France

Ce que l'on sait des terroristes qui ont attaqué Paris et Saint-Denis

Temps de lecture : 11 min

Le soir du 13 novembre 2015, plusieurs fusillades et explosions ont eu lieu à Paris. Les attaques revendiquées par le groupe terroriste Daech ont fait au moins 130 morts et 415 blessés. Slate.fr retrace le parcours des djihadistes dont on connaît désormais le nom.

Impacts de balles sur la vitrine d’un restaurant parisien, le 14 novembre 2015 | REUTERS/Pascal Rossignol
Impacts de balles sur la vitrine d’un restaurant parisien, le 14 novembre 2015 | REUTERS/Pascal Rossignol

Cet article est mis à jour au fur et à mesure de l’avancée de l’enquête.

1. Salah Abdeslam, le principal suspect arrêté

2. Abdelhamid Abaaoud, membre du «commando des terrasses», tué à Saint-Denis

3. Brahim Abdeslam, membre du «commando des terrasses» et kamikaze du boulevard Voltaire

4. Chakib Akrouh, membre du «commando des terrasses», tué à Saint-Denis

5. Ismaël Omar Mostefaï, kamikaze du Bataclan

6. Foued Mohamed-Aggad, kamikaze du Bataclan

7. Samy Amimour, kamikaze du Bataclan

8. Ahmad al-Mohammad, kamikaze du Stade de France

9. Bilal Hafdi, kamikaze du Stade de France

1.Salah Abdeslam
Le principal suspect arrêté

«Je croyais que Salah aimait trop la vie, mais on dirait que je me suis planté», a témoigné un ami du djihadiste à Ouest-France pendant sa fuite. L'implication précise de Salah Abdeslam, 26 ans, dans les attentats du 13 novembre, n'est toujours pas connue avec certitude: les informations disponibles laissent penser qu'il n'a pas participé au massacre physiquement, qu'il aurait conduit les trois kamikazes du Stade de France et qu'il aurait dû être chargé d'une attaque dans le XVIIIe arrondissement, revendiquée par le communiqué de l'EI mais qui n'a pas eu lieu. En cavale pendant plus de quatre mois et faisant l'objet d'un mandat d'arrêt international, il a fini par être arrêté à Molenbeek (Belgique), le 18 mars.

Avant les attentats, le jeune homme semblait mener «une vie normale» dans cette commune de Bruxelles, où il a toujours vécu. Avec son frère, Brahim Abdeslam, il gérait le café des Béguines, «un repaire de petits voyous», selon une voisine du bar, où ils buvaient et fumaient du cannabis.

Ses préoccupations relevaient d'avantage du «football, [des] sorties et [du] cannabis que [de] la religion» selon des propos tenus par certains de ses amis au Monde. Il sortait beaucoup et aimait la compagnie des femmes. «Il brisait des cœurs», appuie son ami dans les pages de Ouest-France. Selon La Libre Belgique, sa présence a été remarquée dans plusieurs bars gays bruxellois, où il orchestrait un trafic de documents:

«Dans ces bars, fréquentés par des gens peu méfiants, il n’est pas très compliqué de piquer des portefeuilles. Il se fait que de nombreux vols de cartes d’identité, permis de conduire, etc., ont précisément été commis à cette période dans ces endroits.»

Ce serait en 2010, après un séjour en prison pour vol avec effraction et trafic de drogue, que Salah Abdeslam aurait débuté sa radicalisation. C'est à ce moment qu'il aurait côtoyé Abdelhamid Abaaoud, l'organisateur des attentats.

Selon des informations d’Europe 1, Salah Abdeslam a été contrôlé par les gendarmes français le 14 novembre au volant d’une voiture avec trois hommes à bord. Les papiers qu’il a présentés aux autorités étaient à son nom, mais il n’était pas encore soupçonné d’avoir participé aux attentats de la veille. En décembre, la RTBF a révélé qu'il avait appelé une personne emprisonnée à Namur, en Belgique, le soir du 13 novembre: un détenu à qui il avait rendu visite en octobre, un mois avant les attentats.

2.Abdelhamid AbaaoudMembre du «commando des terrasses», tué à Saint-Denis

Le père d’Abdelhamid Abaaoud le qualifie lui-même de «diabolique psychopathe». Omar Abbaoud «n’était ni triste, ni heureux, mais soulagé» d’apprendre la mort de son fils, tué pendant l’assaut de Saint-Denis le 18 novembre, selon des propos de son avocate à CNN.

