Il y a quelques jours, l'institut américain Gallup publiait un sondage indiquant que Donald Trump avait la plus faible cote de popularité des quatre derniers présidents-élus à quelques jours de leur inauguration. Quartz notait alors que l'ancien candidat républicain et Barack Obama laissaient tout les deux très peu indifférents. En effet, si pour Bill Clinton et George W. Bush, les pourcentages d'Américains n'ayant aucun avis sur les deux hommes naviguaient autour de 15%, pour les deux derniers présidents élus, ce taux tombait à 5%. Quartz estime que cela peut être une preuve d'à quel point ces deux présidents étaient polarisants, mais évoque également une autre hypothèse:
«C'est peut-être le résultat d'internet et des réseaux sociaux, qui rendent l'accès à l'information plus facile, et a permis à plus de gens de partager leur avis et de choisir un camp.»
Et ce point-là ressort particulièrement dans un article universitaire publié par trois chercheurs, Yphtach Lelkes, Gaurav Sood, et Shanto Iyengar, en décembre 2015, et qui est publié dans le numéro de janvier 2017 de l'American Journal of Political Science. Les trois hommes se sont intéressés à l'effet de l'internet haut débit sur l'émotion partisane en politique.
Ils sont partis du principe qu'avec l'internet haut débit, les Américains passent en moyenne beaucoup plus de temps sur internet (au moins 1.300 minutes par mois, selon une étude datant de 2007), et sont donc potentiellement plus à-même de passer du temps sur des sites partisans. Et ils se sont intéressés sur les conséquences que cela peut avoir.
Dans leur étude, ils ont découvert que plus les conditions (régulations et topographie) étaient réunies pour que les infrastructures soient présentes et que les citoyens américains utilisent un internet à haut-début, alors plus l'animosité partisane était forte, explique le Boston Globe.
«De plus, les individus qui possèdent un internet à haut débit (plutôt que du bas débit) ont plus de chances de se rendre sur des sites partisans.»
Yphtach Lelkes, Gaurav Sood, Shanto Iyengar
Pas la seule raison
Dans leur article, les chercheurs expliquent que les données à leur disposition «suggèrent fortement que l'accès à un internet à haut débit augmente l'exposition aux médias partisans et aux programmes d'information».
«Nous pensons que cette augmentation d'exposition aux programmes partisans en particulier et aux programmes d'affaires publiques plus généralement, explique la relation entre l'accès à un internet à haut débit et la polarisation émotionnelle».
Pour autant, comme l'explique Yphtach Lelkes, chercheur à l'université d'Amsterdam, lors d'une conférence, en octobre 2015, s'ils ont bien réussi à montrer que l'accès à un internet à haut débit a provoqué la polarisation des deux camps, et pousse vers plus d'exposition à ces informations partisanes, «nous ne pensons pas que c'est la seule raison pour laquelle l'animosité entre les partis a augmenté».
Reste que comme ils le concluent dans leur article, «cette étude montre que l'environnement des nouveaux médias a contribué à l'accroissement de l'animosité partisane et qu'une plus grande exposition aux sources d'information biaisée en est la cause probable. Alors que les Américains ont un meilleur accès aux fournisseurs d'informations partisanes, nous pouvons anticiper plus de “peur et dégoût” entre les partis».