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En Allemagne, toutes les coalitions sont possibles

Temps de lecture : 3 min

Dans la Sarre, les verts se sont alliés avec les noirs de la CDU-CSU et les jaunes du FPD.

Drapeau jamaïcain  Flickr
Drapeau jamaïcain Flickr

Le paysage politique allemand est de plus en plus coloré. Chaque parti étant affublé d'une couleur et cinq partis s'étant durablement installés dans les parlements régionaux comme au parlement fédéral, les combinaisons sont nombreuses qui dessinent un véritable kaléidoscope. Les démocrates-chrétiens (CDU-CSU) sont les noirs, les libéraux (FDP) sont les jaunes, les Verts sont... verts et les sociaux-démocrates (SPD) sont rouges comme la gauche radicale Die Linke.

Après les élections du 27 septembre, l'Allemagne va être gouvernée par une alliance noire-jaune qui succède à la coalition noire-rouge de ces quatre dernières années, toujours sous la direction d'Angela Merkel.

Mais la situation est plus bigarrée dans les Länder. Le bicolore le cède souvent au tricolore, comme les feux de signalisation - rouge, jaune, vert - voire à une combinaison dite «Jamaïque» parce qu'elle reprend les couleurs noire, jaune et verte du drapeau de cette île des Caraïbes. La première coalition «jamaïque» dans un Land est sur le point de voir le jour en Sarre. Dans ce petit Etat de l'Ouest de l'Allemagne, les Verts ont décidé de s'allier avec les chrétiens-démocrates et les libéraux, alors qu'une alliance rouge-rouge-verte, sous la direction d'un social-démocrate aurait pu avoir la majorité au parlement régional. Pour garder son poste, le ministre-président sortant (CDU) a consenti des concessions importantes à ses nouveaux partenaires. Mais surtout les Verts se méfiaient d'Oskar Lafontaine, dit «le Napoléon de la Sarre», président fédéral de Die Linke, dont l'ombre continue de planer sur le Land qui a fait sa carrière.

Cette décision des Verts sarrois a cependant provoqué des remous dans le parti au niveau fédéral. Daniel Cohn-Bendit, député européen, s'est déclaré très en colère, traitant le chef des Verts de ce petit Land de «mafioso».

Dans le Brandebourg, le prochain gouvernement sera rouge-rouge, dirigé par des sociaux-démocrates alliés à la gauche radicale, comme à Berlin. Cette coopération qui fait suite à une coalition rouge-noire ne va pas de soi, car dans les Länder de l'Est, le parti Die Linke est encore peuplé d'anciens «IM», des informateurs «informels» de la Stasi, la police politique du régime communiste est-allemand.

C'est pourquoi en Thuringe, un autre Land de l'Est, la direction social-démocrate, contre la volonté de sa base, préfère une coalition avec la démocratie-chrétienne plutôt que de s'allier à Die Linke.

Dans ces trois Länder, les élections ont eu lieu à la fin de l'été ou à l'automne. Dans d'autres Länder, le SPD gouverne avec le FDP (en Rhénanie-Palatinat) ou avec les Verts (Brême), tandis que la CDU est alliée aux Verts à Hambourg.

Toutes les possibilités sont ouvertes. Tout le monde peut s'allier avec tout le monde, au moins au niveau régional ou local. La démocratie-chrétienne, qui récuse par principe toute coopération avec la gauche radicale, gère avec elle certaines villes de l'ex-Allemagne de l'Est.

C'est plus délicat au niveau fédéral. Die Linke était jusqu'à maintenant exclue des combinaisons éventuelles. Son ascension et son ancrage dans le paysage politique allemand posent toutefois un dilemme aux sociaux-démocrates. S'ils se refusent à coopérer avec elle, ils risquent de ne pas retrouver de majorité; s'ils s'allient avec elle, ils courent le risque de voir fuir leurs électeurs centristes. C'est un dilemme qu'a bien connu le Parti socialiste français dans les années 1970 vis-à-vis du Parti communiste et que seule la personnalité de François Mitterrand a permis de résoudre. Tombé à 23% des voix aux dernières élections, le SPD est en quête d'un tel leader.

Daniel Vernet

Lire également: L'Allemagne et la France sur des trajectoires divergentes et Angela Merkel, le triomphe de la discrétion et de l'opiniâtreté.

Image de Une: Drapeau jamaïcain Flickr

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