Abdelhamid Abbaoud, âgé de 27 ans, était soupçonné d’être l’instigateur des attentats du 13 novembre –auquel il a participé en tant que membre du «commando» des terrasses, qui a fait 40 morts– et de ceux déjoués en janvier 2015 à Verviers en Belgique. Comme les frères Abdeslam, il a vécu dans la commune de Molenbeek. Connu des services de police à partir de 2002, le futur terroriste multiplie les peines d’incarcération entre 2006 et 2012 «mais jamais pour plus de trois mois», selon Le Monde.

Si la radicalisation d’Abdelhamid Abaaoud a très vite commencé après sa sortie de l’établissement pénitencier de Forest, la rupture définitive avec son père date de 2013: Abdelhamid lui reproche l’éducation de son frère cadet «selon le mode de vie européen». La même année, l’instigateur présumé des attentats du 13 novembre part en Syrie. Il revient quelques mois plus tard pour convaincre son petit frère âgé de 13 ans de rejoindre Daech –son père n’en aura plus de nouvelles.

Abdelhamid Abaaoud attire l’attention des services de renseignement en février 2014 quand il apparaît dans une vidéo de Daech au volant d’un pick-up qui tire des cadavres de «mécréants», d’après des informations obtenues par Le Monde. Six mois plus tard, le djihadiste est visé par des mandats d’arrêt belges et internationaux.

Un djihadiste espagnol interpellé en Pologne en juin 2015 affirme avoir reçu des instructions, probablement de la part d’Abdelhamid Abaaoud, pour commettre des attentats en France. Il lui avait été demandé de viser une «cible facile» comme «une salle de concert» pour «faire le maximum de victimes», selon Jeune Afrique.

3.Brahim AbdeslamMembre du «commando des terrasses» et kamikaze du Boulevard Voltaire

Les seuls passe-temps de Brahim Abdeslam étaient fumer du cannabis et dormir, d’après les confidences de son ex-femme, Naïma, au Daily Mail. L’homme de 31 ans, qu’elle décrit comme «paresseux mais prévenant», s’est fait exploser boulevard Voltaire, à quelques pas du Bataclan, le 13 novembre, après avoir participé aux attaques des terrasses. L’explosion a fait deux blessés graves et une dizaine de blessés légers: seule la charge qu’il portait sur le dos a explosé, selon Mediapart.

Même si son ex-femme n’en fait pas un portrait très flatteur, elle insiste sur le fait que le frère de Salah Abdeslam n’était pas violent. Il n’était pas non plus très religieux: il ne priait pas, ne se rendait jamais à la mosquée et ne faisait le ramadan que parce que sa famille le lui imposait.

Sa famille justement, son frère compris, n’a pas assisté à son mariage –uniquement célébré en mairie–, toujours selon le Daily Mail. «Il n’était pas spécialement proche de sa famille, c’était des gens modernes. Chacun vivait sa vie», explique Naïma. Selon L’Obs, Brahim Abdeslam était connu des services de police avant même sa majorité pour avoir provoqué un incendie dans la maison familiale en 1998, à l’âge de 14 ans. Plus tard, il se fera incarcérer à deux reprises pour vols.

En 2013, Brahim Abdeslam reprend le café des Béguines à Molenbeek. La même année, il constitue une société à l’adresse du bar dont, un an plus tard, son frère Salah devient gérant. Le café a finalement été fermé sous arrêté préfectoral le 2 novembre 2015 pour trafic de stupéfiants.

4.Chakib AkrouhMembre du «commando des terrasses», tué à Saint-Denis

Son profil génétique ne figurait dans aucun fichier de police. Mais c'est en comparant son ADN à celui de sa mère que les enquêteurs ont enfin identifié, le 14 janvier, le kamikaze qui s'était fait exploser pendant l'assaut de Saint-Denis, cinq jours après les attentats. Chakib Akrouh est le dernier membre du commando des terrasses parisiennes identifié, avec Brahim Abdeslam et Abdelhamid Abaaoud. Tous trois sont responsables de 40 morts.

Le belgo-marocain «effacé et introverti» de 25 ans était déjà connu des services antiterroristes belges depuis 2014, selon le Monde. Au mois de mai de la même année, il était même visé par un mandat d'arrêt international. Trois mois plus tard, il est radié des registres communaux de Molenbeek, avant d'être finalement condamné à 5 ans de prison par contumace le 29 juillet 2015, à l'occasion d'un grand procès contre les recruteurs de djihadistes belges.

