France

Les électeurs de gauche sont en train de se faire enfler

Temps de lecture : 2 min

Vous êtes de gauche, vous vous pensez plutôt gentils, mais visiblement les politiques eux, vous voient comme des cons.

Benoît Hamon dans «L'Émission politique», à Saint-Cloud, le 9 mars 2017. 
GABRIEL BOUYS / AFP
Benoît Hamon dans «L'Émission politique», à Saint-Cloud, le 9 mars 2017. GABRIEL BOUYS / AFP

Aujourd’hui, je souhaite m’adresser à vous, gens de gauche.

Ça va bien? Vous arrivez à vous allonger? Ça ne vous fait pas trop mal cet énorme poignard planté dans votre dos?

Vous êtes de gauche, vous vous pensez plutôt gentils, mais visiblement les politiques eux, vous voient comme des cons. Pire, les politiques «de gauche» vous prennent pour des demeurés. Ces derniers temps, on s’est tous bien payé la tête des LR, mais vous avez vraiment l’impression que le PS fait tellement mieux?

Soyons clairs. Ce parti se targue de modernité avec ses primaires –franchement, la première fois où ils en ont organisées on aurait cru qu’ils avaient découvert l’électricité. Des électeurs de gauche s’emmerdent à aller voter deux dimanches pour ça. Ils choisissent un candidat –a priori plus pour son programme que pour son extraordinaire magnétisme personneL. Et ensuite, les cadres du parti font la moue, boudent un peu, et puis finalement au mieux font preuve d’un silence assourdissant, au pire vont soutenir un autre candidat.

Vous avez pas l’impression qu’ils se foutent allègrement de votre gueule? La semaine dernière, on a tous joué à actualiser le compteur des lâcheurs de Fillon, mais on peut aussi s’amuser avec le compteur des soutiens socialistes à Macron (mis au point par des fillonistes). On fait preuve d’une indulgence suspecte envers le Parti socialiste. C’est juste dingue de voir ce parti ne pas soutenir son candidat, comme si c’était normal. Vous me direz, ils avaient fait la même chose avec Ségolène Royal dont l’appareil du parti avait soigneusement savonné la planche pendant toute la campagne. Mais elle était clairement ciblée comme femme, victime du sexisme.

Cette fois, ils trouvent le programme de Hamon «dangereux». Sérieusement? Ils expliquent que eux, ils vont choisir Macron parce qu’ils sont réformistes. Alors là, si vous avez un minimum de culture politique de gauche, vous devez vous étouffer. À les entendre, on a l'impression que Hamon, c'est un dangereux révolutionnaire, une réincarnation de Che Guevara. Rappelons qu’en gros, il veut un RSA amélioré, pas la collectivisation des moyens de production. Il rêve d’éoliennes et de panneaux solaires, pas d’insurrection armée pour prendre le pouvoir. Benoît Hamon est social démocrate. Le mec a été ministre de François Hollande. Il n’est pas marxiste-léniniste. Mais que les cadres du PS ne le jugent pas assez réformiste, ça en dit long sur leurs idées politiques.

Surtout, ça dit qu’ils aiment bien la démocratie quand les gens votent comme eux.

Alors certes, j’entends bien leur argument d’éviter le FN à tout prix. Mais d’un point de vue intellectuel, c’est quand même sacrément paradoxal de fouler aux pieds le processus démocratique de leur propre parti pour éviter la candidate du FN parce qu’elle n’est pas assez démocrate. En outre, leur calcul ressemble à celui de mecs enfermés dans une énorme bulle de savon. Leur idée que les citoyens vont choisir Macron plutôt que Le Pen me parait boÎteuse. Pour beaucoup, Macron = candidat des banquiers (désolée du raccourci mais les électeurs votent d’après une somme d’impressions plutôt que rationnellement). Or, entre Macron le banquier et Le Pen, pas certaine que la majorité des électeurs fera le même choix que ces cadres du PS.

Mais surtout, ils n’ont pas l’air de se rendre compte une fraction de seconde de la manière dont ils traitent leurs électeurs. Les électeurs de gauche se sont déjà fait bien enfler par François Hollande, ils ont avalé des couleuvres de type tropicales pendant cinq ans, bonne pâte, ils se traînent à leurs primaires, et là on leur dit «ah non, désolé, vous n’avez pas voté comme il fallait».

Bravo le Parti socialiste, venez donner des leçons de démocratie à la droite, drapez-vous dans votre lutte pour sauver la France d’un parti anti-démocratique.

Ce texte est paru dans la newsletter hebdomadaire de Titiou Lecoq. Pour vous abonner c'est ici. Pour la lire en entier:

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