Au milieu des années 1950, il avait fallu plusieurs années de recherche à l’artiste français Yves Klein pour créer son fameux bleu Klein. Partant d’une base de bleu outremer, il avait fabriqué un bleu si particulier, si parfait. Il avait alors collaboré avec le marchand parisien, Édouard Adam, pour créer cette couleur originale dont la formule est facilement accessible sur le site du marchand situé dans le quartier de Montmartre à Paris.
Ce n’est qu’en mai 1960 qu’Yves Klein avait déposé auprès de l’Institut national de la propriété industrielle la formule. Presque soixante ans plus tard, ce bleu si particulier fait toute la singularité et l’attraction du travail d’Yves Klein.
L’artiste britannique d’origine indienne Anish Kapoor provoque aujourd’hui une belle polémique pour une histoire un peu similaire révélée par le Daily Mail. Il n’en est pas le créateur mais il vient d’acquérir les droits exclusifs sur une couleur, le Vantablack, le noir le plus noir dans le monde. Il aurait négocié les droits exclusifs de ce pigment qui le fascine depuis de longs mois. En 2014, il n’hésitait pas à vanter les qualités de ce «super noir» à la BBC: «Il est si noir, vous ne pouvez presque pas le voir. Il a une sorte de qualité irréelle.»
Exclusivité
Cette couleur est si sombre qu’elle absorbe 99,96% de la lumière. Elle est produite par la société britannique Surrey NanoSystems et a été développée à l’origine à des fins militaires, pour peindre notamment des avions de combats furtifs.
Son créateur, Ben Jensen, expliquait au New York Times en 2014 la particularité du Vantablack. Si on l’utilise pour peindre un vase rempli de fleurs, le vase perd toute dimension et n’est plus qu’une silhouette. Seules les fleurs restent en trois dimensions. Il avait déjà précisé auprès de Dazed qu’il pensait «que cela pourrait changer la façon dont nous voyons l’univers» et s’était déclaré ravi «qu’un artiste de la stature et la réputation d’Anish Kapoor soit intéressé à explorer ses possibilités dans le domaine créatif».
Mais, deux ans plus tard, en devenant une exclusivité pour un seul artiste, le Vantablack est devenu un objet de polémiques. Dans le Daily Mail, le peintre britannique Christian Furr ne retient pas sa colère: «Je n’ai jamais entendu parler d’un artiste monopolisant un matériau... Nous devrions être en mesure de l’utiliser. Il n’appartient pas à un seul homme.»
Même critique dans le Telegraph indien, l’artiste Shanti Panchal se plaint aussi de cette exclusivité de Kapoor: «Je n’ai jamais rien entendu qui soit si absurde. Dans le monde de la création et des artistes, personne ne devrait avoir le monopole.»