«L’hypothèse qu’il ait pu, tout comme Abdelhamid Abaaoud, le coordinateur des attentats du 13 novembre, effectuer plusieurs allées et venues entre la Syrie et la Belgique, interroge sur la qualité de la surveillance dont il faisait l’objet», souligne Le Monde.

Son premier voyage en Syrie, Chakib Akrouh le réalise le 4 janvier 2013: des témoins disent l'avoir aperçu à l'aéroport sur le point de s'envoler en aller-simple pour Istanbul. Son arrivée en Syrie est attestée quelques semaines plus tard, en février, par un virement bancaire et des photos sur lesquelles il pose fusil d'assaut à la main. À l'époque, Chakib Akrouh combat pour Daech dans les rangs de la katiba al-Muhajirin («des immigrés», en arabe).

Il est soupçonné de s'être rendu une nouvelle fois en Syrie en janvier 2015, quelques jours avant le démentèlement de la cellule terroriste de Verviers. Le 14 novembre 2015, après avoir participé au massacre des terrasses du nord-est parisien, Chakib Akrouh est localisé –grâce à son téléphone– à deux pas du Bataclan pendant l'assaut de la BRI dans la salle de concert...

Quatre jours plus tard, assailli par les tirs de la BRI, le kamikaze déclenche sa ceinture explosive dans l'appartement rue du Corbillon à Saint-Denis, provoquant, en plus de la sienne, la mort de Hasna Aït Boulahcen et de son cousin Abdelhamid Abaaoud.

5.Ismaël Omar MostefaïKamikaze du Bataclan

«Ce petit était si timide, enfant», a raconté une ancienne voisine d’Ismaël Omar Mostefaï à Paris Match. Dans sa ville native de Courcouronnes, comme à Chartres –où il a emménagé en 2005–, toutes les connaissances du futur kamikaze de 29 ans peinent à croire qu’il est lui aussi responsable du bilan tragique du Bataclan, où l’assaut des terroristes a provoqué la mort d’au moins 90 personnes. C’est pourtant un morceau de son doigt, arraché par l’explosion de son gilet, qui a permis aux enquêteurs de l’identifier comme l’un des assaillants de la salle de concert.

À Courcouronnes, un habitant interrogé par Paris Match se souvient tout de même que la famille a déménagé «à cause des mauvaises fréquentations d’Ismaël», qui appartenait à une bande entrée en rivalité avec une autre. Le maire de la ville d’Essonne, Stéphane Baudet, confirme: «C’est allé trop loin. Ils ont reçu des menaces. Les parents ont donc pris la décision de partir [en 2005].»

Là, ils emménagent dans un quartier résidentiel de Chartres. Ismaël, qui n’est alors âgé que d’une vingtaine d’années, cumule huit condamnations pour des délits de droit commun entre 2004 et 2010 sans jamais avoir été incarcéré, selon Europe 1.

C’est justement en 2010 qu’il se radicalise. La même année, Ismaël Omar Mostefaï fait l’objet d’une fiche S auprès de la DGSI, notamment à cause de ses liens avec un islamiste radical belge, selon Europe 1.

Deux ans plus tard, il coupe les ponts avec sa famille. «Cela fait des années que l’on ne se parle plus,» affirmait l’un de ses frères à des riverains pendant l’été 2015, d’après Paris Match. Selon les informations du Monde, Ismaël Omar Mostefaï est passé par la Turquie pour se rendre en Syrie à l’automne 2013. Il y aurait séjourné plusieurs mois, avant de revenir en France à une date que l’on ignore.

6.Foued Mohamed-Aggad
Kamikaze du Bataclan

«Si j'avais su qu'il commettrait un jour une chose comme ça, je l'aurais tué avant.» Le père de Foued Mohamed-Aggad était sous le choc après avoir appris que son fils était le dernier kamikaze du Bataclan, identifié le 9 décembre.

Âgé de 23 ans et originaire d'une commune proche de Strasbourg, il rejoint la Syrie avec son frère et huit autres amis à la fin de l'année 2013. Deux meurent là-bas alors que sept autres, dont le frère de Foued Mohamed-Aggad, reviennent en France entre février et mars 2014 et sont interpellés dans l'année.

