France

Il faut vraiment plaindre Penelope Fillon

Temps de lecture : 3 min

Le reportage d'«Envoyé Spécial» a accompli un exploit: nous montrer à quel point Penelope Fillon était à plaindre.

Le 29 janvier 2017, François Fillon et sa femme Penelope Fillon Eric FEFERBERG / AFP
Le 29 janvier 2017, François Fillon et sa femme Penelope Fillon Eric FEFERBERG / AFP

Comme dirait Mme Lenglet, mon ancienne prof d'espagnol, je voudrais tirer la sonnette d'alarme.

Penelope Fillon vit un calvaire. Certes un calvaire bien payé mais un calvaire. Un Golgotha. Bref, tout ce qui porte un nom qui évoque la douleur, voire même les douleurs.

Je suis sérieuse. Mais attention, ça ne dure pas depuis quelques jours.

Le puits de douleur

Penelope Fillon est un puits de douleurs depuis des années et personne ne semble jamais s'en être inquiété. Hier soir, n'écoutant que ma conscience professionnelle et mon amour de la léthargie, j'ai regardé «Envoyé spécial». J'ai vu l'interview de 2007. Je m'attendais à avoir des informations sur une affaire d'emplois fictifs, à la place, j'ai écouté une femme au bord du gouffre. C'était presque gênant.

Je ne sais pas pourquoi ce jour-là elle a décidé de se confier, je ne sais même pas si elle a eu conscience de ce qu'elle disait malgré elle, de ce que ses mots révélaient. Une femme qui semblait ne plus avoir de but dans l'existence, une femme qui transpirait une solitude insupportable, et surtout une femme qui se sentait méprisée par ses proches et, en premier lieu, par ses enfants.

Cette femme a élevé cinq enfants plus ou moins seule (François Fillon a dit dans plusieurs interviews qu'il n'avait pas été présent pour eux, donc pour elle). Elle a renoncé à bosser pour eux (avec les problèmes de socialisation et d'estime de soi que cela peut poser dans certains cas). «Si j'avais pas eu le dernier, j'aurais travaillé.» Elle a eu le premier à 26 ans et le dernier à 45. Et elle a l'air convaincue qu'ils la prennent pour une conne:

«Je leur dis je suis diplômée, j'ai passé le barreau, je ne suis pas stupide mais bon.»

Mais bon, ces petits ingrats, ils n'en ont rien à foutre. Ils la prennent pour une conne (ou du moins, c'est l'impression qu'elle a).

L'enfer de la vie domestique

Alors que son mari vient de devenir Premier ministre et qu'on lui demande ce qu'elle fait de ses journées, elle a un sourire à faire pleurer les pierre avant de répondre qu'il y a toujours un tas de trucs embêtants à faire. Et on comprend qu'elle parle de trucs de la maison, des enfants.

Si sur une échelle, vous mettez d'un côté «développement personnel», à l'exact opposé vous pouvez écrire «Penelope Fillon». Après, pour essayer d'être positive elle évoque des expos à voir, des musées à visiter. Là, je l'ai parfaitement imaginée aller seule dans un musée pour essayer de se convaincre qu'elle n'avait pas complètement perdu sa journée et traîner son vide existentiel de salle en salle. Elle a aussi parlé de cours de littérature anglaise à la fac. Et j'ai imaginé les remarques vaguement méprisantes de son entourage «ah, c'est bien, tu t'occupes un peu, c'est vrai que t'aimes bien lire».

Mais quelle horreur! Ah oui, et effectivement, elle dit bien qu'elle ne s'occupe en rien du travail de son mari. Et là, j'ai pensé deux choses. (Ça fait beaucoup, je sais.) D'abord, que cet abruti aurait dû la faire vraiment travailler. Il lui fait signer un contrat d'embauche, il la rémunère, mais pourquoi il ne l'a pas poussée à devenir vraiment assistante parlementaire? Ça lui aurait sûrement fait un bien fou.

Ensuite, j'ai été étreinte d'un terrible soupçon. Je m'étais déjà dit que quand tu filais un emploi fictif à ta femme, ça me paraissait logique de la prévenir histoire qu'elle ne dise pas dans plusieurs interviews qu'elle n'a jamais travaillé pour toi. Pourquoi cette erreur? À moins que cette femme soit tellement considérée comme quantité négligeable que, du coup, tu ne lui expliques rien. Et des années plus tard, à cause de toi, cette femme se retrouve au milieu d'un scandale politique qui la dépasse largement.

Et là, toi, tu prends sa défense face à ces attaques odieuses. #foutagedegueule (En la tenant par le cou, je ne sais pas si vous avez remarqué le nombre de photos sur lesquelles François Fillon tient son épouse par le cou, c'est flippant.) Penelope Fillon n'est pas de la trempe d'une Bernadette Chirac. Elle est l'anti-Xavière Tibéri ou Isabelle Balkany. Elle a quelque chose de Mélania Trump, une forme de dolorisme extrême.

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