30 000 personnes à placer, dont 9 000 vivent encore dans des tentes. Le critère pour les «caser»? Des lettres: A pour «accessible», B pour «nécessite encore des travaux», C pour «travaux plus importants», E «inaccessible» et F «impossible d'y retourner». Ce début d'alphabet est ce qui reste aux personnes frappées par le tremblement de terre du 6 avril, dans les Abruzzes. Une bonne partie de ces personnes ont été placées dans des hôtels ou des appartements provisoires, parfois jusqu'à à 100km de leur ancienne habitation. C'est le reportage de Cesare Fiume pour le Corriere della Sera, 6 mois après le tremblement de terre.
Dans le «camp de personne», là où on vit dans les tentes, certains habitants ne veulent ou ne peuvent pas partir: ils ont peur. Peur que la terre tremble encore ou peur de laisser des parents ou leur propre maison, même en ruine. Parfois la raison est de survie: la grande majorité des gens dans les tentes sont des éleveurs, qui ne peuvent pas laisser leurs bêtes. Le problème de ce camp c'est que officiellement il n'existe pas: la Mairie et la Protection Civile, qui ont effectué des opérations de démantèlement, ne s'en font plus charge. Il n'y plus de Police ni de volontaires. Il n'y a plus de cantine, et depuis quelques jours, il n'y a plus d'eau chaude.
Pina Lauria, 54 ans, s'insurge «le Gouvernement a dit qu'avant la fin de septembre il n'y aurait plus de tentes, mais ils ne se préoccupent pas de la situation des gens dispersés. Ni d'où vont les déportés». Déporté est le mot qu'on lit sur les murs de la ville et qui est sur la bouche de tout le monde. C'est la crainte la plus grande pour les gens des Abruzzes: quitter leur ville ou leur village, perdre le tissu social, cesser d'exister. Durant ces six mois, même dans les tentes, la vie avait repris son cours, les familles étaient soudées.
Pour la famille Lovenitti, qui a survécu six mois dans une tente de 20m2 avec ses enfants, neveux et grands-parents, la solution ne vient pas du Gouvernement, qui attribue 600€ de subvention mensuelle aux sinistrés, mais qui a aussi construit des logements qui n'étaient pas conformes et ont dû être refaits. Les Lovenitti ont emprunté pour s'acheter une petite maison en bois, dans les montagnes. La sensation est que l'Etat décourage tout initiative personnelle, pourtant parfois moins coûteuse: il paie 55€ par personne et par jour pour loger les sinistrés dans des hôtels. Avec une famille de 4 personnes cela fait 6 600€ par mois, qui pourraient être investis dans l'achat d'un préfabriqué ou d'un loyer.
La reconstruction des villes et maisons détruites dans le tremblement de terre n'a toujours pas commencé. L'argent a servi plutôt pour remplir la promesse du Gouvernement et construire les habitations provisoires. En attendant, la situation vire au chaos, prise entre le départ de la surveillance policière qui a laissé place aux pillages, et les usuriers qui font grimper les loyers.
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Image de Une: Flickr/Roberto Zampino