Il était infiniment plus facile de choisir une tenue pour mon mariage que pour mon divorce. La première robe de mariée que j'ai essayée était La robe, une «Guinevere» d'Elizabeth Filmore avec des manches à gantelet (dans un style plus romantique que Renaissance). Quand ma meilleure copine masculine Manfred m'a vue dedans, il a chuchoté tout simplement: «Inévitable». Aussi inévitable, sans doute, que le divorce.
Mon coeur a pris quelques coups, mais mon sens de la mode reste intact. Faire une fixation sur ce qu'il fallait porter le jour de mon divorce peut sembler naïf et déplacé... mais mon apparence physique était la seule chose que je pouvais contrôler le jour de ma comparution devant le juge. Evidemment, je savais très bien que revoir mon mari allait me briser le cœur; mais je n'avais aucune idée de ce que le juge allait dire ou faire. Plus troublant encore, je n'avais aucune idée de ce que j'allais dire ou faire. Donc, le mieux pour moi, c'était de trouver la bonne tenue pour l'occasion.
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Je n'avais pas besoin d'avoir l'air impécunieuse, car je ne demandais pas un sou: nous n'avions pas d'enfant ou de propriété en commun; en effet, nous n'avions jamais partagé un numéro de téléphone ou même une adresse postale. (Ce n'est pas la peine de chercher beaucoup plus loin la source de nos problèmes conjugaux ...). Je suis entrée dans le couple avec mes diamants, je suis repartie avec.
En revanche, il fallait que je sois au top du point de vue physique. Je suis à New York et il est à L.A., et cela faisait 10 mois qu'on ne s'était pas vus -ce qui est long quand vous êtes ensemble depuis 10 ans. Je voulais avoir l'air mince. J'ai donné à cet homme les années les plus minces de ma vie. J'avais besoin d'une robe qui dise: «Regarde, chéri, c'est à ça que tu as renoncé... bien que tu aies informé tous nos amis en commun que ta nouvelle copine, qui a 10 ans de moins que moi, est mannequin et pose pour des maillots de de bain».
Pendant des semaines, j'ai fait dans ma tête l'inventaire de ma garde de robe. Au début, je pensais porter une de mes robes préférées, quelque chose de fiable, mais je ne voulais pas non plus lui jeter un sort vaudou. Je ne voulais pas tâcher une robe drapée Diane von Furstenberg avec cette histoire. Ou devais-je porter quelque chose de nouveau - et la baptiser pour toujours «la robe du divorce»? Valait-il mieux aller chez Zara et acheter quelque chose de présentable puis jetable? Mais cette idée me semblait un peu trop être une métaphore de notre mariage.
Incapable de décider toute seule, j'ai demandé les avis de ma famille et de mes amis.
Beaucoup de gens m'ont conseillé de ne pas porter du noir - à part mon père, qui m'y a encouragée parce que, selon lui, «ce chiot est enfin mort». Mon frère m'a envoyé un SMS: «Pas style vulgaire L.A. Style NY très classe. Sexy mais smart, comme dans Law and Order! Sors souvent du tribunal pour prendre des appels». Le SMS de mon autre frère disait, «Quelque chose de divin, genre Sex and the City, peut-être en rouge! Faut surtout être super bien coiffée.» ( Il faut savoir qu'un de mes frères est straight, l'autre est gay. Moi je dis ça...Je vous laisse deviner.)
Passer devant un juge des divorces semblait inspirer à mes copines des fantasmes de mode des années 40, non seulement pour moi, mais pour elles-mêmes. Jo, productrice, me conseillait le rôle d'une héroïne tragique et a insisté pour que je me présente devant le juge avec mon visage caché par un voile noir dramatique. Rien n'allait empêcher mes copines (toutes actrices) Kathleen, Julie Ann et April, d'acheter d'énormes chapeaux et de longs gants et de se consumer de rage à l'arrière de la salle du tribunal. Rien... si ce n'est la nécessité, pour les unes, de déposer leurs enfants à l'école, et, pour la dernière, d'aller jouer la doublure de Jenna Elfman. (On était quand même à L.A.)
Après tous ces conseils, je penchais pour une robe Black Halo que j'avais achetée pour apparaître dans l'émission The O'Reilly Factor. Très serrée, en toile de jean indigo - chic mais stricte. Je m'étais attaquée à un homme intransigeant dans cette robe! Mais j'ai changé d'avis lors d'une séance d'essayage tard dans la nuit alors que je faisais mes valises tout en essayant mes différentes tenues. Vous vous souvenez de cette scène, dans Sex and the City (le film) lorsque Carrie essaie tous ses vieux habits en compagnie de ses copines et qu'elles s'amusent comme des folles? C'était ça. Sauf que j'étais toute seule, qu'il n'y avait pas de musique et que, finalement, c'était beaucoup plus pathétique qu'une comédie romantique.
Finalement, de guerre lasse, voici ce que j'ai porté: une robe Nanette Lepore en soie de couleur noire, beige et pourpre qui évoquait à la fois un motif léopard et des plumes de paon- une combinaison qui avait la bonne dose de yin et de yang. Je l'avait déjà portée une fois dans une Mecque gastronomique de Napa Valley nommée «The French Laundry», et j'ai trouvé agréable la légère odeur de lavande et de truffes qui l'accompagnait.
J'ai porté la croix celtique en or de ma mère décédée, la bague de fiançailles de mon arrière-grand-mère, et des talons qui ont résonné tout le long du couloir du 8e étage de la cour de Los Angeles au rythme de mon cœur qui battait. Mes ongles de pieds étaient vernis en «Modern Girl» et mes ongles de mains étaient en «Starter Wife.» Mon ami Brian m'a vraiment encouragée à porter «un string, uniquement un string.» J'ai plutôt choisi une petite culotte Hanky Panky fuchsia en dentelle avec des petits coeurs pourpres. Le texto de mon frère gay au sujet de Hanky Panky (je lui dis tout): «tu mérites bien une la légion d'honneur pour avoir survécu à cette histoire.»
Et après tout cela... mon mari ne m'a même pas regardée. Soit, on s'est regardés pendant une nanoseconde à une distance de 20 mètres au moment où j'approchais de la salle du tribunal. Il était très beau, comme toujours. J'ai eu le souffle coupé, de le voir, cet homme que j'ai aimé si profondément et que j'ai épousé à la Chapelle Rosslyn, un jour de juin lors d'un orage, le rosaire de ma mère à la main. Après ce premier moment de reconnaissance, lors des 45 minutes suivantes, malgré tous mes efforts pour attirer son attention, déplacer ma chaise dans l'espoir d'établir une connexion, il ne m'a jamais regardée.
Tout était dit à ce moment là en fin de compte. La leçon que j'avais à tirer de notre relation —celle qui a été déclarée terminée une nouvelle fois ce jour-là, avec un complet manque de tact— c'était qu'il fallait que j'apprenne à être maîtresse de moi-même.
Je lui ai toujours demandé trop— de m'aimer plus. Et me voilà toujours en train de lui demander quelque chose. Je voulais qu'il —quoi?— qu'il me voie, m'admire, me désire, me regrette, m'aime ... Finalement, il vaut mieux qu'il ne m'ait pas regardée. Cela aurait été trop difficile, trop triste, trop compliqué s'il m'avait vraiment vue, même après tout le temps et toute l'énergie que j'ai mise à décider de ma tenue. Ironique, peut-être. Ou inévitable.
Faith Sailie, de DoubleX
Traduit par Holly Pouquet.
Image de une: Mannequin chinoise déguisée en démon lors d'un spectacle à Pékin. REUTERS/Christina Hu
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