Mercredi 5 août, 20th Century Fox dévoilait (enfin), la première bande-annonce du film Deadpool, l’anti-héros par excellence. Prévu pour février 2016, c’est-à-dire loin de la saison des blockbusters estivaux, Deadpool est l’adaptation d’un comics Marvel assez particulier: Wade Wilson (interprété ici par Ryan Reynolds), ancien agent des Forces spéciales, souffre de plusieurs tumeurs. Il va accepter d’être le cobaye du projet Arme X, auquel participa aussi Wolwerine, mais contre son gré. Doté d’un don d’autoguérison par un scientifique sadique, Wade Wilson va s’échapper et mettre sa nouvelle vie au service de son métier de mercenaire.
Malgré un charisme indéniable, le cabotin Deadpool reste un super-héros relativement inconnu du grand public. L’adaptation cinématographique réalisée par Tim Miller est bienvenue car cela pousse Marvel à proposer enfin aux spectateurs un personnage différent des super-héros assez lisses auxquels nous avons eu droit jusque-là (désolé, mais les blagounettes de Tony Stark ne comptent pas.)
Le chemin de croix d'un anti-héros interdit aux moins de 17 ans
Du cul, des gros mots, des blagues et du sang. Il n’en fallait pas plus pour retourner la salle du Comic Con de San Diego début juillet, où l’équipe du film présentait ces images en avant-première. Les jurons et la transgression du film ne sont pas innocents. Condensés en 2 minutes 50, ils sont là pour flatter toute une génération de jeunes adultes sûrement frustrés par une dizaine de films Marvel-Disney où les super-héros ne prennent pas le risque de déplaire au jeune public, indispensable à sa réussite commerciale.
Mais que le chemin fût long pour voir émerger ce projet lancé au début des années 2010. La Fox a longtemps été frileuse à l’idée de financer un héros aussi «différent» et potentiellement risqué étant donné l’interdiction au moins de 17 ans qu’il faudrait appliquer aux États-Unis (le fameux R-rated). À l’époque, le réalisateur Tim Miller faisait savoir que son équipe «n’abandonnerait jamais».
«Deadpool est toujours vivant et nous attendons simplement que le studio accepte ce qui pourrait un putain de bon film.»
C’est une vidéo-test en image de synthèse (aujourd’hui inaccessible) qui a fini par convaincre la Fox de lancer ce projet assez fou il faut bien le dire.
Aujourd’hui, les choses ont bien changé, le pari pourrait être gagnant: Deadpool apparaît comme l’un des films de super-héros les plus attendus de 2016 et les plus parlés sur Internet. Il suffit de se pencher sur les résultats de recherches Google depuis le début de l’année et sur les mentions Twitter au moment du Comic-Con pour comprendre à quel point Deadpool pourrait être encore plus important que des films comme le très attendu X-Men Apocalypse, une saga dont est issu justement le héros narcissique.
Impression écran du site Topsy, qui répertorie les mentions sur Twitter.
Deadpool a compris comment parler à Internet
Ce puissant écho en ligne n’est pas seulement dû au fait que Deadpool fait des blagues graveleuses et utilise des mots comme «putain» («fuck» si vous préférez) ou promet qu'il va «se branler ce soir» après avoir réussi à tuer trois méchants avec une seule balle. Le mercenaire narcissique a une autre particularité: il a conscience d’être un héros de comics et brise régulièrement le «quatrième mur» pour parler au lecteur.
Une caractéristique évidemment conservée par Tim Miller pour ce film et sa promotion. Depuis plusieurs mois, son interprète Ryan Reynolds brisent régulièrement l’écran de l’ordinateur pour interpeller et vanner qui il peut, y compris son propre personnage.
With great power, comes great irresponsibility. #deadpool #officialsuit @deadpoolmovie pic.twitter.com/MPM89bYz1B
— Ryan Reynolds (@VancityReynolds) 27 Mars 2015
«Un grand pouvoir implique une grande irresponsabilité». Une phrase moquant l'une des plus célèbres réplique du film Spider-Man, avec Tobey Maguire.
Smells like someone died up in here. #alivepool pic.twitter.com/sZqvmagVND
— Ryan Reynolds (@VancityReynolds) 8 Avril 2015
«Ça sent le mort par ici.»
#Deadpool: A motherfucker since 1991. #happymamasday pic.twitter.com/0ihBq71PHW
— Ryan Reynolds (@VancityReynolds) 10 Mai 2015
«Un putain d'enfoiré depuis 1991. #bonnefêtedesmamans»
Hey #SDCC, Thank you for being a friend... pic.twitter.com/Kl52TtOPio
— Ryan Reynolds (@VancityReynolds) 8 Juillet 2015
«Hey, le Comic Con de San Diego, merci d'être mon ami...»
Un humour qui colle parfaitement à Reynolds, sorte de paria d'Hollywood qui traîne derrière lui deux gros échecs dans la catégorie super-héros (Green Lantern en 2011 et R.I.P.D. Brigade Fantôme en 2013) et prend un malin plaisir à se tourner en auto-dérision sur Internet. D'ailleurs, dans la bande-annonce de Deadpool, il demande à ce qu'on ne lui donne pas de «costume vert», une référence évidente à son rôle raté dans Green Lantern qui plaira aux fans.
He's not the most popular member, but I love the no-nonsense, assistant lighting technician, Doug. https://t.co/ksF68CvszZ
— Ryan Reynolds (@VancityReynolds) 21 Juin 2015
«Quel est ton One Direction préféré?», lui a demandé une fan. «Ce n'est pas le membre le plus populaire, mais j'aime le pragmatique technicien-assitant aux lumière, Doug», a répondu Reynolds.
Et comme The Hollywood Reporter expliquait justement au moment de la diffusion de la bande-annonce au Comic Con, ce n'est pas grave si Deadpool ne séduit pas tout le monde et si les enfants ne pourront pas aller le voir. Ce qui a marché dans cette vidéo, «ce n'était pas juste les insultes, ni l'apparition de Stan Lee [créateur de nombreux héros Marvel] ou l'hyper-violence, mais c'était qu'elle ressemblait au premier film qui parle à son public dans sa propre langue», explique le journal.
D'ailleurs, Ryan Reynolds a fait savoir qu'il voulait embrasser, «avec la langue», la personne qui avait mis la bande-annonce en ligne illégalement au moment du Comic Con. Comprendre, peu importe les risques, ce qui compte pour Deadpool, c'est de renouer avec les fans de Marvel qui l'ont rendu célèbre, et, si possible, de leur faire des bisous. Avec la langue.