Pour l'instant, il y a deux manières de commenter ce qu'il s'est passé cette nuit au club Pulse d'Orlando. La première, évidente, c'est la surprise et l'effroi quand on se réveille et qu'on découvre sur Twitter le chiffre de vingt décès et des dizaines de blessés qui, quelques heures à peine après, atteint le chiffre de cinquante morts et autant de blessés. Le triste de record de «pire fusillade» de l'histoire récente des États-Unis concerne donc la communauté homosexuelle.
Déjà, sur Facebook et ailleurs, les gens disent «Vous voyez ce que c'est d'appartenir à une minorité sexuelle» faisant le lien avec les assassinats continuels de personnes trans à travers le monde, largement peu relayés par les médias. Omar Saddiqui Mateen vient de voir deux hommes s'embrasser, deux jours après il déverse son immense homophobie en tirant de près sur des gays, dans le noir. Il faut beaucoup de rage ou de folie pour s'armer et se diriger vers le club gay le plus proche, dans un acte de vengeance qui ressemble beaucoup à ce qu'il s'est passé au Bataclan le 13 novembre dernier. Ça s'est passé la veille de la Gay Pride de la ville.
Compassion et communication
La première réponse évidente, c'est la compassion manifestée partout par les leaders gays, les politiques et les chefs d'État. Orlando, tuerie exceptionnelle, va devenir le symbole de l'homophobie de tous les jours. Oui, l'homophobie régresse dans certains pays, mais partout les chiffres de cas de violence envers les personnes LGBT restent élevés, en France aussi. Cela touche toutes les personnes qui subissent de mauvais traitements à cause de leur identité.
Il y aura les messages poignants. Et déjà d'autres beaucoup plus formulaïques, qui nous font lever les yeux aux ciel. Personnellement, récolter 800 retweets en écrivant une phrase totalement dénuée de message sortant de l'ordinaire (celui de Manuel Valls) me met mal à l'aise, ainsi que les platitudes des rares personnalités gays qui ont fait leur coming out en France (celui de Jean-Luc Romero).
Compassion et solidarité avec le peuple américain. En frappant la communauté gay, l'attaque effroyable d'Orlando nous atteint tous.
— Manuel Valls (@manuelvalls) 12 juin 2016
L'#homophobie a tué 50 victimes. Mes pensées pour elles et leurs proches. L'immonde #homophobie ne cessera t-elle jamais ? #Orlando
— Jean-Luc Romero (@JeanLucRomero) 12 juin 2016
Mais l'effroi est réel et beaucoup d'entre nous ne regarderons pas ce qui est dit à la télé ou ailleurs. Il faudra s'attendre à un déluge d'échanges sur les réseaux sociaux. Exactement comme à chaque grand décès désormais. Et là, nous sommes confrontés à un sujet, en tant que gays, qui est très difficile à suivre. On va dire tout et n'importe quoi. On a déjà eu ça pendant les longs mois de discussion de la loi sur le mariage pour tous, non merci.
Division et instrumentalisation
La seconde réponse, c'est celle de Gregg Gonsalves, un des anciens d'Act Up, celle de dire tout de suite que cette affaire va diviser encore plus les gays des musulmans et qu'il le refuse. «Not in my name», dit-il.
Some will use the events in Florida to fan the flames of hate against our Muslim brothers & sisters. This homosexual says: not in my name.
— Gregg Gonsalves (@gregggonsalves) 12 juin 2016
«Certains vont utiliser les événements survenus en Floride pour attiser la haine contre nos frères et sœurs musulmans. En tant qu'homosexuel, je dis: pas en mon nom.»
Heureusement, certains leaders LGBT, ceux qui sont encore crédibles, marqueront comme lui une ligne sur le sol qui dira: à partir de là, c'est une instrumentalisation de la droite, de Trump, du FN en France pour attirer certains gays vers des partis extrêmes qui utilisent leur colère face à l'immigration et qui n'ont plus peur d'exprimer leur racisme.
Le terrorisme intérieur
Voilà ce que soulève la fusillade d'Orlando. C'est une exclusion qui grandit dans la communauté LGBT envers les autres. Dans cette minorité tolérante, le racisme est un sujet que l'on ne traite pas comme il le faut, on le voit tous les jours sur les applications de drague. La communauté LGBT aurait tort de critiquer l'islam car elle doit d'abord regarder son retard en matière d'intégration de tout ce qui n'est pas blanc.
Déjà, cette affaire comporte tous les éléments d'une histoire politique, mêlant terrorisme supposé, homophobie et intégration d'immigrés afghans. Les associations LGBT vont être en première ligne et on peut prévoir que la pression politique sera importante. On parle déjà de terrorisme intérieur, l'Etat islamique a revendiqué la fusillade, la question gay va rejoindre le terrorisme international. Il y avait déjà les crimes contre les homosexuels en Syrie et probablement ailleurs, nous voilà au cœur du sujet qui pourrit la France depuis l'attentat à Charlie Hebdo en janvier 2015.
Cette tuerie homosexuelle est internationale. Toutes les personnes LGBT du monde se sentent touchées. Il va falloir beaucoup de courage pour affronter les effets secondaires de cet événement entre nous, personnes touchées. Et il y a la question de l'islam que nous devons respecter comme n'importe quelle religion.