Alors que Kim Jong-un, dirigeant nord-coréen, a demandé à ses troupes se trouvant sur la frontière de se tenir prêtes à intervenir après les échanges de tirs d’artillerie jeudi 20 août 2015, l’ONU et les États-Unis s’inquiètent de la possibilité d’une reprise de la guerre entre les deux pays de la péninsule est-asiatique. La Corée du Nord a laissé à son voisin du Sud jusqu’à samedi 17 heures pour arrêter sa propagande anti-communiste diffusée par haut-parleur à la frontière; dépassé ce délai, elle menace d’intervenir militairement.
En cas d’attaque (qui paraît par ailleurs risquée pour la Corée du Nord, qui pourrait étouffer un peu plus son économie en se privant des revenus d’une grande zone industrielle située à la frontière), s’agira-t-il vraiment d’une reprise de la guerre entre les deux Corées?
Pas de traité de paix
Techniquement non, puisqu’aucun traité de paix n’a été signé entre les deux pays. En 1953, l’armistice de Panmunjeom, qui met fin aux hostilités entre les forces militaires en présence, n’a jamais abouti à un traité. Il y a eu des échanges de prisonniers, la création d’une frontière normalement provisoire avec une zone démilitarisée, mais l’article IV de l’armistice, qui prévoyait d’organiser une conférence sous trois mois pour organiser le départ des forces étrangères (Chine et coalition des Nations unies) et de régler «la question coréenne», entendez reconstruire une Corée unifiée, fut un échec.
Officiellement, la guerre entre les deux gouvernements coréens n’a jamais cessé
Il ne semble pourtant pas que les deux Corées se livrent une guerre sans merci depuis plus d’un demi-siècle. Certes non, mais la guerre n’est pas que militaire car, le principe d’un armistice, c’est qu’il prévoit une cessation des hostilités entre des armées, alors que le traité formel de paix est la cessation d’un désaccord entre des gouvernements. Officiellement, la guerre entre les deux gouvernements coréens n’a jamais cessé.
Obstacle nucléaire
Toutes les tentatives de négociations pour aboutir à un traité de paix depuis 1954 n’ont jamais été concrétisées. La Corée du Nord a même essayé de négocier directement avec les États-Unis en 1974 en s’engageant à traiter avec le Sud en cas de retrait des troupes américaines. Le principal problème pour négocier, c’est qu’il faudrait que les États-Unis et la Corée du Sud reconnaissent l’État nord-coréen, ce qui n’arrivera pas tant qu’un accord ne sera pas trouvé sur les ambitions nucléaires du régime communiste.
Tant que la paix n’est pas signée, la Corée du Nord peut se retirer de l’armistice et menacer militairement la Corée du Sud, comme elle le fait aujourd’hui. C’est d’ailleurs loin d’être la première fois. Ce fut le cas en 1994 à cause du déploiement de missiles américains au sud, mais aussi en 1996, en 2003, en 2006, ou encore en 2009. La dernière en date fut en 2013 à cause de la politique sévère des États-Unis sur la question nucléaire, et a poussé la Corée du Nord à un isolement encore plus fort qu’auparavant.
La situation paraît isolée et improbable, mais elle n’est pas unique. Non loin de la péninsule coréenne, deux pays sont encore en guerre depuis la Seconde Guerre mondiale: la Russie et le Japon n’ont en effet jamais signé de traité de paix à cause d’un différend sur îles Kouriles du sud.