Waukesha, Wisconsin (Etats-Unis)
Audace. C’est le mot du jour depuis l’annonce officielle de la candidature de Scott Walker à l’investiture républicaine pour la présidentielle américaine de 2016. À plusieurs reprises, le terme a été prodigué à la foule de supporters étouffants de chaleur qui étaient rassemblés dans un centre d’expositions, qui tenait plus ce 13 juillet 2015 du sauna que d’autre chose. Les uns après les autres, les intervenants ont tous témoigné de l’audace de Walker avant que ce dernier ne rejoigne la scène en passant triomphalement au milieu d’une foule en délire. Le candidat a lui-même utilisé le mot plusieurs fois.
Néanmoins, il n’y a rien eu de particulièrement audacieux dans ce qu’il a dit. Pour résumer: il est pour la croissance, la sécurité et l’Amérique. Il est pour une politique républicaine on ne peut plus classique: contre l’Obamacare, pour la construction d'un oléoduc, le Keystone Pipeline, contre les réglementations et pour la baisse des impôts.
Difficile d’y trouver quoi que ce soit de révolutionnaire. Pour tout dire, c’est même moins audacieux que ce que proposent certains de ses adversaires. Mais Scott Walker est le plus audacieux des candidats républicains actuellement en lice. N’importe qui peut avancer des idées et proposer des politiques. Avec Walker, les électeurs républicains peuvent facilement s’imaginer qu’il ne changera pas de ligne.
En ces temps de combats politiques hyperpartisans, aucun candidat n’a réussi à défendre les principes conservateurs avec une telle constance que Walker. À vrai dire, c’est ce que les électeurs républicains attendent: un candidat qui se batte et gagne pour les causes conservatrices. C’est pourquoi Walker a utilisé le verbe «gagner» six fois.
Un public blanc à 99%
L’endroit où les politiques se déclarent candidats en dit beaucoup sur leur campagne à venir. Jeb Bush a ainsi choisi le Miami Dade College afin que la diversité des visages représentés parle de son désir d’élargir le parti républicain. Bush a d’ailleurs depuis parlé de la composition de ce public, qui ne ressemblait pas à l’idée de que l’on se fait de l’électorat typique de son parti. Le public de Walker était, quant à lui, blanc à 99% et il s’est déclaré candidat dans le Waukesha County, un bastion républicain rouge vif [NDT: le rouge est la couleur associée au parti républicain et le bleu aux démocrates].
Par ces positions politiques, il entendait s’opposer radicalement aux progressistes
Le Wisconsin est un État violet, mais Walker a gagné en faisant encore rougir les parties déjà rouges. À l’inverse de Bush, qui se veut être un candidat rassembleur pour toucher de nouvelles circonscriptions, Walker promet aux électeurs républicains qu’en cas de victoire, il s’en tiendra à la doctrine la plus conservatrice.
Walker n’a jamais parlé du mariage homosexuel et il n’a évoqué l’avortement que brièvement, mais son discours était des plus belliqueux. Il serait le seul qui, non seulement, bat les démocrates, mais, en outre, les remet à leur place.
Le public a particulièrement applaudi lorsqu’il a mentionné l’idée d’une carte d’électeur avec photo d’identité, une loi sur le port d’armes cachées qu’il avait fait passer, et une autre établissant la «castle doctrine» (loi sur l’autodéfense). Par ces positions politiques, il entendait s’opposer radicalement aux progressistes. Le public ne soutenait pas seulement Walker, il soutenait une vision de l’Amérique dans laquelle les avancées progressistes sont vaincues.
La petite attaque contre Ted Cruz
Dans le montage vidéo projeté avant que Scott Walker n’apparaisse sur scène en bras de chemise (dans un style très «casual Friday»), les progressistes comme Ed Shultz ou Rachel Maddow étaient présentés comme déprimés par le fait que Walker ait si bien survécu aux élections. Le score de Walker était présenté non comme une simple victoire pour lui, mais comme le moment auquel «l’Amérique a retrouvé sa voix», comme le dit l’une des voix off.
S’il y a bien un candidat que Walker espère battre, c’est le sénateur Ted Cruz. Walker et Cruz sont les deux concurrents les plus sérieux pour devenir le porte-drapeau des conservateurs. L’argument de Walker est que, si les discours de Cruz vont dans le bon sens, il n’a aucun accomplissement concret à son actif. Dans sa vidéo, Walker a fait une référence immanquable à Cruz.
«Il y a de bons combattants dans le parti républicain, mais ils n’ont pas gagné les mêmes batailles que moi, affirme-t-il. Il y en a d’autres qui ont remporté des élections, mais ne se sont pas impliqués de manière constante dans les grands combats. Nous avons montré qu’il est possible de faire les deux à la fois.»
Pour les primaires, les électeurs font généralement leur choix en fonction de deux critères: son positionnement idéologique et ses chances d’être élu. En général, ils abandonnent l’un des deux critères pour voter. Walker affirme que, cette fois-ci, ils peuvent avoir les deux à la fois.