La vidéo d'une intervention policière brutale lors d'une fête autour d'une piscine semi-privée à McKinney, au Texas, a relancé le débat sur le racisme de la police américaine. Les forces de l'ordre sont intervenues à la suite des appels de voisins qui se plaignaient du trop grand nombre de jeunes (en grande majorité noirs) sur place. Le nombre de nageurs maximum autorisé avait été dépassé et une voisine avait crié aux jeunes de «rentrer dans leur HLM».
Le policier qui a menacé les adolescents noirs avec son arme et plaqué au sol une fille de 14 ans a démissionné un jour après la diffusion de la vidéo (le chef de la police locale a qualifié ses actions d'«indéfendables»).
Depuis, la presse américaine réexamine cette affaire à la lumière de l'histoire tendue de la ségrégation raciale dans les piscines du pays. Un article de The Atlantic, repéré par Reader, rappelle qu'à partir des années 1920 les piscines américaines étaient racialement ségréguées et que, dans les années 1950, lorsque les Afro-Américains ont commencé à vouloir changer ces restrictions, ils se sont heurtés à l'hostilité farouche des blancs.
Fuite des blancs
Par exemple, dans la ville de Marshall, au Texas, en 1957, un jeune homme noir a fait un procès à la municipalité pour que la nouvelle piscine publique soit accessible aux noirs. Lorsqu'il s'est avéré que la ville allait perdre son procès et devoir ouvrir sa piscine à tous, les habitants ont voté pour que la ville vende son centre de loisirs à un club privé, qui pouvait continuer légalement à interdire les noirs.
Sur Slate.com, Jamelle Bouie rappelle que, lorsque les piscines étaient interdites aux noirs, ces établissements publics de baignade étaient très populaires. Mais à partir du moment où les Afro-Américains ont pu y aller aussi, les blancs les ont délaissées.
Lorsque les piscines publiques étaient interdites aux noirs, elles étaient très populaires
Selon l'historien Jeff Wiltse, qui a écrit un livre sur les dynamiques raciales dans les piscines, les blancs «craignaient que les hommes noirs, qui avaient selon eux un désir indomptable pour les femmes blanches, touchent les femmes dans les piscines ou leur fassent des avances».
À St-Louis, dans le Missouri, en 1949, lorsque des noirs sont venus à la piscine pour contester la ségrégation, des milliers de blancs les ont chassés violemment. Et, lorsque dans les années 1950, les lois ont forcé les piscines à accepter les noirs, la baisse de fréquentation a été impressionnante: pendant l’été 1948, il y avait environ 313.000 visites dans cette piscine de St-Louis et, en 1950, quand les noirs ont été acceptés, on est tombé à 60.000, puis 25.000 visites en 1954. Les blancs avaient fui et la plupart des nageurs étaient noirs.
Les nageurs blancs se sont en général réfugié dans des piscines privées, et ce n'est qu'en 1973 qu'il est devenu illégal d'interdire les noirs dans ces établissements privés. Pour Jamelle Bouie, l'altercation à McKinney s'inscrit dans cette longue histoire, notamment car la piscine en question était située dans un quartier à majorité blanc.