La romancière américaine Harper Lee est décédée, vendredi 19 février, à l’âge de 89 ans. En 1961, elle avait remporté le prix Pulitzer de la fiction pour son célèbre roman Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, avant de publier l'an dernier ce qui était seulement son deuxième roman, Va et poste une sentinelle. Mais Harper Lee était aussi une amie de longue date d’un autre géant de la littérature américaine, Truman Capote, et a à ce titre joué un rôle essentiel dans un autre classique de la littérature, De sang-froid (1966).
En 1930, les habitants de Monroeville, Alabama, ne le savent pas encore, mais leur ville abrite deux enfants qui deviendront des monuments de la littérature américaine. Nelle Harper Lee et Truman Capote, deux enfants un peu rêveurs, se lient rapidement autour des histoires qu’ils inventent et de leur amour pour Sherlock Holmes, racontait l'été dernier le New York Times. Ils écrivent même leurs contes, se relayant sur la machine à écrire du père de Harper pour les taper. La romancière s’est ensuite inspirée de cette amitié pour Scott et Dill, duo emblématique de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur. A son tour, Truman Capote a créé Idabel Thompkins, dans son premier roman Other Voices, Other Rooms (Les domaines hantés), à l’image de son amie d’enfance.
Ils déménagent à New York –d’abord Capote, puis Lee– peu après avoir fêté leurs vingt ans, relate la biographe Marja Mills dans son livre Mockingbird Next Door. Le premier a rapidement du succès pour son premier roman et ses nouvelles, tandis que la seconde gagne donc le prix Pulitzer de la fiction en 1961.
Mais avant cela, à la fin de l'année 1959, Truman Capote embarque son amie pour enquêter sur le meurtre d'une famille entière d'une petite ville du Kansas, qu'il a découvert dans un court article du New York Times et qui le fascine. Harper Lee l’aide à recueillir les témoignages des autochtones du Midwest et tape plus de 150 pages de notes, dont va sortir De sang-froid, oeuvre majeure de la carrière de Capote et de la littérature américaine en général. Il ne crédite pourtant le travail de son amie qu'en dédicace du livre, où son nom accompagne celui de son amant («For Jack Dunphy and Harper Lee, with my love and gratitude»), ce qui entache leur relation.
Des rumeurs infondés comme quoi la mère de la romancière aurait tenté de la noyer enfant, ou sur la collaboration de l’écrivain à l’écriture de Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, ainsi que sa jalousie grandissante à l’égard de son amie d’enfance, ont progressivement détérioré les relations entre les deux enfants de Monroeville. «Les drogues et l’alcool n’ont pas provoqué sa folie», écrira plus tard Harper Lee à propos de son ancien ami. «Elles n’en étaient que le résultat.»