Aux États-Unis, il est de coutume que les comités éditoriaux des grands journaux choisissent officiellement un candidat aux présidentielles. Certains quotidiens ont commencé à publier leurs préférences, et il y a déjà eu quelques surprises: plusieurs journaux pro-républicains depuis des décennies ont refusé d'apporter leur soutien à Donald Trump.
Le dernier en date est le Dallas Morning News, qui, après avoir appeller à voter républicain depuis 1968, s'abstient cette année. Le 6 septembre, le comité éditorial du quotidien a publié un article intitulé «Donald Trump n'est pas un républicain» qui se termine par une condamnation cinglante du candidat:
«Donald Trump n'est pas qualifié pour être président et il ne mérite pas votre vote.»
La direction du journal fait la liste de toutes les raisons qui font que, selon eux, Trump n'est pas un conservateur. Avec ses projets autoritaires en matière d'immigration (déportations massives, interdiction des musulmans), il ne correspond pas au respect des libertés individuelles défendu par les conservateurs, et son protectionnisme économique est à l'opposé du libre-échange soutenu par l'establishment républicain. Quant à sa politique étrangère, elle est dangereuse et imprévisible:
«Ses projets isolationnistes sont faits pour être des slogans plutôt que des vraies démarches politiques: inviter les Russes à s'immiscer dans nos élections, bombarder le Moyen-Orient en un tas de poussière, se retirer de l'Otan.
Il n'est pas aisé de décrire sa doctrine, tant Trump passe facilement d'un bord à l'autre, parfois en une seule journée. Quoi qu'il en soit, ses idées sont tellement éloignées des principes républicains qu'un nouveau mot a été créé pour les décrire: le Trumpisme.»
Le comité ne va pas jusqu'à soutenir Hillary Clinton, mais en juillet, le Houston Chronicle, un autre journal texan habitué à soutenir les républicains, avait franchi cette ligne et appelé à voter pour la candidate démocrate:
«Sur les questions importantes, il n'y a aucune comparaison en termes de réflexion, de précision et de pragmatisme.»
La description de Trump était particulièrement sévère:
«N'importe quel défaut de Trump –son tempérament imprévisible, ses pratiques douteuses en matière de business, son racisme, ses inclinations autoritaires à la Poutine et sa démagogie populiste, son mépris pour l'État de droit, son ignorance– suffit à le disqualifier.
Le commentaire qu'il a fait pendant la convention “je suis le seul à avoir les solutions” devrait faire trembler tous les Américains. Nous pensons qu'il représente un danger pour la République.»
Plusieurs autres quotidiens qui avaient soutenu Mitt Romney en 2012 ont eu la même réaction, notamment le New York Daily News et le Richmond Times-Dispatch en Virginie.
Cette année, le tabloïd new-yorkais avait qualifié les supporters de Trump de «zombies sans cervelles», donc le choix de Clinton était peu surprenant. Quant au comité éditorial du Richmond Times-Dispatch, il a appelé à voter pour Gary Johnson, le candidat libertarien.
«Ni Donald Trump ni Hillary Cinton ne possèdent les critères moraux et professionnels fondamentaux que nous attendons d'un président américain.»
Au-delà des comités éditoriaux, on ne compte plus les articles écrits par des commentateurs républicains expliquant que Clinton est préférable à Trump. Un récent article publié dans le Wall Street Journal expliquait que la candidate démocrate était le seul «espoir pour les conservateurs» car «la droite peut survivre à des présidents de gauche mais Trump tuera ses meilleures idées pour une génération.»