Le député écologiste de Paris Denis Baupin a démissionné, lundi 9 mai, de son poste de vice-président de l'Assemblée nationale, peu après la publication d'une enquête de France Inter et Mediapart où plusieurs élues ou anciennes élues EELV –parti dont il a démissionné mi-avril– l'accusent de harcèlement et d'agression sexuelle. Le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, avait demandé sa démission quelques heures après la publication de ces accusations dont le député conteste la véracité, les jugeant «mensongères [et] diffamatoires».
Des rumeurs existaient depuis un moment déjà au sein du parti écologiste, écrit Jean-Sébastien Herpin, co-secrétaire régional d'EELV pour la région Centre, dans un post relevé par Libération:
«En 2013, pour le congrès EELV de l’époque, je signais une contribution sur la base d’un texte. Je ne savais pas qui étaient mes co-signataires, on était venu me chercher. Quelques jours plus tard, un ami militant du Nord me lança cette apostrophe: “Mais comment peux-tu signer avec un violeur?” Lui savait, moi pas. Je trouvais la phrase violente, relevant peut-être de rumeurs exagérées, on ne peut concevoir l’inconcevable, surtout dans un parti féministe, moderne, égalitaire. J’étais en colère qu’on m’adresse cette accusation. Je ne savais pas, lui si. Cependant, je m’inquiétais, me renseignais en douce, de ci, de là et la “rumeur” ne semblait plus en être une, mais aucun nom ne m’était donné, aucune preuve.»
L'adjointe au maire du Mans Elen Debost, qui raconte avoir été «victime de faits pouvant relever du harcèlement sexuel», affirme que le président du parti Écologistes!, François de Rugy, était au courant de tout cela, malgré ce que ce dernier expliquait ce lundi matin sur France Inter.
L'omerta et les petits arrangements entre "amis" il savait. https://t.co/JbQ03mSw2R
— debost elen (@debostelen) 9 mai 2016
Contactée par Médiapart, la présidente du groupe EELV à l'Assemblée Cécile Duflot indique elle avoir été plusieurs fois alertée à ce sujet (souvent indirectement), pointant «une zone de flou sur ces comportements»
«L'omerta n'était pas totale», comme l'indique Arrêt sur Images. Vanessa Jérome, une politiste et spécialiste du parti, s'était penchée en 2013 sur les questions de sexualité au sein d'EELV et, dans une partie consacrée à la «conjugalité verte», évoquait, sans mentionner le nom de l'élu ou du dirigeant en question, un «DSK des Verts»
L'article universitaire publié en 2013 et qui mentionnait déjà le "DSK des Verts" est édifiant. #Baupin https://t.co/iDNRKJJVR6
— Margaux Baralon (@MargauxBaralon) 9 mai 2016
«L’officialisation du statut de “seconde femme”, y compris contre le consentement de la concernée, les violences conjugales commises par tel parlementaire, ou les rumeurs de harcèlement sexuel sur les salariées du siège du parti ou sur les “petites mains” des groupes d’élu-e-s, sont parfois abordés avec une relative légèreté.
Les limites entre l’acceptable et l’inacceptable des violences ne semblent, chez Les Verts, pas plus claires ou plus simples qu’ailleurs. [...] La charge de la preuve incombe, ici encore, aux victimes. Et elle ne peut être convoquée qu’après décision de justice. C’est ce qui ressort, selon nous, de la comparaison de deux “affaires” chez Les Verts: celle, connue, médiatisée, jugée –et finalement pardonnée– de Stéphane Pocrain, et celle, citée par la rumeur mais jamais dénoncée, du harcèlement sexuel auquel se livrerait un élu depuis plusieurs années, et qui aurait même suscité l’intervention d’une dirigeante, proposant d’importantes sommes d’argent aux salariées du siège harcelées afin qu’elles ne déposent pas plainte. [...] Sorte de “DSK des Verts”, cet élu semble bénéficier d’une forme de bienveillance, qui n’est pas sans rappeler celle dont bénéficie Dominique Strauss-Kahn.»
Interrogée par France Inter, Vanessa Jérome a expliqué que «les rapports de pouvoir et de domination sont les mêmes chez les Verts comme ailleurs».