Eugène Rwamucyo, le médecin de l'hôpital de Maubeuge recherché par Interpol depuis 2006 pour génocide et crimes de guerre, aurait bénéficié de l'appui de Claude Guéant, alors directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, pour régulariser sa situation en France.
Le Monde révélait vendredi 16 octobre l'histoire étonnante qui avait abouti à la divulgation du passé du docteur. Une de ses patientes, qui avait mal pris une remarque désobligeante de Rwamucyo à propos de son embonpoint, est allée se renseigner sur Internet pour «voir s'il n'y avait pas des trucs sur lui».
Google a fait le reste: recherché par Interpol depuis 2006 pour génocide et crimes de guerre, l'ancien médecin-chef du centre universitaire de santé publique de Butare (sud du Rwanda) fait partie des quinze génocidaires présumés, présents en France, contre lesquels une plainte a été déposée par le collectif des parties civiles pour le Rwanda, association qui défend les victimes du génocide des Tutsi en 1994.
Dans cet article, le député du Nord (UMP) Thierry Lazaro, avait admis avoir aidé le docteur rwandais, évoquant des «interventions en haut lieu» et affirmant avoir «bénéficié de la compréhension du ministère de l'intérieur».
Mardi 20 octobre, interrogé par Nord Eclair, le député persistait: «Je l'ai reçu fin 2005. Il a eu l'honnêteté de me dire qu'il était sous le coup de recherches par Interpol, manipulé à ses yeux par le régime rwandais de Kigali. Il m'a dit n'avoir jamais participé au génocide», ajoutant qu'il «n'a pas été le seul parlementaire à intervenir auprès du directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur de l'époque (Nicolas Sarkozy)». Qui n'était autre que Claude Guéant, actuel secrétaire général de l'Elysée.
Le nom d'Eugène Rwamucyo apparaît dans plusieurs ouvrages traitant du génocide rwandais, rapporte Rue89: d'après le livre «Rwanda 1994, les politiques du génocide à Butare», de l'historien André Guichoua, le médecin aurait coordonné le Cercle des républicains universitaires «regroupant les extrémistes hutus les plus actifs» à Butare, dans le sud du pays. Il est également accusé dans une enquête d'Alison Des Forges et Human Rights Watch. Le statut de réfugié lui avait été refusé en raison des soupçons qui pèsent contre lui.
Malgré ces écrits accablants, «Eugène Rwamucyo a bénéficié d'une totale impunité depuis son arrivée en France, dénonce Rue89. Bien plus il se révèle très actif, participant à différents colloques ou conférences qui dénoncent l'actuel régime de Kigali. Tout en militant pour une relecture du génocide rwandais. [...]Pourquoi a t-il fallu attendre qu'une infirmière découvre par hasard en octobre 2009, le passé d'Eugène Rwamucyo pour que le scandale éclate et que le directeur de l'hôpital de Maubeuge procède samedi dernier a une suspension conservatoire en attendant l'issue de l'affaire?»
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