L'initiative a beaucoup fait parler d'elle ces derniers jours: Gleeden.com, site Internet de rencontres extraconjugales réservé aux hommes et aux femmes mariés ou vivant en couple, débarque en France le 1er décembre. Présenté comme le Meetic officiel de l'adultère (officiel car Meetic compterait en fait près d'un tiers d'utilisateurs déjà engagés dans une relation. Comme nous le confiait encore récemment une copine célibataire: «Je suis sur Meetic mais franchement, vu le nombre de mecs mariés qui sont uniquement là pour des plans cul, ça mène jamais loin»...), ce site a de quoi choquer ou allécher, selon où se situe votre curseur libertinage.
C'est, en tout, cas un bon coup marketing. Vendu comme le premier du genre par ses responsables, histoire de rendre l'annonce un peu plus sulfureuse et d'alimenter la controverse, le site aurait déjà reçu près de 20.000 préinscriptions en France.
En réalité, gleeden.com n'est pas une première en la matière. On peut même dire que l'infidélité en ligne est une industrie plutôt florissante. de5a7.com, site francophone qui affiche près de 4 millions d'utilisateurs, et AshleyMadison.com, basé à Toronto, sont les plus importants sites de rencontres à utiliser ouvertement l'adultère comme argument marketing.
Lancé en 2001, AshleyMadison revendique aujourd'hui plus de 4,5 millions de membres, essentiellement aux Etats-Unis, au Canada, et en Angleterre. Pour l'anecdote, il paraît que le site enregistre des pics de fréquentation après la Fête des Pères (quand les hommes se sentent négligés) et après la Saint-Valentin (là, ce sont les femmes qui viennent en masse). A bon entendeur... Son slogan n'est-il pas «Life is short. Have an affair!»? Quant à ses spots de pub tv, le mieux est encore d'y jeter un coup d'oeil ici et ici.
Mais où est donc passé le puritanisme d'outre-Atlantique?! Face à ses détracteurs, qui sont nombreux comme on peut l'imaginer aux Etats-Unis et qui l'accusent de pousser au crime, Noel Biderman, le PDG, affiche un pragmatisme tout anglo-saxon dès lors qu'il s'agit de business: «Mon site n'incite pas à être infidèle. Les gens n'ont pas besoin de moi pour avoir envie d'aller voir ailleurs. Nous ne sommes pas programmés pour être monogames. La fidélité n'est pas inscrite dans nos gènes. Je me contente de répondre à une demande qui existe de toute façon. Grâce à mon site, les choses ont le mérite d'être claires: je permets simplement aux personnes mariées qui veulent avoir une aventure de faire ça en toute discrétion et de ne pas se retrouver dans des situations embarrassantes, en couchant avec un collègue de travail ou la meilleure amie de leur femme.»
On devrait présenter Noel à Eric Besson! (Pour ceux qui auraient échappé à la promo du livre de l'ex-épouse du ministre de l'Immigration, Manuel de guérilla à l'usage des femmes, sorti le 15 octobre chez Grasset, petite séance de rattrapage avec cet extrait relatant leur cérémonie de mariage: «Le maire énonce les principes bien connus du Code civil "Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance... " Eric l'interrompt alors d'une voix claire: «Secours, assistance, oui. Fidélité, non.»).
Les femmes sont de plus en plus nombreuses à fréquenter Ashleymadison.com. Elles représentent 30% des utilisateurs (contre 15% seulement au départ). Une pintade libertine de notre connaissance, mariée depuis dix ans et qui s'est inscrite il y a quelques mois, explique que la plupart des hommes qui l'ont contactée sont effectivement déjà casés, ne cherchent pas à multiplier les aventures mais plutôt à développer une relation qui leur permette de vivre leurs fantasmes et de retrouver le frisson tué par la routine du couple. «Je me suis inscrite sur ce site parce que je pensais pouvoir échapper aux histoires d'amour compliquées. Je pensais qu'il n'y avait pas d'ambiguïté et qu'on était tous là pour le sexe. Mais en fait, ça devient vite la confusion des sentiments. La vraie vie vous rattrape. J'ai même un amant qui m'a demandée en mariage! Il me voyait déjà entrain de faire griller des saucisses dans son jardin!»
Difficile de savoir si l'infidélité est plus dans l'air du temps qu'avant ou si elle est simplement raccord avec son temps. Tellement raccord qu'elle devient mobile: AshleyMadison a désormais son application iPhone et Blackberry.
Laure Watrin
Image de Une: Couple sur Second Life. FLICKR/Rafeejewell