d’un moment, on le regarde désormais, habitués. Habitués, et au-delà. Nous n’avons pas encore parlé politique avec Jean-Luc Mélenchon. Trop frileux peut-être. Cela viendra.»
La candidature du fondateur de Nuit Debout, la voie française vers le «populisme de gauche» (par Gaël Brustier)
«François Ruffin dresse le constat implacable du bilan d’un Parti socialiste qui aurait changé de nature en 1983 en adhérant au libéralisme. Ce n’est pas l’opposition de la “révolution” au “réformisme” qui motive Ruffin mais l’idée qu’il existe une gauche et une gauche qui a cessé d’être de gauche, le PS. C’est à un “populisme de gauche” –façon PODEMOS– que François Ruffin pense, tout en s’affirmant authentiquement “social-démocrate”, façon d’occuper l’espace traditionnel du PS en le chassant de ses dernières terres. Fakir publie un grand entretien avec Chantal Mouffe, la théoricienne du “populisme de gauche” et apporte son soutien à Jean-Luc Mélenchon, candidat de la “France insoumise”.»
Jean-Luc Mélenchon: «Pour moi, le bonheur, ce serait de ne plus m'entendre» (par Jérémy Collado, archive 2014)
«Dans la rue, les gens m’alpaguent, ils se sentent des droits sur moi. Et les journalistes se croient tout permis, comme des vaches sacrées. C’est dur, la politique. C’est un monde ultra-violent.»
Le populisme «vintage» de Jean-Luc Mélenchon, trop élaboré pour être efficace (par Jean-Laurent Cassely, archive 2013)
«Mélenchon joue avec les nerfs des élites, parce que finalement, c’est à elles, qui ont la culture historique pour décoder ses références, qu’il s’adresse. Et tout cela ressemble de plus en plus à un jeu de rôles. Car qui peut sérieusement penser que Mélenchon va arracher les têtes les ministres de l’Eurogroupe et les exposer sur des piques à l’entrée de Bruxelles. Mélenchon ressemble de plus en plus à ces théâtreux qui disent “bite” dans une mise en scène décalée d'une pièce du répertoire, pour choquer le bourgeois.»
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11.Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste)
Poutou, Arthaud: pourquoi la campagne des candidats trotskistes patine (par Gilles Bridier, archive 2012)
«De fait, sur les quelque 4.000 adhérents du NPA, la moitié aujourd’hui viendrait d’autres horizons que l’ex-LCR. Sans effet toutefois, à ce stade, pour Philippe Poutou, aux accents peut-être trop syndicalistes et pas assez politiques pour une présidentielle. D’autant que, au sein de la gauche antilibérale, il est éclipsé par les effets de manche de Jean-Luc Mélenchonà la tête du Front de gauche.»
Philippe Poutou et les conflits d'intérêts (par Grégoire Fleurot, archive 2012)
«Le candidat du NPA n'a pas grand-chose à déclarer, mais n'a pas pris la peine de transmettre une déclaration d'intérêts.»
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