«Un bateau s’échoue sur une lointaine contrée inconnue. Un jeune homme qui doit encore faire ses preuves se voit confier la mission de se mêler aux habitants et de soustraire leur secrets. Sous le charme de la ville sur l’île, il tombe amoureux d’une jeune femme et trahit ses mandataires. Après avoir compris que leur homme les a abandonnés, ils décident de le tuer ainsi que toute la population locale.»
S’agit-il de Pocahontas ou d'Avatar? Difficile à dire. Les trames sont pratiquement identiques. En fait, il pourrait s’agir de n’importe quelle narration. Dans un article adapté de son livre Into the Woods, le producteur britannique John Yorke explique que ce scénario n’est pas propre à une histoire. Il l’est à toutes.
Le bien face au mal
Pour démontrer que toutes les histoires sont calquées sur un même archétype, il prend cet exemple: «Un monstre dangereux menace un peuple. Un homme prend la responsabilité de tuer la bête et le royaume est sauvé.»
Ça correspond à l’histoire du Beowulf, poème épique anglo-saxon cité par l’auteur. Mais c’est aussi Jurassic Park ou Godzilla, en passant par Shrek ou La Belle au bois dormant et tant d'autres. Si on considère que le monstre est un être humain, le scénario correspond à The Shining, Saw, ou même les 101 Dalmatiens! «Le monstre peut adopter n’importe quelle forme. Même si différents en apparence, leur squelette est identique», explique John Yorke.
En somme, une même histoire peut avoir plusieurs dérivées. Elles sont toutes différentes mais ont toutes la même substance. Même le héros a un profil type: c'est une personne courageuse plongée dans un monde inconnu. Elle inspire la sécurité, exprime l’importance de suivre ses rêves et de la loyauté.
Un archétype universel
John Yorke prend pour exemple l'histoire écrite spontanément par l'enfant d'un de ses amis âgé de 9 ans. Voilà ce qu’il en ressort:
«Une famille veut aller en vacances mais la maman ne peut pas se le permettre car elle doit payer le loyer. Les enfants trouvent une carte dans le jardin qui indique un trésor caché dans le bois. Ils font face à beaucoup de problèmes mais finissent par le trouver et partent vers une destination plus belle que prévue.»
Inconsciemment, cet enfant a-t-il reproduit le schéma de toutes les histoires racontées depuis des centaines d’années? Chaque génération s’inspire de ses ancêtres. Mais, le producteur est ferme: la narration a une forme bien précise –voire universelle.
Il existe des centaines de manuels qui traitent de la narration, et chacun prône une technique propre. John Sakes a interrogé plusieurs auteurs sur leur manière d’écrire. Bien que chacun ait sa propre technique et sa propre manière d'aborder la structure, le producteur remarque vite que tous les bons écrits partagent la même trame de fond: celle prenant la forme d'une aventure dans les bois pour trouver l’obscur mais vital secret qui s’y trouve.