Monde / France

2016 en 366 jours et 366 commémorations

Temps de lecture : 9 min

Avouons-le, nous sommes beaucoup à être atteints de commémorationnite aigüe. Et encore plus depuis que l'information et la documentation historique sont devenus plus accessibles en ligne, permettant à tout un chacun, d'une vidéo ou d'une photo, de rendre hommage en ligne à une figure disparue dix, vingt, trente, quarante, cent ans plus tôt.

Nous avons donc décidé de vous présenter, sur l'infographie ci-dessus, 366 événements ou personnalités qui pourraient être commémorés en 2016, du plus évident au plus incongru. Ci-dessous, nous avons développé dix commémorations possibles, de la politique à la presse en passant par la musique et le sport.

Le centenaire de la naissance de François Mitterrand et les vingt ans de sa mort

C'était quoi, c'était quand? Le 26 octobre 1916, François Maurice Adrien Marie Mitterrand naît à Jarnac, en Charente. Le 8 janvier 1996, il meurt au petit matin dans son appartement parisien. Entre ces deux dates, une vie politique qui l'aura notamment vu être onze fois ministre sous la IVe République, avant de devenir le premier socialiste à accéder à la présidence de la République en 1981.

Pourquoi on va en parler. La marque de François Mitterrand reste omniprésente sur la vie politique française, et encore plus depuis qu'un de ses anciens conseillers, lui aussi prénommé François, a accédé à l'Elysée. Un parallèle qui pourrait encore s'accentuer dans l'optique de la campagne de réélection que s'apprête à mener François Hollande, près de trois décennies après celles de son mentor. Fin décembre encore, l'AFP plaçait ainsi François Hollande «dans les pas de François Mitterrand»...

Indice de viralité: bien plus que 54% (le score de François Mitterrand triomphalement réélu en 1988).

Le centenaire de Verdun

C'était quoi, c'était quand? Le 21 février 1916 commençait la bataille de Verdun, l'une des plus longues et les plus meurtrières de l'histoire des conflits armés –plus de 700.000 morts en dix mois– pour un impact stratégique quasi-nul sur la Première Guerre mondiale.

Pourquoi on va la commémorer. Dans la mémoire française, Verdun est le point central de la Première Guerre mondiale, ce «match nul» étant vu comme une victoire de la part d'une armée sur la défensive et dont une partie du territoire était alors occupé par l'ennemi. L’armée française a envoyé sur ce champ de bataille, par rotation, plus des deux tiers des «Poilus», d’où le dicton resté célèbre: «Verdun, j'y étais!» La bataille a aussi exercé des effets durables sur la France: cette bataille fit la réputation de Philippe Pétain et c’est notamment son titre de «vainqueur de Verdun» qui lui valut d'être vu comme un homme providentiel dans la France de 1940.

Indice de viralité: 95%, aucune chance d’y échapper. Il est notamment prévu que François Hollande prononce un discours le 21 février au Mémorial de Verdun, probablement en présence d'Angela Merkel.

Les 70 ans de l'Équipe et les 100 ans du Canard enchaîné

C'était quoi, c'était quand? Le 28 février 1946, L'Équipe succède au journal L'Auto, frappé d'interdiction de parution en août 1944. Au fil des années, le quotidien français ne cesse de grossir, participant notamment à la création de la Coupe d'Europe des clubs champions, l'ancêtre de l'actuel Ligue des champions (tout comme L'Auto avait créé le Tour de France). Le Canard enchaîné, lui, renaît de ses cendres le 5 juillet 1916, après une première tentative de cinq numéros en septembre 1915. L'hebdomadaire continue de paraître depuis, avec sa ligne éditoriale mixant enquêtes et humour.

Pourquoi on va les célébrer. Parce qu'ils sont uniques dans leur genre. L'Équipe est le seul quotidien sportif de France, avec les qualités et les défauts que cela implique. Qui n'a pas en tête les unes mythiques, comme celle célébrant la victoire de la France lors de la Coupe du monde 1998, «Pour l'éternité»? Quant au Canard Enchaîné, c'est un des plus vieux titres de la presse française. C'est aussi le seul à ne pas avoir pris le tournant du web, ne trempant «qu'une palme dans la cyber-mare». Il est également un modèle de transparence, publiant ses comptes et ses revenus.

Indice de viralité: 50% pour l'Équipe, qui se consacrera peut-être un Équipe Explore pour l'occasion. 5% pour le Canard, qui bénéficie moins de l'effet réseaux sociaux.

