En accordant à des grands-parents le droit de prouver, par une expertise de sang, leur lien de parenté avec leur petite-fille née dans l'anonymat il y a quatre mois, la justice d'Angers a fissuré le secret de l'accouchement sous X et créé un précédent. Dans sa décision, le juge des référés du TGI d'Angers a considéré que, «tout en sollicitant le secret de son admission et de son identité au regard de son enfant», la mère «a levé ce secret à l'égard de ses propres parents et permis à sa mère de voir l'enfant peu après sa naissance, établissant ainsi un lien avec elle», indique l'ordonnance, dont l'AFP a eu copie.
L'avocate des grands-parents a souligné l'attitude «ambiguë» de la mère qui avait permis à la grand-mère de venir à la maternité. La petite fille, née sous X en juin 2009, a été déclarée pupille de l'Etat en août.
La jurisprudence estimait pourtant, à travers un arrêt de la cour de Cassation de juillet 2009, que les grands-parents d'un enfant né sous X ne peuvent s'opposer à une adoption et établir une filiation.
Or cette analyse de sang est une première étape afin d'attaquer l'arrêté du conseil général du Maine-et-Loire déclarant l'enfant pupille de l'Etat et essayer de faire obtenir la garde aux grands-parents ou, à défaut, un droit de visite, selon l'avocate.
L'avocat du préfet, tuteur légal de l'enfant, Me Pierre Nedelec, a souligné que «poussée au bout», la décision du juge des référés d'Angers signifiait «la mise à mort de l'accouchement sous X», loi qui date de 1941. «Si une demande d'adoption était formulée puis acceptée, l'enfant pourrait se retrouver la fille de ses grands-parents et la sœur de sa mère. Le père génétique pourrait également revendiquer des droits», a-t-il commenté, sans préciser s'il allait faire appel.
L'avocate des grands-parents a précisé que ses clients connaissaient l'identité du père de l'enfant. Le droit à connaître ses origines, consacré par la Convention internationale des droits de l'enfant (ratifiée par la France) est une revendication portée par diverses associations.
«Qu'on fasse droit à une demande d'analyse, c'est une sacrée porte ouverte!», s'est félicitée Anne-Laure Cotte Bouteillat, membre de l'association «X en colère».
Après la décision de la Cour de cassation, la secrétaire d'Etat à la Famille, Nadine Morano, avait dit réfléchir à «l'idée d'un accouchement protégé», pour permettre aux enfants d'accéder plus tard à l'identité de leur mère biologique. «Cette affaire pose aussi le problème humain des grands-parents qui veulent voir grandir leur petit-fils biologique. Il s'agit pour la justice, avant tout, de respecter l'intérêt supérieur de l'enfant et sa stabilité. Mais, se pose aussi la question de la connaissance de ses racines (...)», avait expliqué la secrétaire d'Etat au Figaro. «Il s'agit pour la justice, avant tout, de respecter l'intérêt supérieur de l'enfant et sa stabilité. Mais se pose aussi la question de la connaissance de ses racines. Un adulte ne peut construire sa vie sans connaître ses origines, s'il souhaite le faire. Je suis favorable à un droit de savoir.»
Image de une: Nadine Morano, secrétaire d'Etat à la famille. Wikimedia CC.
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