«J'ai des nouvelles tous les jours de lui, confiait la mère de Foued Mohamed-Aggad à son autre fils revenu et incarcéré. Il ne raconte rien de ce qu'il fait de ses journées. Il est avec sa femme en Syrie.»

Foued Mohamed-Aggad est né et à grandi en France. «Un enfant calme», selon des propos tenus par son père dans les colonnes du Parisien, qui explique qu'il n'a «rien vu venir»:

«Il s'était mis aussi à faire sa prière, mais de là à imaginer ce qui se passerait ensuite...»

7.Samy AmimourKamikaze du Bataclan

Samy Amimour, 28 ans, s’est fait exploser au Bataclan. Décrit dans Libération comme un jeune homme timide et gentil par ses proches, ses connaissances à Drancy –où il a vécu avec ses parents et ses sœurs– ou ses anciens collègues de la RATP, il était issu d’une «famille normale» qui «n’est pas la famille Merah», selon les propos du député-maire de Drancy, Jean-Christophe Lagarde, recueillis par France TV Info. Sa mère, féministe et laïque convaincue, milite même au centre culturel berbère de la ville de Seine-Saint-Denis.

Samy Amimour, lui, se radicalise en 2011, selon l’AFP. Ses parents désemparés le voient passer des heures devant des vidéos en arabe. Selon Libération, il devient un fidèle de la mosquée du Blanc-Mesnil, fréquentée par des salafistes auxquels «il donnait l’accolade», se souvient son père, Azzedine Amimour, cité par Le Monde. Il prêche même auprès des femmes de sa famille, qu’il s’efforce d’encourager à porter le voile.

Accusé d’avoir planifié un voyage au Yémen, Samy Amimour est mis en examen en septembre 2012 pour «association de malfaiteurs». L’année suivante, il part pour la Syrie, le 11 septembre 2013. Rien, pas même la visite de son père –racontée par M, le magazine du Monde en décembre 2014–, venu le voir au nord d’Alep pour tenter de le convaincre de quitter le califat autoproclamé et de refaire sa vie en Algérie, n'a pu stopper la radicalisation du jeune homme.

8.Ahmad al-MohammadKamikaze du Stade de France

Qui était Ahmad al-Mohammad? Peu d’informations circulent à son sujet. Celui qui a fait la première victime des attentats du 13 novembre en se faisant exploser aux alentours du Stade de France est arrivé par le même chemin qu’empruntent les millions de réfugiés qui fuient la Syrie.

Secouru au large de l’île grecque de Leros après le naufrage d’une embarcation de réfugiés le 3 octobre dernier, Ahmad al-Mohammad a présenté un faux passeport syrien aux autorités. Problème: si la photo correspond bien au kamikaze du stade de France, son identité reste obscure.

France TV Info évoque une source citée par l’AFP, selon laquelle l’identité qui figure sur le passeport serait celle d’un soldat de Bachar el-Assad tué il y a plusieurs mois. Rien ne prouve que le kamikaze soit de nationalité syrienne:

«Soit c’est bien son nom sur le passeport qu’il a utilisé pour se faire passer pour un réfugié, soit il s’agit de quelqu’un d’autre et le faux passeport a été volontairement déposé pour créer la confusion», suppose une source citée par The Independent.

9.Bilal Hadfi
Kamikaze du Stade de France

«Une cocotte-minute, disait Fatima Hadfi de son fils à La Libre Belgique. J’avais l’impression qu’il allait exploser d’un jour à l’autre.» Dix jours après ces propos, Bilal Hadfi, 20 ans, se faisait exploser aux abords du Stade de France. Le fils cadet de la famille Hadfi était parti en Syrie le 15 février, prétextant à sa mère, ses frères et sa soeur être parti au Maroc «pour se ressourcer et se recueillir sur la tombe de son père».

Ce n’est que quelques jours plus tard que la famille apprend la véritable destination de Bilal. L’une de ses professeurs se souvient d’un étudiant politisé, qui n’a pas hésité à prendre la parole après les attaques contre Charlie Hebdo pour les justifier et dire qu’il fallait «que la liberté d’expression s’arrête».

Une fois sa radicalisation rapide remarquée, la police belge a perquisitionné le domicile de la famille Hafdi à plusieurs reprises dès le mois de mars dernier. Mais il était déjà trop tard.

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