Le 15 septembre prochain, cela fera cinq ans et demi que la Syrie est plongée dans une guerre civile qui a fait au moins 400.000 morts, selon l'estimation la plus conservatrice, et des millions de réfugiés et de déplacés. Quand verra-t-on se terminer cette «horreur sans fin», selon l'expression récemment employée par The Economist?
Le New York Times consacre ce week-end un article passionnant à cette question où, en s'appuyant sur les travaux de chercheurs, il liste toutes les raisons pour lesquelles un conflit comme celui-ci pourrait durer très longtemps: l'intervention des grandes puissances dans le conflit ralentit l'épuisement des protagonistes locaux, permet au camp en voie de perdre de se «refaire» et diminue l'incitation à ménager les civils, ouvrant la voie aux pires exactions; la peur d'une défaite finale et d'une redéfinition post-guerre du pays est si forte que l'incitation au statu quo est puissante; le pouvoir (le gouvernement de Bachar el-Assad, appuyé sur les alaouites) est minoritaire et l'opposition divisée; une occupation internationale serait pratiquement obligatoire en fin de conflit, et personne n'en a envie après les épisodes afghan et irakien...
La médiatisation du calvaire du petit Omran Daqneesh a récemment relancé la réflexion autour d'une fin, bien hypothétique, de la guerre. Le 19 août, USA Today listait ainsi une série de raisons de la prolongation du conflit qui recoupent d'assez près celles citées par le New York Times: les divisions irréparables du pays, le fait qu'aucun acteur ne soit assez fort pour l'emporter, l'intervention des puissances étrangères ou encore le fait que l'implication de deux organisations terroristes (al-Qaida et le groupe État islamique) rend les décisions des grands encore plus compliquées à prendre. En septembre 2015, le chercheur Michael O'Hanlon listait lui dans le Washington Post quatre scénarios possibles de fin de conflit –la victoire d'un des acteurs, l'intervention décisive d'une puissance étrangère, un compromis négocié ou une partition– et expliquait que seul le quatrième était crédible.
Mais même lui paraît encore lointain. En mars dernier, alors qu'un cycle de négociations était en cours à Genève, le site The Atlantic avait dressé un parallèle avec l'année 1942 de la Seconde Guerre mondiale quand, après le débarquement allié en Afrique du nord, Winston Churchill déclarait: «Ceci n'est pas la fin. Ce n'est même pas le début de la fin. Mais c'est, peut-être, la fin du début.»