Bien avant le crash aérien du 31 octobre, qui a provoqué la mort de 224 personnes, les touristes avaient déserté le Sinaï.
Cette problématique a fait l'objet d'un travail photographique, publié sur Time et exposé à la Maison européenne de la photographie à partir du 12 novembre, intitulé «Sinai Park». «Nous avons découvert que la plupart des endroits où nous avions l'habitude d'aller fermaient de plus en plus chaque année», racontent ses auteurs, Andrea et Magda, un duo de photographes franco-italien. Pendant neuf mois, ils ont donc documenté la désertion des touristes, l'abandon des investisseurs mais aussi la militarisation croissante de la région.
À l'exception de la ville de Charm el-Cheikh, où des visiteurs (principalement russes) continuent de se rendre, le reste de la région est délaissé. À l'image de Dahab, qui se situe pourtant dans le sud de la péninsule, à plus de 400 kilomètres des combats au Nord du Sinaï, où un entrepreneur confie à Al-monitor que le taux d'occupation de son hôtel est passé de 100 à 20% ces dernières années. La fermeture de certaines routes et la militarisation des autres en direction de cette ville balnéaire constituent des obstacles supplémentaires à la venue de visiteurs.
Région destabilisée
Le Sinaï est destabilisé depuis lontemps, mais on observe une multiplication des attaques depuis le développement récent de la branche égyptienne de l'organisation État islamique dans la région. En juin 2015, au moins dix-sept soldats égyptiens sont morts dans un affrontement avec des combattants Daech de la «Province du Sinaï» (Wilayat Sinai en arabe), dans le nord du désert. D'autres attaques pendant l'été ont ciblé des soldats ou des navires de l'armée égyptienne.
Les affrontements entre le pouvoir central et différents groupes armés dans cette région n'est pas nouveau. De plus, depuis l'accord de paix de 1979 et le retrait des troupes d'occupation israélienne, la péninsule a été marginalisée.
«Les citoyens locaux bédouins n'ont pas le droit de rejoindre l'armée et le peuple du Sinaï a été mis à l'écart d'une grande partie de[s] développement[s] économique[s] de la région au cours des trois dernières décennies», précise un article publié sur Time en juillet dernier.
Représailles?
Mais selon Mokhtar Awad, chercheur au Center for American Progress à Washington, cité par le journal américain: à la différence du groupe État islamique en Irak ou en Syrie, «Wilayet Sinai a été et sera toujours installé dans le Sinaï, un groupe porté sur le Sinaï. Il peut être contenu».
On ne connaît pas encore les causes de la catastrophe de samedi mais il est probable que l'avion se soit disloqué dans les airs. Or, si la branche égyptienne de l'organisation État islamique a revendiqué la destruction de l'Airbus, en représailles aux bombardements russes en Syrie, les gouvernements égyptien et russe ont contesté cette version des faits.