Le mardi 23 août, une femme portant un simple hijab a été sommée par la police municipale de quitter une plage de Cannes ou de payer une contravention, faisant une nouvelle fois rebondir la polémique sur les arrêtés municipaux interdisant le port du burkini sur les plages. Depuis la validation, dix jours plus tôt, de l’arrêté municipal cannois, celle-ci est largement relayée par la presse. Pourtant, les articles publiés dans les journaux sont bien difficiles à illustrer alors que mardi, 21 communes concernées sur 26 n'avaient toujours procédé à aucune verbalisation.
«On écrit pas mal de choses sur le sujet, mais nous n’avons pas vu beaucoup de burkinis», s'amuse Francis Kohn, directeur de la photo à l'AFP. Aucune des grandes agences de presse ne dispose de photographies de femmes portant ce vêtement sur une plage française. Reuters met à disposition trois images réalisées en 2007, en Australie. L’AFP propose des photos prises en Tunisie, en Algérie ou également en Australie, sur des plages ou dans une boutique de vêtements. Et Associated Press n'a qu'une image prise en France, une capture d'écran d'une vidéo prise en août à Marseille.
«Être très chanceux»
L'AFP a envoyé des photographes sur les plages, notamment à Cannes et à Nice, «mais jusqu’à présent, aucun d’eux n’a pu voir de femmes en burkini. Et nous ne pouvons pas mettre des photographes en permanence sur toutes les plages», continue le directeur de la photo.
Associated Press met en avant la même raison: il faut «être très chanceux pour trouver une femme se baignant en burkini», explique Laurent Rebours, chef du service photo de l'Associated Press à Paris. Ce dernier complète avec un argument budgétaire:
«Sachant que mon photographe basé à Marseille était en vacances à cette période et que celui basé à Nice était en arrêt maladie, ma direction à Londres n’a pas jugé bon d’engager (et payer) des freelancers à la recherche d’hypothétiques femmes se baignant en burkini, sachant que nous avions en main un visuel via la capture d’écran d’une vidéo avec le nom et l’age de la personne filmée.»
Trois femmes
Certain(e)s photographes ont cependant réalisé des reportages sur le sujet. C'est le cas d'Eléonora Strano pour Le Monde ou de France Keyser, envoyée par Libération à Marseille le 16 août. Cette dernière raconte s'être rendu «sur la plage des Catalans. C’est une plage où tout le monde va, avec une vraie diversité de personnes. Comme pour n’importe quel reportage, je vais discuter avec les gens avant de faire les photos car je photographie au 35 mm. Des femmes ont accepté que je les photographie sur la plage et lorsqu’elles se baignaient en burkini».
France Keyser a publié sur le site de l'agence Myop cinquante-neuf photos issues de ce reportage (les images sont visibles ici), mais ces femmes n'étaient que «trois, sur des centaines de personnes».