Les 30 ans de Tchernobyl et les cinq ans de Fukushima

C'était quoi, c'était quand? Le 11 mars 2011, un séisme provoque un tsunami au Japon, avec une vague atteignant plus de 30 mètres par endroits. Elle touche la centrale de Fukushima Daiichi et engendre une catastrophe nucléaire, la première, depuis Tchernobyl en 1986, à atteindre le niveau 7 de l’échelle d’INES. Cette année-là, plus de 200.000 Ukrainiens et Biélorusses avaient été définitivement évacués après l’accident nucléaire le plus célèbre de l’histoire.

Pourquoi on va en reparler. Ces deux catastrophes ont marqué l’opinion publique et influencé la politique énergétique de plusieurs pays européens. La Suisse, l’Allemagne, la Belgique ou l’Italie ont choisi de renoncer progressivement au nucléaire. La France s’est elle engagée à réduire la part du nucléaire à 50% de sa production d’électricité d’ici 2025. La centrale de Fessenheim, dont la fermeture a été annoncée pour 2016 avant d’être repoussée à 2018, cristallise le débat.

Indice de viralité: de 90% à 100%, selon nos experts en radioactivité.

Les dix ans de Twitter

C'était quoi, c'était quand? Le 21 mars 2006, Jack Dorsey postait le premier tweet sur le (désormais) célèbre réseau social.

Pourquoi on va en parler. Depuis, «twttr» a bien changé. De nom tout d’abord, puisqu’en septembre 2006 il est devenu Twitter. De masse d’utilisateurs ensuite. Mais si l’entreprise américaine dénombre aujourd’hui 320 millions d’utilisateurs actifs, elle n’en gagne plus aux Etats-Unis, perd de l’argent et a changé de PDG une nouvelle fois au début de l’été, permettant à Jack Dorsey de faire son retour à sa tête. Les dix prochaines années devraient être aussi passionnantes et mouvementées que les dix premières.

Indice de viralité: 85% sur Twitter, 0% sur Facebook.

Les 400 ans de la mort de Cervantes et Shakespeare

C'était quoi, c'était quand? Les 22 et 23 avril 1616 meurent coup sur coup les poètes et dramaturges Miguel de Cervantes et William Shakespeare, les plus grandes figures respectives de la littérature espagnole et anglaise. Miguel de Cervantes est surtout connu pour L'ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche, ouvrage parodique des romans de chevalerie (et considéré, de par sa narration, comme le premier roman moderne). Quant à Shakespeare, il y a bien trop d'ouvrages pour le définir: citons tout de même Hamlet, La Nuit des rois, Richard III, Macbeth, Roméo et Juliette...

Pourquoi on va les célébrer. Parce qu'étant les plus grandes figures respectives de leurs littératures nationales, leur influence se mesure encore aujourd'hui –on parle d'ailleurs de la «langue de Cervantes» et de la «langue de Shakespeare». En 2011, Shakespeare figurait d'ailleurs dans le top 3 des auteurs les plus traduits au monde de l'Index Translationum, devancé par Agatha Christie et Jules Verne. Pour Cervante, ce dossier de Jean-Luc Puyau et Serge Fohr rappelle que Don Quichotte a inspiré des auteurs français comme Flaubert, Stendhal, Balzac ou encore Edmond Rostand avec Cyrano de Bergerac.

Indice de viralité: 65%, grâce notamment à des hors-série du Point et de l'Express.

Le centenaire des accords Sykes-Picot

C’était quoi, c’était quand? Le 16 mai 1916 sont signés les accords dits Sykes-Picot. Ces accords secrets, négociés par le diplomate britannique Mark Sykes et le diplomate français François-Georges Picot, visent à réorganiser et partager entre France et Royaume-Uni le Proche et Moyen-Orient après la fin de la guerre et la chute escomptée de l’empire turc ottoman.

Pourquoi on va en reparler. Parce que ces accords sont à l’origine des frontières contemporaines de la Syrie et de l’Irak et ont beaucoup contribué à leur instabilité politique en discréditant auprès des populations les États qui se sont construits sur ces bases. Et puis car Sykes-Picot n’est plus qu’un souvenir: en prenant possession de vastes territoires à cheval entre la Syrie et l’Irak, le groupe État islamique est en passe de faire disparaître les dernières traces de ces accords.

Indice de viralité: 40%. Car soyons honnêtes, la géopolitique fait rarement des pics d’audience sur Internet. Encore qu’avec l’EI, on ne sait jamais...

