Il y a quelques mois, une étude faisait la une du journal Bild, le plus important d’Allemagne. «Maigrissez grâce au chocolat!» titrait le quotidien, en citant les résultats d’une étude de l’Institut du régime et de la santé en Allemagne. Son directeur, Johannes Bohannon, expliquait alors que manger du chocolat accélère la perte de poids, joue positivement sur le taux de cholestérol et améliore notre bien-être de manière générale. Rien que ça. Forcément, certains médias ont adoré ces résultats et se sont empressés de les relayer.
Sauf que l’étude est faussée et que Johannes Bohannon n’existe pas, pas plus que l’Institut du régime et de la santé. L’auteur de l’étude est en fait journaliste, il s’appelle John Bohannon, et il a décidé de mettre fin à la supercherie dans un article publié sur le site io9.com et repéré par Reader. Il précise dès les premières lignes que l’étude est authentique, que des tests cliniques ont bien été effectués. Mais, derrière des données vérifiées, il souhaitait critiquer le caractère aléatoire des études sur les régimes:
«C'était, en fait, une étude plutôt assez commune quand on s'intéresse aux régimes. Ce qui signifie: ce n'était pas de la science exacte. Les résultats étaient dénués de sens, et les conclusions pour la santé des humains que les médias ont repris à l'envi et diffusé à des millions de gens dans le monde entier n'étaient pas fondées.»
«Tickets de loterie»
Il raconte ensuite comment s’est mis en place ce hoax scientifique et médiatique. Après avoir recruté un docteur allemand, un statisticien, et une quinzaine de sujets sur Facebook, John Bohannon et un collègue journaliste ont réalisé des tests basés sur trois régimes différents.
Il s’est avéré que, sur les 21 jours d’étude, le chocolat faisait perdre du poids 10% plus vite chez les sujets ayant mangé une barre chocolatée par jour. On pourrait se dire alors que les résultats sont probants, d’autant plus que l’étude a pris en compte 18 mesures différentes, telles que le poids, le cholestérol, la qualité du sommeil, etc. Mais c’est justement cela que voulait dénoncer John Bohannon.
«Il faut voir les mesures comme des tickets de loterie. Chacun a une petite chance de prendre la forme d’un résultat “significatif“ à partir duquel on peut sortir une histoire pour la vendre aux médias.»
Les médias ont suivi, sans jamais remettre en questions le nombre de patients étudiés ou la validité des mesures. Le journaliste, qui met en garde contre ces études scientifiques souvent manipulées à des fins médiatiques, explique que seuls certains internautes ont eu la clairvoyance de remettre en doute son étude dans les commentaires. «Tous les jours sont un poisson d’avril dans la nutrition», avait écrit l’un d’entre eux.
Cette fausse étude fera d'ailleurs l'objet d'un documentaire diffusé début juin sur Arte.