La question de la participation des jeunes aux décisions publiques en France recèle un paradoxe: alors que les jeunes sont l’une des cibles privilégiées des actions publiques dans leur ensemble (dans les établissements scolaires, les équipements collectifs, les espaces publics, les transports en commun, par exemple), ils sont très peu consultés sur leurs attentes et leurs besoins.
Pourtant, souvent, ils sont insatisfaits des offres publiques qui leur sont proposées et les phénomènes de non-recours à cette offre sont importants (un jeune sur deux au moins selon l’Odenore). Evoquons, par exemple, le phénomène du décrochage scolaire, qui se situe aujourd’hui à 9,2% des 18-24 ans. Qui plus est, les dispositifs publics qui s’adressent aux jeunes, et en particulier les droits qui leurs sont accordés, sont complexes et mal connus de ces derniers.
Or, les jeunes sont très peu consultés lors de l’élaboration des dispositifs publics nationaux, régionaux ou locaux. Dans la mesure où, de plus, ils votent peu, ne sont que rarement inscrits dans les partis politiques, les syndicats ou encore les associations nationales, on connaît mal leurs attentes.
En outre, quand des procédures de consultation sont prévues, les jeunes qui siègent dans les instances ne sont pas nécessairement représentatifs de l’ensemble des jeunes ou, à tout le moins, des jeunes concernés par tel ou tel dispositif. On sait en effet que les jeunes qui siègent dans les formes les plus instituées de participation sont plutôt issus de milieux sociaux privilégiés.
Il est également courant que leurs préconisations (quand elles ont été récoltées) ne soient pas ou très peu prises en compte et que les jeunes soient, par conséquent, peu enclins à renouveler leur engagement auprès des pouvoirs publics.
Par ailleurs, leurs capacités à proposer des initiatives, à développer des solutions pour soutenir l’engagement d’autres jeunes ou encore pour mieux adapter l’offre publique sont peu reconnues par les pouvoirs publics qui peinent, soit à entrer en contact avec eux, soit à intégrer leurs demandes.
Et pourtant, ils s’avèrent remarquablement capables d’innover et de tester de nouvelles manières de développer l’action publique. Une recherche européenne en cours portant sur la participation des jeunes au niveau local met ainsi en évidence ces capacités dans de nombreux domaines (la lutte contre l’exclusion sociale, l’emploi, la culture, les loisirs…).
Par conséquent, pour éviter de proposer des actions publiques décalées par rapport aux attentes et aux besoins des jeunes, ce qui a des effets à la fois en termes financiers et du point de vue des parcours d’intégration de ces derniers, il faut les consulter de manière systématique et tenir compte sérieusement de ce qu’ils proposent. Les moyens pour réaliser ces consultations ne manquent pas: évoquons les conseils et autres instances délibératives mais également des formes proposées par les jeunes eux-mêmes comme les universités libres organisées actuellement par le MRJC ou encore les consultations publiques à l’initiative d’Animafac.
Bien sûr, il convient de respecter quelques précautions, par exemple s’assurer de rassembler des types de jeunes les plus variés possibles, engager la réflexion dès le début des processus, respecter des modes de délibération égalitaires impliquant des méthodes de co-construction, que les décideurs s’engagent à tenir compte des recommandations ou à tout le moins à faire un retour aux participants sur l’usage qui en sera fait, maintenir un dialogue sur le temps de la décision.
Cependant, vu l’ampleur des enjeux, il y a urgence à prendre cette question très au sérieux de la part des décideurs!