Les 50 ans de Blonde on Blonde

C’était quoi, c’était quand? Le 16 mai 1966 sort Blonde on Blonde, septième album de Bob Dylan et le premier qu’il a partiellement enregistré à Nashville. Avec ce disque, le musicien creuse son sillon rock (entamé depuis Bringing It All Back Home) un peu plus profondément encore. L’accouchement de l’album est d’abord difficile car Dylan est épuisé par son propre rythme de composition (c’est son cinquième album en un an et demi!), et les concerts incessants. Il doit d’ailleurs espacer les séances d’enregistrement de Blonde on Blonde car il poursuit en même temps une tournée mondiale.

Pourquoi on va le célébrer. D’abord, parce qu’il s’agit du premier double album de l’histoire du rock. Ensuite, parce que c’est un chef d’œuvre musical et littéraire. L’album comprend l’une des chansons les plus entraînantes et efficaces de Dylan: «I Want You»; certains de ses titres les plus fameux: «Just Like A Woman», «Rainy Day Women #12 & 35»; deux de ses plus belles chansons d’amour: «Visions of Johanna» et «Sad-eyed Lady of the Lowlands». Et la plume de l’artiste atteint ici des sommets de surréalisme.

Indice de viralité: 70%. Il ne faut jamais sous-estimer la force de frappe des dylaniens. Jamais.

Les 700 ans de la mort de Louis X, dit «le Hutin»

C'était quoi, c'était quand? Le 5 juin 1316, Louis X, roi de France depuis à peine dix-huit mois, meurt à Vincennes après avoir bu glacé juste après une partie de jeu de paume. Il laisse une veuve, la reine Clémence de Hongrie, enceinte de quatre mois –son fils posthume, le roi Jean Ier, ne vivra que cinq jours.

Pourquoi on pourrait en reparler. OK, l'évènement ne présente pas la même ampleur historique que le tricentenaire de la mort de Louis XIV, abondamment célébré en 2015. Pourtant, avec ses rumeurs d'empoisonnement, ses trahisons et ses vengeances, il convoque tout un imaginaire historique romanesque, dans lequel Maurice Druon avait puisé pour sa saga Les Rois maudits, suivie d'une célèbre adaptation télévisée so ORTF. Un univers dont s'est même inspiré George R.R. Martin pour la série Game of Thrones.

Indice de viralité: faible. D'autant que Gérard Depardieu, préposé à la résurrection des grandes sagas et des personnages historiques, a déjà fait sa part ici en tournant en 2005 dans un remake des Rois maudits, avec son propre fils Guillaume dans le rôle de Louis X le Hutin (et Julie Gayet en reine).

Les dix ans du coup de tête de Zinedine Zidane

C'était quoi, c'était quand? «Oh Zinedine. Pas ça, Zinedine. Pas ça Zinedine. Oh non. Oh non, pas ça. Pas aujourd’hui. Pas maintenant, pas après tout ce que tu as fait.» En finale de la Coupe du monde à Berlin, la France et l'Italie sont à égalité 1-1 à douze minutes de la fin de la prolongation quand Zidane, qui a inscrit le seul but tricolore, perd son sang-froid et assène un coup de tête au niveau de la poitrine à Marco Materrazzi, venu le provoquer. Le quatrième arbitre le voit (avec ou sans la vidéo?) et l’arbitre expulse le capitaine de Bleus, qui quitte le terrain et passe devant le trophée sans y jeter un œil. Quelques minutes plus tard, Trezeguet enverra son tir au but sur la barre de Buffon. Les Italiens réaliseront un sans faute et remporteront la quatrième Coupe du monde de leur histoire.

Pourquoi on va en reparler. Parce que dix ans après, une aura de mystère plane toujours autour du geste, même si en France comme au Brésil ou en Angleterre, on avait essayé de comprendre pendant plusieurs jours ce que l’Italien avait pu dire pour provoquer cette réaction. Zidane avait finalement expliqué que Materazzi avait eu des «mots durs» et répétés sur sa mère et sa sœur, avant d’affirmer qu’il ne regrettait pas son geste, même s’il s’excusait auprès de tous ceux qui l’avaient vu.

Indice de viralité: 80%, et même 100% si jamais la France doit affronter l'Italie lors de l'Euro 2016. On prédit une uchronie imaginant ce qui se serait passé si la tête de Zidane sortie par Buffon quelques minutes plus tôt était entrée, et un possible remake avec un coup de tête de Paul Pogba sur Giorgio Chiellini.

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