C'était l’un des hommes les plus recherchés d’Europe, si ce n’est du monde. Abdelhamid Abaaoud, djihadiste belge âgé de 27 ans, faisait bien parti des personnes tués lors de l'assaut en Seine Saint Denis, comme l'a expliqué le procureur de la République jeudi. Il était présenté comme l’un des organisateurs, voire même le principal instigateur des attentats de Paris.
Avec l’annonce de sa possible implication, les médias anglo-saxons comme français ont tous présenté cet homme comme le possible «cerveau des attentats» («mastermind» en anglais). Il faut savoir que son nom a été cité dans l’organisation d’autres attaques comme celle de Charlie Hebdo ou celle ratée du Thalys en août dernier, comme l’a détaillé le site du Monde. Même le Premier ministre Manuel Valls a adopté ce mot:
DIRECT - Mort d'#Abaaoud : Valls salue la neutralisation d'"un des cerveaux" des attentats https://t.co/jWka0RdoWC pic.twitter.com/Y8o7spAsfU
— Le JDD (@leJDD) November 19, 2015
Autant d'efforts que la commande d'une pizza
Mais pour le site Politico, l’utilisation de ces deux termes est une erreur car les deux dernières attaques du passé qu’il est supposé avoir organisé ont été un échec, que ce soit pour le Thalys ou la fusillade ratée devant une église de Villejuif:
«Ces deux opérations, en fournissant des tireurs avec des armes puis en leur indiquant la direction vers un groupe de civils, a demandé autant d’imagination et de compétences que la commande d’une pizza.»
Même pour les attaques de Paris, le site estime qu’il n’y avait pas de «cerveau» puisque les trois kamikazes du Stade de France, où 80.000 personnes étaient réunies, n’a fait «qu’une» seule victime.
«Cela peut sembler sans cœur de dire cela, mais une simple mesure permet de dire que les attaques de Paris sont un échec. Plusieurs centaines, voire même un millier, de personnes auraient pu mourir si un vrai cerveau avait été en charge.»
Pas de génies diaboliques
Il faudrait donc privilégier le terme de commanditaire, ou d’organisateur, le «cerveau» sous-entend que «nous ne pouvons pas accepter qu’un Dupont d’intelligence standard pourrait tuer aussi librement». Ainsi, on compare ces djihadistes à des grands méchants de la culture populaire, comme le professeur Moriarty dans les aventures de Sherlock Holmes, ou encore Hannibal Lecter.
Donner ce titre serait donc les surestimer et leur permettre de se valoriser au sein de Daech et de futures recrues. Plus grave encore, cela décrédibilise les forces occidentales et leur capacité à combattre les organisations terroristes. «Quand l’on transforme un méchant en cerveau, nous nous offrons un mauvais confort, une façon de faire sens dans un monde qui n’est ni plein de génies diaboliques comme les versions télévisées voudrait nous le faire croire, ni réconfortant», conclut le journaliste de Politico.