Sciences

Attention, le manque de sommeil vous fait avouer n'importe quoi

Temps de lecture : 2 min

Une étude scientifique met pour la première fois en évidence le lien entre privation de sommeil forcée et fausses confessions.

Main d'un détenu ukrainien menotté à un lit, en septembre 2013. SERGEI SUPINSKY / AFP PHOTO
Main d'un détenu ukrainien menotté à un lit, en septembre 2013. SERGEI SUPINSKY / AFP PHOTO

La privation de sommeil est plus souvent présentée dans la culture populaire comme un mode d’interrogatoire violent, employé par d’obscurs services de renseignement, plutôt que comme une pratique de garde-à-vue traditionnelle. Les cas où des personnes ont confessé un crime qu’elles n’avaient pas commis à cause du manque de sommeil ne sont pourtant pas rares, rappelle New Scientist.

Une étude publiée dans la revue scientifique PNAS démontre aujourd'hui qu’une personne est beaucoup plus susceptible d’avouer une faute après de longues heures sans dormir, alors qu'elle n'est pas forcément responsable.

Lors de l’expérience qui s’étirait sur une semaine, 88 étudiants devaient effectuer divers exercices sur ordinateur, décrit Science Daily. Ils ne devaient pas presser la touche «Echap», sous peine de perdre les données. La consigne leur était répétée, plusieurs fois. Le dernier jour, la moitié des participants pouvaient dormir, tandis que l’autre partie devait rester éveillée toute la nuit. Le lendemain, l’équipe de recherches leur faisait signer une feuille présentant leurs résultats, ainsi qu’une mention les accusant d’avoir appuyé sur «Echap».

Les résultats parlent d’eux-mêmes: la moitié des participants n’ayant pas dormi ont signé la déclaration, tandis que seulement 18% des personnes ayant pu dormir ont reconnu avoir appuyé sur «Echap». Alors que personne ne l’avait fait.

«Ce n’est pas aussi terrible que d’avouer un meurtre, déclare Elizabeth Loftus, de l’université de Californie Irvine, qui a pris part à l’étude. Mais certaines personnes se sentaient vraiment mal, croyant que l’expérience était fichue.»

«Cela comble un manque dans les recherches», affirme Saul Kassin, professeur émérite de psychologie au John Jay College of Criminal Justice de New York et pionnier dans les recherches portant sur les faux aveux. «D’autres recherches ont montré que le manque de sommeil peut altérer le comportement des gens dans plusieurs situations, mais c’est la première fois qu’une étude montre que cela peut mener à de fausses confessions de culpabilité.»

Saul Kassin souligne au passage l’influence que de fausses confessions peuvent avoir sur l’avis des jurés au cours d’un procès, mais aussi l’impact que pourrait avoir une telle étude dans un tribunal. Le psychologue suggère que les Etats-Unis adoptent les mêmes lois qu’au Royaume-Uni, où les interrogatoires sont forcément enregistrés et limités dans le temps. En France, les mauvais traitements sont en théorie interdits en garde-à-vue, grâce à la Convention européenne des Droits de l’Homme. Certains recommandent toutefois le passage d’une «culture de l’aveu» à une «culture de la preuve», pour l’imiter l’impact de fausses déclarations sur un jugement.

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