Société

Le suicide: mode et contagion

Temps de lecture : 2 min

Les études concernant les épidémies sociales tendent à faire du suicide un phénomène contagieux, peut-on lire sur le site Rue 89. Dans son ouvrage «Le point de bascule», l'auteur américain Malcolm Gladwell analyse le cas de la Micronésie, un pays où le taux de suicide était presque nul en 1960, et qui est désormais l'un des plus élevés au monde actuellement avec 160 suicides chez les 15-24 ans pour 100 000 personnes.

Selon les conclusions de l'ouvrage, des schémas similaires sont relevés dans la plupart des cas répertoriés: des hommes autour de la vingtaine, habitant chez leurs parents, qui mettent fin à leurs jours le week-end pour des motifs souvent bénins. La fréquence de ces suicides banalise un geste extrême et provoque un phénomène d'entrainement.

Plusieurs drames en France, viennent étayer cette observation. En 2007 deux adolescentes de 14 ans s'étaient défenestrées à Ajaccio en Corse. Une troisième avait été sauvée de justesse par la police. Un blog sur lequel ce groupes d'amies échangeaient au sujet de leurs pulsions suicidaires avait été mis en cause. En 2005, un phénomène analogue avait impliqué deux collégiennes d'Ivry-sur-Seine. En janvier de la même année, deux autres jeunes filles sautaient d'une falaise du Pas-de Calais après avoir annoncé leur suicide sur internet. Même si les suicides collectifs sont rares, il existe, notamment chez les jeunes, un phénomène d'influence réciproque. Le professeur Jean-Philippe Raynaud, professeur en psychiatrie, parle de modèle «identificatoire».

Malcolm Gladwell souligne également que l'influence des médias est très importante dans la diffusion de cette identification. Selon une étude du sociologue californien David Philips, les Unes des grands journaux américains rapportées aux statistiques des suicides indiquent une forte corrélation. Par exemple, l'annonce de la mort de Marilyn Monroe s'est traduit par une hausse de 12% du nombre de suicidés dans l'année.

Cependant cette approche est battue en brèche par le sociologue Alan Wolfe, rappelle Rue89. Il estime que l'on risque de focaliser sur le contexte plus que sur la détresse des individus à risque. Le blog Econoclaste porte une analyse similaire sur la prise en compte hypertrophiée du contexte et des influences. L'auteur, ayant assisté à un suicide sur son lieu de travail, constate qu'il est impossible de détermine une cause unique, ni des facteurs favorisants. Il se construit une sorte de narration qui rend intelligible l'inimaginable. Chaque suicide répond à une mécanique complexe et individuelle.

Il s'accorde cependant avec les conclusion de D. Philips: la médiatisation opère comme une sorte d'autorisation. Il rappelle qu'à ce titre, il est interdit de parler des suicides dans les médias norvégiens et turques. Pour lui aussi, le risque principal réside dans la focalisation sur les causes qui donnent un sens à l'acte: les conditions carcérales, les conditions de travail chez France Télécom et Renault ...

[Lire l'article complet sur Rue89]

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Image de Une: le noeud du pendu/wikimédia

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